Ma génération d’octogénaire, encore marquée par le droit de vote attribué
aux femmes, jetait l’opprobre sur les abstentionnistes. J’ai moi-même considéré
que s’abstenir n’était pas remplir son devoir de citoyen et je considérais qu’il
devait s’agir d’un cas de force majeur. Dans nos villages de France, on regarde
encore d’un mauvais œil ceux qui ne sont pas venus signer le registre
électoral. Nombre de citoyens votent blanc uniquement pour cette raison au lieu
de s’abstenir, ce sont des abstentionnistes qui n’osent pas afficher leur
conviction que le choix proposé ne leur plaît pas. Le mal vient d’abord du fait
que le vote blanc ne sert pas à grand-chose puisqu’il est considéré comme un
vote nul et n’intervient pas dans le comptage des votes exprimés. Certains
candidats, lors du premier tour, ont exprimé la volonté de considérer ces votes
dans le comptage. La seule concession faite jusqu’à présent est de les compter
à part… ce qui leur fait une belle jambe.
Le vote blanc va finir par compter car la peur que cela fasse
grossir le nombre d’abstentionnistes n’a plus lieu d’être puisque c’est déjà le
premier parti de France. La force du vote abstentionniste est d’affaiblir les
candidats élus et en l’occurrence pour la présidentielle, celle du nouveau Chef
de l’Etat. D’ailleurs, très logiquement, lorsque l’abstention atteint 50% des
suffrages exprimés, l’élection devrait être annulée et les candidats en lice ne
devraient plus avoir le droit de se représenter. Vu le refus de plus en plus
grand des politiciens exprimé par les citoyens, cela pourrait très bien devenir
le cas car la motivation de l’abstention serait boostée par cette règle. L’abstention
et le vote blanc réunis prendraient alors leur plein sens de vote démocratique
de rejet global des choix proposés. Il est anormal que nous soyons obligés d’accepter
un des candidats si la majorité ne veut aucun d’eux.
C’est pourtant ce qui va se présenter le 7 mai, l’électeur
aura le choix entre quatre solutions, l’un des deux candidats, l’abstention et
le vote blanc. Il est pour l’instant poussé à choisir l’un des deux, et bon
nombre d’entre eux vont mettre leur bulletin dans l’urne sans aucun
enthousiasme en votant pour l’un des deux. C’est le spleen qui atteint l’électeur
pratiquant le vote CONTRE. Or cette catégorie ne cesse de croître et n’est
évidemment pas recensée par les statistiques électorales. L’ostracisation des
deux candidats l’un comme l’homme de la Finance prédatrice du peuple, et l’autre
comme la bête immonde, insinue dans l’esprit de l’électeur que ne pas choisir c’est
accepter l’inacceptable et se sentir coupable si l’impensable arrive. Pourtant
parmi tous ceux qui vont voter CONTRE, il y a un rejet des deux candidats, on
vote pour le « moins pire ». Quelle horrible image d’une démocratie
assumée !
C’est pousser un candidat qui en fait, dès son élection va
être la cible conjointe de ceux qui avaient voté POUR un autre choix et de ceux
qui avaient CONTRE son adversaire. Si le poids des CONTRE est important, il est
très probable qu’il ne pourra pas vraiment gouverner. On a donc faussé le jeu
normal de la démocratie, car le camp des abstentionnistes, c’est-à-dire de ceux
qui ne veulent aucun des deux ou sont dégoûtés de l’ensemble de la politique et
de ses représentants, voit fuir une partie importante de la désapprobation du
corps électoral pour les candidats en lice. Le candidat élu a une
représentativité qui ne correspond plus à la réalité électorale. La démocratie
est faussée.
Mais dans le cas du vote du 7 mai, le choix du vote CONTRE
est encore plus absurde. En effet aucun des deux candidats ne pourra réaliser
les promesses faites en dehors de celles qui correspondent aux Grandes
Orientations de la Politique Économique. Pour Macron cela explique d’ailleurs
pourquoi il ne peut pas répondre aux sollicitations de Mélenchon sur la loi
El-Khomri, puisqu’il s’agit de l’application d’une directive européenne. Pour
Marine Le Pen, elle peut sortir du traité de Schengen parce qu’il s’agit d’un
traité à part. Par contre la sortie de l’euro est impossible car elle n’est pas
prévue dans les traités, et la renégociation des traités ne peut se faire qu’à
l’unanimité des 27 membres si l’on exclut le Royaume-Uni. On peut entrer dans l’euro
mais on ne peut pas en sortir sans sortir de l’UE.
Ceci explique au passage que, compte-tenu du peu d’enthousiasme
du peuple français briffé depuis 20 ans sur les bienfaits de l’euro et depuis
10 du catastrophisme d’en sortir, la candidate effectue un rétropédalage
rapide. La perspective de négociations sans certitude d’en sortir, ajouté à la
complication d’un système de monnaie commune que les électeurs ont du mal à
comprendre, fait que le nouveau couple NDA-Marine n’envisage plus vraiment de
se battre pour convaincre les français qu’en réalité l’UE nous tue lentement
mais sûrement. Pour l’autre candidat, c’est la soumission sans conditions à
Bruxelles. Les candidats qui pensent que l’UE est mortifère n’ont plus de
représentant et ceux qui croient que l’UE est bénéfique n’ont entendu qu’un son
de cloche et voteront pour la Finance ou contre la bête immonde. Le résultat
sera le même car ils seront soumis aux mêmes directives.
Le vrai vote était oui ou non à l’UE. Ce combat n’existe
plus, l’un veut le statu quo et l’autre jette l’éponge. Le choix qui reste est
de voter Macron si l’on croit à l’UE et de s’abstenir si l’on n’y croit pas. Ce
qui va sortir des urnes ne représentera aucunement la carte électorale réelle
mais sera l’illustration d’un jeu de dupes où les électeurs sont floués car
privés d’une véritable campagne sur le fond et poussés à choisir entre deux
maux au lieu de les dénoncer l’un et l’autre par l’abstention. Il reste encore
les législatives mais, si le réflexe du vote CONTRE perdure, le résultat sera
également faussé avec une culpabilité plus grande pour l’abstention le choix
étant plus large. Espérons que la campagne sera moins maîtrisable par les
médias qui ont joué un rôle prépondérant lors de l’élection présidentielle et
qu’un débat beaucoup plus ouvert puisse avoir lieu… même si je constate que le
Système est d’ores et déjà bien verrouillé et que les grands médias tenus par
la Finance continueront leur matraquage en empêchant le seul débat qu’ils
redoutent, celui de l’UE.
On ne peut faire savoir à tout moment que l’on ne croit plus
à rien, que les politiciens sont tous des pourris, qu’il faut tout changer, que
les banquiers et les multinationales sont des exploiteurs du petit peuple, que
nos libertés s’amenuisent chaque jour, etc. et succomber à encourager de
nouveau ceux qui mèneront, à des variantes près, la même politique de
soumission à l’UE contrôlée par les États-Unis et de vassalisation auprès de l’OTAN,
bras armé des mêmes. Rien ne peut changer sans la sortie de l’UE, et le peuple
sera de nouveau grugé dans une troisième expérience qui sera la simple suite
des précédentes pour 5 ans. Mais sachez-le bien si le peuple refuse le moyen
démocratique de l’abstention, il lui restera la rue mais aller dans la rue c’est
tenter l’épreuve du sang. Néanmoins c’est la seule chose que craint la Finance…
le désordre.
On verra bientôt si le
peuple commence à comprendre
Qu’on le guide par le
bout du nez vers le chaos
De la pauvreté dont souffrent
déjà les grecs,
Pauvreté qui va s’emparer
de l’Italie
Et qui s’empare déjà de
nos rues !
Votez en conscience et sans
peur
Plutôt que la tête dans
le sable.
L’abstention est un
vote
De refus d’obéir !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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