La guerre en Syrie et en Irak prend
une tournure nouvelle. Deux faits majeurs se sont produits, la victoire de
Donald Trump à la Présidentielle américaine, et la libération d’Alep. Il s’agit
bien d’une libération et les commentaires des médias occidentaux ne reflètent
que le dépit de la coalition devant la réussite russo-syrienne. Alep Ouest,
pour faire court, a été encerclée par les forces « terroristes » et
soumise à un siège et des tirs incessants, avant que la situation s’inverse et
que ce soit Alep Est qui le soit. Sans l’intervention massive de l’aviation, la
libération d’Alep Est aurait duré encore de très longs mois et gagnée maison
après maison, immeuble après immeuble. Le massacre de la population civile est
autant due à l’aviation russo-syrienne qu’à l’empêchement mis par les rebelles
à l’évacuation des civils menacés ou à leur exécution. L’utilisation des écoles
et des hôpitaux comme lieux de résistance et les charniers récemment découverts
ne font que montrer l’horreur d’une guerre que nous n’aurions jamais dû
encourager. L’opprobre est sur nous quand on découvre dans un bunker les
officiers occidentaux, quataris et arabo-saoudiens.
La Russie, l’Iran et la Syrie légale
redeviennent maîtres du jeu. La coalition occidentale est empêtrée dans une
guerre sur Mossoul qui va s’avérer encore plus difficile à gagner sans un
emploi massif de l’aviation. La ville est plus grande et la population plus
nombreuse. Le massacre de la population civile sera difficile à éviter. Les
promesses de Hollande sur la victoire proche sont aussi dénuées de certitude
que celles sur le chômage. La victoire sur Mossoul ne résoudra rien, elle
déplacera les lieux de conflit. Daech, Al Qaïda et les groupes affiliés essaiment
un peu partout au Moyen-Orient, à Gaza, en Egypte, au Maghreb, dans la corne de
l’Afrique, jusqu’au Kenya et au Nigéria, et désormais en Ukraine grâce à la CIA. Nos forces spéciales se
dispersent un peu partout. L’Europe est divisée et absente politiquement et
militairement. La Turquie cesse provisoirement son double-jeu et se rapproche
de Poutine pour se concentrer sur sa guerre contre les kurdes et parler
pipeline. Celle contre Bachar El-Assad est remise à plus tard. Le peuple
américain et même ses soldats sont las de ces guerres lointaines, où les
cercueils n’en finissent pas de revenir sur la terre natale, et de son rôle de
gendarme du monde qui le fait haïr partout.
C’est ainsi qu’un deuxième évènement
majeur, d’ailleurs en partie dépendant de ces guerres, va changer
fondamentalement la donne géopolitique, c’est l’arrivée de Trump au pouvoir.
Obama termine mal son mandat, en mauvais joueur et en va-t’en guerre. C’est une
misérable fin pour un prix Nobel de la paix qui a aidé une clique Clinton
corrompue et l’a faite échapper à l’enquête du FBI et à la justice. Les médias
traitent encore Trump de nationaliste, avec le relent de fascisme bien connu.
Je dirais plutôt que c’est un souverainiste. Trump va se dégager le plus possible
des engagements militaires américains en cours et de la charge financière de l’OTAN
sur l’Europe. Le lien étroit entre les USA et Israël va être remis en cause et
réduit à ce qui est lié strictement à l’intérêt américain. Le combat de Trump
sera économique avec une arme, le dollar qui reste la principale monnaie de
réserve, avec un énorme programme d’investissement dans les infrastructures, avec
un appel massif de capitaux étrangers grâce à une remontée des taux d’intérêt. On
va donc vers un bouleversement complet des relations Russie-UE-USA, du système
monétaire international et de la mondialisation.
Néanmoins le Moyen-Orient va rester
une zone de conflit pour d’une part des raisons religieuses de combat entre sunnites
et chiites et d’autre part par la politique de survie et de conquête d’Israël.
Sa connivence avec les pays du Golfe, en
particulier l’Arabie Saoudite, lui a permis de se lier avec Daech qu’il
continue à soutenir. Israël se sait menacé et rêve d’étendre son influence sur
un grand Israël, tel qu’il est écrit dans la Torah. En plus de leurs intentions
déjà bien connues de prendre le contrôle total de la Cisjordanie et de la Bande
de Gaza, de garder en permanence le Plateau du Golan en Syrie et de s’étendre
dans le sud du Liban, les expansionnistes israéliens ont aussi les yeux sur
certaines régions de l'Irak, considérées comme faisant partie du «Grand Israël»
biblique. Israël est pour l’instant surtout sur la défensive et le redécoupage
de la carte du Moyen-Orient attendra que les batailles de Mossoul et de Raqqa
rendent leurs verdicts.
En attendant Israël fera tout pour
que la guerre perdure au Moyen-Orient pour éloigner toute menace de l’Iran
chiite. Le double-jeu avec Daech sert cette politique qui éloigne le danger de
ses frontières y compris celui du Hezbollah devenu un ennemi puissant et redoutable.
C’est pourquoi l’aviation israélienne est surtout présente aux frontières de la
Syrie et du Liban. La présence de Daech en Egypte, pays qui se détourne de ses
liens avec les USA, et dans le Sinaï, sert de zones tampon à Israël. Le Mossad
a déjà été fortement impliqué dans la formation des forces militaires Pesha
Merga kurdes. Le déplacement de kurdes juifs vivant en Israël vers des
sanctuaires historiques juifs est un objectif de longue date. Le Kurdistan est
au centre des vues israéliennes. D’ailleurs l’expansion israélienne en Irak est
soutenue par les deux principales factions kurdes, dont l'Union Patriotique du
Kurdistan.
On voit que la complexité des jeux
géopolitiques au Moyen-Orient est telle que cette zone est encore très loin d’une
phase de stabilisation. Beaucoup de forces religieuses et étatiques s’opposent
à la paix dans cette région du monde. De plus la motivation de l’intervention
de la coalition est très axée sur le pétrole de la région. D’une part il y a
une guerre sur le trajet du pipeline qui doit acheminer le pétrole vers l’Europe
soit celui des pays du golfe soit celui de l’Iran, et d’autre part sur l’exploitation
des grandes ressources pétrolières découvertes dans l’Est de la mer
Méditerranée. La plupart des pays, de la Grèce à Israël, convoitent cet or
noir. Alors que les moyens financiers des pays du Golfe commencent à s’amenuiser
et que l’autosuffisance en pétrole est acquise aux États-Unis, quatre acteurs
vont jouer un rôle primordial dans le Moyen-Orient. Les deux plus importants
sont la Russie et les États-Unis mais la Turquie et Israël sont incontournables.
Ils ont une force militaire, une identité nationale forte, et une ambition de conquête
qui prend racine dans la survie pour Israël.
En choisissant délibérément le camp occidental,
en ciblant la chute de Bachar el-Assad, en ne dénonçant pas le double-jeu de l’Arabie
Saoudite et du Qatar, en s’impliquant militairement sans mandat de l’UE, en
masquant le double-jeu turque et israélien, la France s’est pour l’instant mise
hors-jeu en tant que médiatrice, malgré son rôle historique dans cette région.
L’énorme instinct de survie d’Israël à forte identité religieuse,
La rentrée de la Russie dans la géopolitique mondiale,
L’arrivée de Trump qui va changer les alliances,
L’impuissance de l’Europe vassale de l’OTAN,
Le déni de la France comme médiatrice,
Laisse un Moyen-Orient en cible
D’appétits porteurs de conflits.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du
Languedoc-Roussillon
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