lundi 2 janvier 2017

La France dans le grand enjeu mondial à venir (10ème partie et fin)



Deux impressions se font jour dans le jugement du système de santé français chez nos compatriotes. La première c’est une satisfaction cocardière sur l’excellence relative de celui-ci. La seconde c’est que nous payons toujours plus pour nous soigner. Alors qu’en est-il réellement ? Pour ce faire je vous propose de commenter des informations détenues par la Banque Mondiale. Les dépenses de santé par rapport au PIB donne une idée comparative. Elles s’élevaient à 11,54% en 2014. Le graphique ci-contre montre une évolution très rapide entre 2005 et 2013, date à partir de laquelle la politique d’austérité a amené une stagnation de ce rapport.

Le même constat peut être fait sur les dépenses/habitant. La seule différence est dans les années 2002-2005 où l’on constate que l’augmentation de la prise en charge des dépenses de santé par rapport au PIB a été plus important que celle des dépenses/habitant. Ceci ne peut s’expliquer que par une baisse sensible du PIB/habitant, donc l’augmentation notable du nombre d’habitants ou la diminution du PIB, ou les deux en même temps. Le chiffre de 4959$/habitant en 2014 est à retenir pour des comparaisons avec d’autres pays. La faible évolution des dépenses/habitant entre 2008 et 2014 est la signature de la politique d’austérité. Elle peut être le signe d’une meilleure gestion ou d’une prise en charge plus importante des dépenses par les patients. 

La réponse nous est donnée par le pourcentage de dépenses non remboursées. De 7,4% en 1995, le pourcentage tombe à 6,337% en 2014. La chute brutale s’est produite en 2011. L’utilisation des génériques et la sortie d’un grand nombre de médicaments dits « de confort » a certainement eu un effet sur la consommation qui se concentre sur les médicaments à fort taux de remboursement. Il semble que cet effet soit derrière nous. Ceci ne veut pas dire que les dépenses sont plus efficaces et que les assurés sont mieux pris en charge. L’impact général sur la santé est à regarder de plus près quand on sait que l’augmentation de la durée moyenne de vie vient de marquer le pas.

Ce satisfecit apparent sur notre système de santé résiste-t-il à une comparaison avec les pays étrangers ? Nous allons reprendre les comparaisons avec les trois indicateurs précédents. Visiblement la France fait partie du groupe de tête des pays européens pour son niveau de dépenses par rapport au PIB. Elle devance largement le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne, de peu les Pays-Bas et est à hauteur de la Suède qui s’est créée une réputation dans ce domaine. On peut être surpris de voir l’Allemagne nous devancer mais il est possible qu’un effort particulier soit fait sur les infrastructures. 

La part du PIB par habitant consacrée aux dépenses de santé montre la volonté du pouvoir dans la protection de la santé mais le résultat constaté par habitant est l’un des indicateurs de la qualité potentielle des soins de santé. Cette fois nous ne sommes plus dans le groupe de tête mais devant le Royaume-Uni, l’Italie et l’Espagne. Ce sont les pays nordiques Norvège, Suède, Danemark avec le Luxembourg qui consacre le plus d’argent par habitant. Le résultat obtenu par la Suisse est remarquable car il est dû à une part importante du PIB consacrée à la santé et à un PIB/habitant plus élevé que la plupart des pays.

Les dépenses de santé peuvent être importantes mais qu’en est-il de la participation réelle de l’assurance maladie ? Cette fois la France est presque en tête de la faiblesse des dépenses de santé non remboursées. Ce qui est un point particulièrement positif à condition que cela ne corresponde pas à un nombre de médicaments pris en charge nettement inférieur à celui des autres pays. Seuls les Pays-Bas font mieux. Le Royaume-Uni et l’Allemagne sont derrière nous. A contrario la Suisse a opté pour une participation élevée de l’assuré. 

Pour conclure sur la position de la France par rapport aux autres pays, on peut constater que le niveau du PIB/habitant joue sur le pourcentage de dépenses non remboursées comme le montre le graphique ci-contre. La France se distingue par un pourcentage de dépenses non remboursées beaucoup plus faible que la moyenne à même PIB/habitant. Seuls les Pays-Bas font mieux et remportent la palme du très probable meilleur système de santé. Une étude complémentaire sur la durée de vie apporterait un éclairage supplémentaire sur la qualité des soins, mais la France peut et doit continuer dans la voie tracée sans faire peser une politique d’austérité qui diminuerait la part du PIB consacrée à la santé et la part prise par la solidarité sociale. Les dépenses de santé sont freinées depuis 2012 par une politique d’austérité qui finit par plomber la croissance sans espoir de voir le chômage réellement baisser malgré toutes les annonces avec des chiffres plus ou moins trafiqués. Nous avons vu que c’est entre 2010 et 2012 que la part des dépenses non remboursées a chuté depuis la baisse s’est stabilisée. C’est donc au précédent gouvernement que nous le devons. La France a un satisfecit de bonne gestion mais ses dépenses de santé par habitant ne la place pas en tête des pays européens. 

Tant que la croissance n’est pas revenue, que la France n’a pas rattrapé son handicap de PIB/heure travaillée, une politique d’équilibre budgétaire au prix d’une moins grande prise en charge de la solidarité nationale est à exclure. Elle ne peut qu’empêcher l’accès aux soins pour les moins riches et diminuer le pouvoir d’achat. C’est le danger qui menace la politique de santé française.

La couverture de dépenses de santé par la solidarité 

Doit être considérée comme une tâche régalienne

Au même titre que la Défense et l’Enseignement. 

Sa vocation première reste la santé de tous.

L’équilibre budgétaire, qui n’exclut pas 

La bonne gestion, ne se nourrit pas

Aux frais de la santé pour tous. 

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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