lundi 21 décembre 2015

État d’urgence ou diplomatie pour la paix ?



La France s’enfonce dans un terrorisme de longue durée et les dispositions législatives ne cessent de renforcer la limitation des libertés et de s’introduire dans notre vie privée. On va en profiter pour modifier les articles 16 et 36 de la Constitution, passage vers les pleins pouvoirs de l’exécutif. Les forces de police et de renseignement sont renforcées, l’Armée est mobilisée. La vie du pays est fortement perturbée par un Etat de plus en plus inquisiteur et répressif. La politique de rigueur est mise en attente pour une politique de sécurité intérieure coûteuse. Le gouvernement dit tout faire pour éviter les attentats tout en laissant entendre que la sécurité totale ne peut exister et en distillant la peur d’une guerre chimique et biologique. Depuis un mois selon le Ministère de l’Intérieur, 2.700 perquisitions ont été menées. Depuis le 13 novembre, 360 arrêtés d’assignation à résidence ont été signés par le Ministre de l’Intérieur. Fait-il tout son possible ou bien gère-t-il une situation qu’il crée lui-même ? L’état d’urgence est-il en mesure d’éviter réellement un attentat sur des cibles aussi dispersées et aussi nombreuses sur l’ensemble du territoire ?

A la dernière question, la réponse est non. Il n’est que de se souvenir des actes de résistance durant la dernière guerre mondiale alors que l’armée allemande occupait tout notre territoire. Quel était le but ? Créer un climat d’inquiétude en créant des attentats sur des cibles variées et le plus possible dispersées. Le résultat était une mobilisation plus grande des allemands pour assurer la sécurité de ses troupes stationnées partout et les éloigner du front. Les arrestations des résistants n’ont pas fait cesser les attentats tant leur motivation était grande. C’est donc la motivation qui est le principal moteur du terrorisme. En l’occurrence c’est la haine des valeurs de l’occident qui ressurgit. Pourquoi ? Parce que nous avons réveillé ce sentiment en allant le provoquer par la guerre en terre musulmane. La cause est là, nous ne cessons de l’alimenter et nous ne traitons que les effets. Faut-il continuer l’état d’urgence aggravé ? Des attentats ont eu lieu aussi aux États-Unis au cours des quatorze années qui séparent les événements terribles et à la fois improbables du 11 septembre et le massacre du 2 décembre à San Bernardino, dont celui du marathon de Boston en 2013, mais le nombre de morts est loin d’atteindre les 400 personnes tuées par la foudre. Ont-ils décrété l’état d’urgence contre la foudre ? 

Regardons ce qui s’est passé dans l’histoire récente des États-Unis. Le terrorisme djihadiste n’est arrivé aux États-Unis qu’après que Washington ait formé et armé les moudjahidines dans les années 1980 ; qu’après avoir mené une guerre délibérée en Arabie et en Mésopotamie dans les années 1990 ; et qu’après avoir nourri par la suite l’anarchie des États en déliquescence du Moyen-Orient. De fait, une fois que les néoconservateurs ont pris totalement le pouvoir lors des élections de 2000, Washington a fauché ces États, Afghanistan, Irak, Libye, Syrie, Somalie, Yémen. À présent, tous ces États en déliquescence sont devenus un terreau fertile pour le terrorisme, mais aucun d’entre eux n’avait fricoté avec le terrorisme jusqu’à ce que les partisans du changement aient gain de cause sur les différents régimes tyranniques et autoritaires qui auparavant régnaient sur ces régions désolées. Il n’y a rien de nouveau sous le soleil : l’État Islamique n’est pas en soi plus menaçant pour les États-Unis que ne l’était Al-Qaida à l’apogée de sa gloire. S’il peut même se déclarer comme un État, c’est uniquement grâce aux innombrables cadeaux que lui ont fait Washington et ses alliés.

C’est donc bien notre suivisme d’une politique du chaos, dirigée par les États-Unis sous de faux prétextes, qui est la cause du terrorisme en France. Le fait est que le terrorisme n’a pas soudainement surgi des enseignements d’une religion vieille de 1.300 ans. C’est même l’ensemble de nos actions militaires qui est à l’origine de ces actes de violence des musulmans fanatiques. Notre politique étrangère est un fiasco en particulier dans notre acharnement à vouloir la disparition de Bachar Al-Assad, et nos aides apportées aux rebelles et à Al-Nosra, autre nom d’Al-Qaïda. Ce faisant, nous sommes devenus la cible numéro un et nous nous sommes privés de l’aide des services de renseignement syriens qui auraient pu nous aider à éviter des attentats. Notre position dans le conflit syrien est une erreur stratégique majeure qui fait prendre des risques inutiles au peuple français. Depuis quatre ans les Etats-Unis mènent une guerre au Moyen-Orient en y impliquant leurs alliés après avoir créé Daesh et lui avoir donné les moyens de nuire aux pouvoirs en place à Bagdad et à Damas. 

La Syrie, avec l’aide de la Russie, du Hezbollah et de l’Iran, est en train de réduire la résistance des groupes rebelles, dont Al-Nosra, et a regagné des territoires en quelques semaines. La Turquie est priée de fermer ses frontières et sa situation intérieure dégénère. Son double-jeu devient contre-productif. Malheureusement l’UE, particulièrement l’Allemagne, lui tend les bras. Il en est de même avec l’Arabie Saoudite. La coalition essaie de sauver les meubles et l’EI, qui commence à sentir la défaite, s’est préparé à se transférer sur la Libye et l’Afghanistan. Mais pour nous le mal est fait. La France est dans le collimateur et sur ce point il ne faut rien attendre des Etats-Unis pour qui une France affaiblie est une chance supplémentaire de manipulation.

L’état d’urgence nous maintient sur le pied de guerre au sein de l’OTAN pour l’objectif d’affaiblissement de la Russie. Un conflit plus général est possible. La Russie montre qu’elle ne se laissera pas faire et ne tolèrera plus qu’un de ses avions soit abattu sans réagir cette fois. La concentration d’armes et de troupes ne cesse d’augmenter de part et d’autre. L’état d’urgence aggravé ne nous protège pas. Il transforme petit à petit notre pays en État policier et prépare les esprits à la guerre alors que tout devrait être fait pour la faire cesser. La Russie nous a tendu la main et la guerre doit laisser la place le plus vite possible à la diplomatie. Si tu veux la paix, prépare la guerre est ma devise d’officier d’État-major. Mais nous ne voulons pas la paix, alors nous entretenons la guerre. 

 C’est l’état d’urgence de paix qui devrait prévaloir.

Nos politiques prennent le chemin inverse 

Et créent ce sentiment dans un peuple

Qui ne sait plus ce qu’est la guerre

… Le massacre des innocents !

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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