Santé
(suite)
Notre
Ministre de la santé a paradé sur la réduction du déficit de la Sécurité Sociale
en présentant pour 2017
un budget en quasi-équilibre. Mais cela dépend quelles branches nous scrutons.
Si trois d’entre elles devraient bien être à l’équilibre, voire excédentaires,
en 2017 (retraite, accidents du travail, famille), ce n’est pas le cas de
la branche maladie, avec un déficit prévu de 2,6 milliards d’euros, et du
Fonds solidarité vieillesse (FSV), à moins 3,8 milliards d’euros.
Seulement, comme toujours les prévisions budgétaires sont calculées sur des
bases trop optimistes, ce qui n’est pas le cas dans le privé. La sécurité est
de faire des dettes programmées et non dues à un excès d’optimisme. Politique
oblige à dorer la pilule sur son action. Par ailleurs, les objectifs de la
Sécurité sociale sont calculés à partir d’une prévision de croissance de 1,5 %
pour 2016 et 2017. Or l’Insee a déjà revu à la baisse la croissance de l’année
en cours, qui ne devrait atteindre que 1,3 %. L’OCDE donne 1,225% pour la France
en novembre 2016.
Même sur la base de 1,3%, le rapport
de la commission des comptes de la Sécurité sociale (CCSS) mentionne, pour
2017, un déficit prévu de… 10,3 milliards d’euros, notamment creusé par le
déficit de la branche maladie à 8,3 milliards. Soit bien plus que les chiffres
annoncés par le gouvernement (déficit global à - 4,1 milliards, avec une
branche maladie à - 2,6 milliards). Le gouvernement table pour 2017 sur une
économie de 4,1 milliards avec les recettes habituelles, baisse des dépenses
hospitalières, baisse du coût des médicaments avec les génériques, virage ambulatoire
avec moins de chirurgie à l’hôpital, et pertinence des soins avec baisse du
tarif des libéraux. Quand on sait qu’il va s’y adjoindre une baisse du
remboursements des dépassements d’honoraires à un maximum de 100% du tarif
conventionné pour les opérations chirurgicales, on peut s’attendre à une charge
supplémentaire laissée aux patients.
Que peut-on déduire de ces
informations ? Tout d’abord que l’objectif de déficit visé est intenable
et que l’essentiel des économies se trouve dans la baisse du prix des
médicaments (1,43 Mds€), et la pertinence des soins avec baisse du tarif des libéraux (1,135Mds€). Par ailleurs on voit mal diminuer
les dépenses hospitalières chez les praticiens (médecins, infirmiers) qui sont
en sous-effectif. L’économie de 0,845 Mds€ pourrait bien devenir une
dépense supplémentaire ou une baisse de la qualité des soins. A part la gestion administrative, les
bâtiments et le matériel médical, le reste paraît au taquet. Le virage
ambulatoire est déjà pris avec le renvoi des malades chez eux beaucoup plus tôt
sans que l’on ait véritablement vérifié si les suites opératoires étaient aussi
bonnes qu’à l’hôpital. L’économie de La baisse du prix de médicaments basée sur
les génériques est très optimiste, car il est de l’intérêt pécuniaire des
pharmaciens de les délivrer et peu de gens réclament désormais les autres. Néanmoins
il est prouvé que, même si la formule de base est la même, certains génériques
sont moins bien assimilés que leurs homologues non génériques.
En conclusion, la qualité des soins est
en cause, la profession médicale mise sous surveillance et moins bien payée, le
patient soumis à des coûts supplémentaires dans beaucoup de cliniques en
particulier des grandes villes, les revendications du personnel hospitalier peu
entendues. On peut s’attendre à voir la liste des médicaments remboursés se
rétrécir, et leur taux de remboursement diminuer. Le remboursement par les
mutuelles ne cesse de progresser comme me le confirment les laboratoires
médicaux entre autres. Ceci veut dire un renchérissement du coût des mutuelles.
La santé s’oriente vers une prise en charge par les mutuelles qui ne sont ni
plus ni moins que des assureurs privés pour la plupart, sauf pour les
fonctionnaires. Ceci est particulièrement sensibles pour les laboratoires
médicaux où le remboursement par les mutuelles ne cesse de croître. La
politique santé n’est pas clairement exprimée, donc d’année en année on voit
que la qualité des soins diminue car de plus en plus de personnes ne se font
pas soigner pour des raisons financières et le désert médical augmente son
emprise, non seulement en milieu rural mais aussi dans les agglomérations. Le
délai pour avoir un rendez-vous chez un spécialiste augmente et la queue chez
le médecin généraliste s’allonge et les déplacements aussi en milieu rural.
Il faut savoir ce que l’on veut en
matière de santé. L’équilibre budgétaire au prix de diminution de la qualité
des soins, et du report sur le patient des coûts non assumés, est-il vraiment l’objectif
souhaité par les français ? Le coût de la politique santé doit-il tomber
progressivement entre les mains des privés qui n’attendent que cela ? Je
constate que l’Obamacare ne s’avère pas une solution qui satisfasse les plus
démunis aux États-Unis et les bons soins restent hors de prix. La réponse est
que la qualité des soins pour tous doit rester l’objectif, même si l’égalité
pour tous reste un objectif vers lequel on doit tendre en sachant qu’on ne l’atteindra
jamais complètement. Cela suppose que la solidarité nationale garantie par l’Etat
doit rester le support de la politique de santé. Par ailleurs la concurrence
entre le privé et le public pour les soins reste une émulation et un choix
donné au patient pour trouver la meilleure qualité de soins opératoires et
post-opératoires.
Les économies sont à trouver dans deux domaines qui n’engagent
pas la qualité des soins. Le premier c’est le coût des hôpitaux et cela passe
par des audits sur la qualité de gestion de ceux-ci faits par des privés
indépendants et sans aucun lien avec la structure auditée. Je sais qu’il y a
des économies à faire autres que celles du travail du personnel médical dans
des conditions qui diminuent cette qualité. Le second est dans la liste des
médicaments dont l’effet principal est prouvé et efficace, et les effets
secondaires jugés acceptables. On touche là à la collusion entre les
laboratoires pharmaceutiques qui font une pression sur le corps médical. La
validation des médicaments par l’Office national doit être assurée par une
indépendance totale entre les "valideurs" et les laboratoires. Il importe qu’il y
siège les universitaires compétents en la matière et qui ont publié des
articles sur le sujet. L’influence de Bruxelles, où les lobbies pharmaceutiques
font un démarchage voisin de la corruption auprès des députés et des commissaires,
ne doit pas interférer sur les décisions nationales. On rejoint là la politique
extérieure.
L’information directe des médecins
devrait être interdite, c’est à l’Office national du médicament de le faire.
Beaucoup de médicaments sortiraient de la liste agrée, le médecin aurait plus
de temps pour se consacrer à ses patients. Il y a de grandes économies à faire.
Une meilleure information des médecins par seulement un Organisme national
compétent procurerait des économies et une meilleure qualité de soins. Ce n’est
pas le moment de diminuer le tarif des médecins généralistes, ni de les
contraindre un peu plus sur la surveillance de leurs actes médicaux. Le médecin
est un libéral et les tentatives successives pour l’étatiser et finir par le
salarier doivent cesser. C’est un point fondamental de notre système de santé.
Par contre la formation des médecins doit être accélérée avec un numerus
clausus plus important et un effort sur la qualité de l’enseignement dans les
facultés de médecine. L’aide à la création de centre médicaux réunissant
plusieurs médecins, voire de plusieurs spécialités, et des professions de santé
doit être accéléré. Il faut lutter contre la fuite de cette profession et le
repli des médecins sur les hôpitaux.
Ces quelques pistes ne sont qu’une
ébauche de politique de santé mais donnent des axes : l’affirmation du
caractère solidaire et étatique des soins de santé, le maintien du libéralisme
des médecins, l’augmentation du personnel hospitalier, la création de centres
médicaux, l’augmentation du numerus clausus des médecins, les audits
hospitaliers indépendants et l’indépendance des "valideurs" des médicaments par
rapport aux laboratoires pharmaceutiques et à Bruxelles, l’interdiction du
démarchage des médecins par les laboratoires.
Il faudra aussi parler des retraites
et des aides aux plus démunis dans l’article suivant.
Une politique de santé n’a pas pour objectif l’équilibre budgétaire.
C’est une dépense publique comme l’enseignement et la défense.
L’objectif c’est la qualité des soins et son égalité pour tous.
Dans ce cadre son coût doit être supportable
Et comme toute activité de l’État
La qualité de gestion doit…
Être auditée par le privé
Indépendant !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du
Languedoc-Roussillon
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