Dans un précédent article la
Libye est apparue comme le point de départ d’une stratégie américaine dont l’aboutissement
final visait la continuation du chaos au Moyen-Orient, pays du Golfe exclus,
pour la mainmise sur ses ressources pétrolières, en connivence comme pour l’Arabie
Saoudite et le Qatar, ou par la force pour la Syrie et l’Iran qui était sous le
coup d’un embargo. Ce dernier pays chiite est indirectement attaqué pour son
lien avec la Syrie. Mais l’utilisation des guerres religieuses intra-musulmanes
sert l’extension d’un chaos que l’on dirige vers l’Europe par les destructions
des habitations, le harcèlement des camps de réfugiés et par une aide
financière. Tout a commencé par l’invasion de l’Irak bien sûr mais la guerre n’a
pas cessé depuis avec l’Afghanistan, le Soudan, etc.
La Libye reste néanmoins le point de concentration
des flux migratoires de toute l’Afrique en direction de l’Europe. Le destin de
celle-ci était alors scellé pour le parachèvement d’un protectorat américain,
protectorat sur l’Europe dont l’identité devait être cassée pour la rendre plus
malléable. La présence militaire renforcée, sous prétexte de l’agression russe
à prévoir sur le flanc Est, le traité de libre-échange, soi-disant dans l’intérêt
de tous en cours de discussion, et les vagues migratoires ne sont que les trois
aspects de la mainmise des USA sur l’Europe. Les vagues migratoires font appel
aux sentiments d’humanité dont la France se glorifie plus que d’autres et aux
besoins d’une Allemagne dont la politique familiale aboutit à une démographie
en recul alors que son économie réclame de la main-d’œuvre.
La Libye est devenue
une plaque tournante des trafics en tous genres et il n’est pas question que
les occidentaux y mettent bon ordre, ce qui serait maintenant bien plus simple
que de vaincre Kadhafi qui était militairement très bien équipé. Curieux non ?
Aussi curieux que cette coalition de 24 pays occidentaux, dont le pays le plus
puissant, qui n’arrive pas à venir à bout de L’État islamique. Les chiffres qui
ressortent d’un rapport accablant
rédigé sur le site Global initiatives against transnational organized
crimes, en sont l’illustration.
Sur la carte ci-jointe on visualise les trafics d’armes
légères en rouge, humains en brun, en tous genres en bleu foncé, en noir
pointillé les acheminements d’armes par air. Les motivations soient politiques,
religieuses ou purement crapuleuses, les convergences d’intérêts entre les
groupes armés de la moitié nord de l’Afrique et du Moyen-Orient sont au cœur du
problème migratoire. Les territoires sous contrôle des djihadistes sont en
grisé. Faisant feu de tous les trafics ; cigarettes, armes, drogues et
surtout migrants, les criminels répartissent et élargissent leurs
zones d’action. Ce rapport tisse également les liens entre le
trafic migratoire et le terrorisme qu’il finance,
anéantissant par-là même les considérations humanitaires de ceux qui
veulent nous imposer toujours plus de clandestins, alors que survivent,
seulement en France 150 000 SDF et plus de 8 millions de précaires.
Depuis
plus de mille ans, le Sahara est une région de contrebande et de trafic
de nombreux types de produits. La Libye, dont les liens avec l’Europe datent de
l’Empire romain, a toujours été une destination et une voie de transit
importante pour nombre de ces activités illicites. Depuis la chute de Kadhafi,
la contrebande et le trafic impliquant à la fois des groupes armés et des
réseaux du crime organisé a augmenté de façon spectaculaire en Libye. La chute
du régime avait permis à la traditionnelle répartition tribale du commerce Trans
Sahara, dans les drogues, les produits de contrefaçon, les migrants et les
armes, de croître pour atteindre environ 43-80M$ au maximum, revenus répartis
entre un grand nombre de trafiquants, clans et groupes.
Ce
rapport nous informe que : « l’augmentation
des flux d’argent et de marchandises illégales a des répercussions à travers
l’Afrique du Nord et le Sahel. Cet argent et les armes en provenance de Libye
ont contribué à faciliter la rébellion au Mali en 2010, et continuent à
alimenter les conflits aujourd’hui. Plus important encore, le nombre élevé de
migrants le long de la côte en Afrique du Nord a permis le développement d’un
commerce de « passage » beaucoup plus lucratif, désormais évalué entre
255 et 323 millions de dollar par an, pour la seule Libye. La valeur
de ce commerce surpasse de loin toutes les entreprises de traite et de trafic
dans la région, et a renforcé des groupes terroristes, y compris l’État
islamique. »
Le but de cette synthèse est de
fournir une mise à jour des informations pertinentes sur les facteurs de
conflits potentiels dans la grande région du Sahara, à destination des
décideurs politiques, des intervenants et des chercheurs. Ce document a été
établi en collaboration entre le Centre norvégien pour l’analyse globale
(Rhipto) et l’Initiative mondiale contre la criminalité transnationale
organisée.
« Les valeurs de ces principaux trafics dans
la région sont estimées à :
• Trafic de drogue colombienne via
Guinée-Bissau : valeur « de rue » 1,25 milliard de dollar en
Europe et 150 millions en Afrique de l’Ouest, générant des revenus locaux de 10
à plus de 20 millions de dollars pour les opérateurs dans le Sahel, l’Algérie
et la Libye.
• La chute du régime libyen a permis à des
groupes criminels de profiter largement de tous les trafics : contrefaçon
et contrebande de marchandises, y compris les cigarettes, les produits
pharmaceutiques, agricoles, de construction et de transport. Le montant de ce
commerce est difficile à quantifier.
• La valeur totale du commerce libyen des
armes dans l’ère post-Kadhafi est probablement de l’ordre de 15 à 30 millions
de dollars par an. Ces armes sont plus destinées à des groupes militants en
Libye et au Sahel (dont le Mali, le Niger, et le Tchad) qu’au commerce. Ceci
étant, des livraisons d’armes ont été détectées vers des pays du Golfe et
ailleurs en Afrique, et les conséquences négatives du commerce des armes sont
évidemment beaucoup plus élevées que sa seule valeur monétaire.
• Le traditionnel trafic de migrants à travers
le Sahara était auparavant évalué de 8 à 20million$, mais avec l’augmentation récente des
migrants en transit, la valeur actuelle du commerce le long de la côte (en
contournant les traditionnels voies tribales) – est estimée entre 255 – 323
millions par an. »
En
2011, l’armée libyenne était estimée à 76000 membres actifs et 40000 agents de
réserve, avec un arsenal de 250 à 700000 armes à feu, dont trois quarts de fusils
d’assaut. A la chute de Kadhafi et la désintégration de l’État libyen, ces
armes sont tombées aux mains de groupes armés et de trafiquants. Les
conflits en Libye sont toujours alimentés par les soldats et les armes qui
formaient jusqu’alors la colonne vertébrale de la puissance de l’État. Le prix
d’un AK-47 en Libye varie généralement de 150 à 1000 dollars, parfois plus,
sachant que la moyenne sur le reste du continent avoisine les 500 dollars. On
estime qu’entre 10 et 20000 armes à feu libyennes ont rejoint le Mali, le
Niger, le Tchad et le Soudan. Certaines estimations donnent des chiffres
bien plus importants, parfois quadruplés, suite à la chute de l’armée libyenne
et des institutions de l’État.
Il y a désormais un très grand nombre de trafiquants de migrants et
réfugiés venant de Syrie via le Liban et l’Égypte. Les Syriens comptent en
effet pour la plus grande part des migrants exploités via la Libye, même si un
nombre rapidement croissant de migrants sub-sahariens arrive aussi par ces
voies. Le trafic migratoire a augmenté de façon spectaculaire à partir de la Libye et de la Tunisie. Grâce à des moyens variés, dont des accord avec
l’Italie, le régime de Kadhafi avait drastiquement limité les flux migratoires
et les trafics d’individus entre les deux pays : seuls 4500 réfugiés
avaient été décomptés en 2010. En 2014, ce chiffre a explosé pour atteindre au
moins 170 000 et représentait environ 60% des
arrivées clandestines en Europe dont principalement venant de Syrie, d’Érythrée
et de l’Afrique sub-saharienne. Depuis la chute de Kadhafi, les milices
harcèlent les migrants et leur famille pour leur extorquer des fonds ou vont
jusqu’à vendre des migrants aux trafiquants lesquels leur extorquent des droits
de traversée exorbitants et les abandonnent en mer en leur disant qu’ils vont
être récupérés.
De
toutes ces activités criminelles, la plus urgente à traiter est celle du trafic
de migrants à travers la Méditerranée car l’augmentation des flux finance en
retour les groupes radicaux impliqués dans les trafics au Sinaï et en Egypte,
liés à la Lybie, la Syrie, l’Irak, y compris Daesh. La fermeture des frontières
n’est qu’un pis-aller de gestion à très court terme. Les interventions au large
des côtes libyennes ont peu de chance de faire réduire les flux de migrants
compte tenu de l’étendue de la zone de repêchage. Au contraire, elles peuvent
augmenter les départs, étant donné le peu d’attention que les trafiquants
portent au sort des migrants qu’ils mettent sur les bateaux une fois les plages
libyennes quittées.
C’est
au plus près des pays d’origine qu’il faut agir par le renseignement sur les
routes, les points de passage et les organisations structurées du trafic migratoire.
Il faut aussi faire cesser les conflits armés en particulier ceux qui sont
alimentés sciemment contre la Syrie. Il faut agir sur le Liban et la Jordanie
où il existe un risque majeur de déstabilisation et sur la Libye où une action de
pacification doit être décidée par l’ONU. Elle est l’objectif de l’EI et
concentre tous les trafics permettant de se financer et de s’armer. Il faut
surtout demander aux États-Unis d’arrêter sa complicité dans l’afflux
migratoire en Europe.
Après
la guerre de Bush en Irak, tout est parti de celle en Libye.
Ce
pays concentre désormais tout ce qui nous menace
Et
alimente un État dont le but est le califat
Et l’extension
mondiale de la charia.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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