lundi 7 septembre 2015

La petite et moyenne agriculture européenne manifeste à Bruxelles !



La circulation à Bruxelles a été en partie paralysée et trois policiers blessés par une manifestation monstre des agriculteurs belges, espagnols, italiens, français, allemands, danois, autrichiens et suisses. Le cortège parti de la gare du nord ce lundi vers 11h15 pour rejoindre les agriculteurs stationnés au rond-point Schuman, devant les institutions européennes à Bruxelles, était composé de 4.800 personnes à pied et de 385 tracteurs, a indiqué la porte-parole de la police de Bruxelles. Réunis à l’initiative de l’European Milk Board (EMB), ils voulaient exercer une pression maximale sur les 28 ministres de l’Agriculture de l’Union européenne qui se réunissaient à Bruxelles pour un sommet extraordinaire consacré à la crise qui touche le secteur agricole, et tout particulièrement les producteurs laitiers et porcins. 

Contrairement à la manifestation à Paris, cadenassée par la FNSEA, mais dont les résultats font dire à nos petits agriculteurs qu’ils ont encore une fois été floués par l’État, la manifestation à Bruxelles a pris l’aspect d’une émeute avec des jets d’œuf, de bouteilles et de divers débris vers les policiers, ainsi que le feu à des haies et à des ballots de paille. Des pneus ont été enflammés et un nuage de fumée noire surplombait la place Schuman. Des réverbères, pavés, arbres et poteaux de signalisation ont été arrachés par les manifestants et la police a répondu par des jets d’eau des autopompes et des gaz lacrymogènes.

Aujourd’hui François Hollande n’en dit rien, alors que son ministre de l’Agriculture était à Bruxelles. Le problème paysan n’est plus d’actualité et il est plus important de chercher des voix chez 8 millions de foyers qui vont bénéficier d’un cadeau fiscal de 2 milliards soit 250 euros par foyer alors que nous allons alourdir les dépenses militaires en allant projeter nos avions en Syrie au côté des américains dont les frappes ne vont pas que sur Daesh. Nous continuons à vilipender Bachar al Assad, le dictateur syrien, et à donner toute notre amitié et notre aide à l’Arabie Saoudite et au Qatar dont on sait qu’il ne s’agit en aucune façon chez eux de dictature. Nos agriculteurs vont donc continuer à alourdir leurs dettes en investissant de l’argent qu’ils n’ont pas avec des marges bénéficiaires qui ne leur donnent aucun espoir de les rembourser. La petite agriculture va mourir mais les financiers des usines à 1.000 vaches s’en frottent déjà les mains et les grosse exploitations continueront à bénéficier plus que les autres de Bruxelles. 

Pourquoi les agriculteurs manifestent-ils ? Le secteur est en crise. Il y a trop de lait sur le marché, étant donné qu’on a supprimé les quotas le 31 mars dernier, ce qui a incité une partie des producteurs à augmenter leur production. Cela vient s’ajouter à des éléments conjoncturels : embargo russe sur le lait, les poires, le porc, etc., ce qui fait qu’on a davantage de produits agricoles sur les marchés européens, tandis que le marché chinois est pour l’instant un peu moins ouvert. Les prix chutent, mais pas en magasin. Pour le producteur de lait le prix est à peu près égal à celui qui était payé en 2009, année où il y a eu une grosse crise dans le secteur laitier. L’Europe fait face à deux types de production : d’un côté, des pays comme l’Allemagne qui produisent énormément, tandis que dans des pays comme la Belgique, particulièrement en Wallonie, et comme la France, ce sont de petites exploitations, donc de petites productions. Ceci s’applique aussi dans les secteurs de la production du porc, du bœuf. La Belgique a une agriculture plus proche du terroir, contrairement aux énormes exploitations que l’on trouve au Danemark ou en Allemagne. Et le marché donne plus d’avantages aux grands.

La Commission européenne a annoncé ce lundi qu’elle débloquait 500 millions d’euros d’aide d’urgence pour les agriculteurs, notamment les producteurs laitiers, lors d’un conseil ministériel de l’UE convoqué à Bruxelles pour répondre à la crise que traverse le monde agricole. « La Commission va proposer que la partie la plus significative de ce paquet soit fournie à tous les États membres sous forme d’enveloppes pour soutenir le secteur laitier », a précisé l’exécutif bruxellois dans un communiqué. Elle s’oppose par contre au relèvement du prix d’intervention, une mesure défendue notamment par la Belgique et la France. 

« A un moment où s’établit clairement un déséquilibre du marché, augmenter le prix payé pour l’intervention publique ne fera rien pour restaurer l’équilibre du marché mais créerait à la place un débouché artificiel pour les produits laitiers de l’UE. Cela pèserait sur la compétitivité de l’Union pour les 10 % (ou plus) de la production laitière qui doit être exportée ». 

Voilà qui laisse peu d’espoir aux producteurs de lait et de porc dans les négociations avec les grands distributeurs puisque le prix d’intervention est bloqué. Les 500 millions débloqués ne vont pas peser lourd une fois répartis dans les pays de l’Union et parmi les centaines de milliers d’agriculteurs concernés. Heureusement en France l’État considère l’affaire comme réglée et passe à autre chose, aux migrants syriens, à la guerre en Syrie et au code du Travail. Les suicides et les faillites des agriculteurs attendront que leur colère prenne cette fois une allure de révolution agricole et d’affrontement avec les forces de l’ordre… alors peut-être les petits producteurs pourront espérer ne pas mourir avec nos produits du terroir. 

Une manifestation agricole calme est l’expression

De la compromission des plus gros avec l’État. 

La colère des petits ne peut qu’être violente

Sinon l’État ne les entend pas ! 

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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