Les Ministres des
Affaires Étrangères des 28 pays viennent de constater leurs désaccords hier à
Bruxelles, il ne pouvait pas en être autrement puisque les situations des uns
et des autres sont trop différentes. Entre un pays comme la Grèce, qui n’est qu’un
pays de transit mais qui doit gérer un flux énorme comme la Hongrie, et une Allemagne
qui ouvre largement ses portes à une population qualifiée mais en nombre fixé
par elle-même, il ne peut y avoir la même perception. Que pense l’Italie à qui
on impose un « hot spot » alors que l’attention est ailleurs et
volontairement centrée sur l’Allemagne ? Les flux des différents points d’entrée
en Europe ne sont pas identiques en nombre, en nature, en origine. L’UE se
déchire, se délite mais refuse de désigner les coupables. Pourtant ce sont les
pays les plus puissants de l’UE, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne. Les
deux premiers parce qu’ils participent officiellement au chaos qui a été mis en
Libye, en Irak, en Syrie, etc. etc. Mais les trois mènent des actions
officieuses qui ont aidé Daesh à s’implanter et à se substituer aux adversaires
syriens de Bachar al-Assad. L’Allemagne participe activement au pourrissement
de l’Ukraine, à un flot de réfugiés (oui eux véritablement réfugiés) qui fuient
où ils peuvent car le passage vers l’Europe leur est très difficile. A part
Poutine, qui s’inquiète de ceux-là qui abandonnent leur maison détruite, ou qui
restent encore en se terrant dans les caves ?
Des pays européens
commencent à réaliser combien l’UE n’est plus qu’un instrument aux mains de ces
trois pays réduits à deux en réalité, le Royaume-Uni pour ce qui concerne la
grande finance, la City et les retombées économiques, et l’Allemagne pour tout
le reste en fait. La France ? Elle est conviée à faire chorus avec l’Allemagne…
pour donner plus de poids à celle-ci. Nous sommes donc doublement coupables, d’abord
coupables d’actes d’ingérence et de guerres qui tuent des innocents sans rien
résoudre mais qui engendrent le chaos et des ripostes jusque dans notre pays, puis
coupables de suivre aveuglément la stratégie hégémonique étasunienne. Nous
abandonnons volontairement notre reste de souveraineté et nous détruisons de
fait notre nation pour un ensemble européen sans identité. Celui-ci ignore délibérément
la démocratie au profit d’une technocratie instrumentalisée par les grandes
puissances de l’argent qui confie la direction à une Allemagne qui entend bien
étendre son pouvoir sur l’Europe.
Les États-Unis étaient jusqu’à
présent les seuls maîtres du jeu géostratégique, tout au moins jusqu’à la
guerre civile en Syrie. Ils pouvaient jouer avec la complicité des pays du
golfe qui finançaient le « printemps arabe » en Libye sans que
personne ne vienne les mettre en accusation. L’ONU votaient dans leur sens et
ils se permettaient même d’aller au-delà des autorisations de l’ONU. De fil en
aiguille ils finissaient même par s’en passer au nom… de la démocratie et des
Droits de l’Homme, ces deux merveilleux concepts que l’on adapte à sa guise. On
peut ainsi faire passer des militaires américains en Ukraine en passant par l’Autriche
ou s’implanter en Irak et dans les pays du Golfe pour bombarder et ravitailler
Daesh en même temps.
Seulement voilà la Russie, après la Libye, a
vu le danger se rapprocher d’elle et de ses meilleurs amis, la Syrie d’abord et
l’Ukraine ensuite. La Russie sort doucement son économie du marasme malgré les
sanctions et la baisse du pétrole. Le pays est peu endetté et le rejet que lui
voue l’Europe l’a tournée vers la Chine pour de grands projets dans le futur
sur l’Asie. Une politique conjointe se met en place pour se délier de l’emprise
du dollar avec des échanges effectués dans les monnaies nationales. Les BRICS
se consolident entre eux sur un axe Chine-Russie et l’Iran est attirée. La
Russie modernise rapidement son arsenal militaire, comme la Chine, et elle
entend désormais se faire entendre avec un chef très majoritairement soutenu
par la population russe. Un point d’arrêt vient d’être signifié par Poutine
pour la guerre en Syrie. La Russie s’engage officiellement à aider Bachar
al-Assad et déclare qu’elle ne l’abandonnera pas. Cette aide existait déjà et l’opération
concoctée par Hollande d’attaque de la Syrie par la mer a été stoppée par l’intervention
russe. Ceux-ci avaient mis en place un brouillage de toutes les communications
alliées et Obama a préféré y renoncer.
Mais cette fois l’aide n’est
plus officieuse mais officielle et l’augmentation des moyens va de pair. La
Russie déclare la guerre à toute forme de djihadisme, Al Qaïda, Daesh, Front de
libération, etc. et elle sait de quoi elle parle avec ses ex-républiques. La
donne est complètement changée. Les USA vont devoir jouer franc jeu sous peine
de se voir dénoncés aux yeux du monde. Bachar Al-Assad va être en mesure de
regagner le terrain perdu. La Turquie va devoir aussi clarifier sa position. La
question kurde et l’avenir politique de la Syrie ne pourra ensuite pas échapper
à la négociation, à la diplomatie. L’Arabie Saoudite devra aussi clarifier son
jeu et justifier son envahissement du Yémen dans son affrontement avec l’Iran
chiite. L’Egypte va suivre la Russie. L’affrontement Russie-Etats-Unis est
clairement mis en lumière. Tout cela n’est pas sans risque car en jouant à se
faire peur on peut tout aussi bien s’affronter directement dans un conflit qui
ne peut que dégénérer. Mais c’est aussi la chance de l’Europe, à son corps
défendant peut-être, de voir un arrêt à sa vassalité aveugle aux USA et de
réaliser que le salut n’est pas où l’on croit ou tout au moins où on le fait
croire aux peuples européens.
Il n’y a pas que le
flux migratoire (sous l’horrible appellation d’appel d’air) qui peut trouver sa
solution mais cela peut engendrer un revirement des pays du golfe, qui vont s’appauvrir
avec la baisse du pétrole et qui se trouvent désormais en compétition avec les
USA pour l’hégémonie pétrolière. L’arrivée officielle de la Russie en Syrie et
en Méditerranée est un évènement majeur dont on n’évalue pas encore la portée
mais elle sera grande. L’Europe va mesurer combien ce pays est important pour elle
et que ses intérêts ne coïncident pas avec ceux de nos alliés américains qui ne
nous prennent que comme un glacis d’intérêt militaire et économique entre eux
et l’Asie de la Russie et de la Chine.
Un « appel d’air » nous submerge venant de l’est et nous
divise,
Mais un pays s’oppose désormais à la stratégie mensongère
D’une puissance que nous suivons aveuglément.
La Russie, ennemie ou pas, est peut-être
Notre dernier espoir de salut !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du
Languedoc-Roussillon
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