On ne peut décemment pas s’arrêter sur les pleurs de la Sarkozie comme les médias nous en rebattent les oreilles, ni même sur le déni de démocratie du « Mariage pour tous », quand un drame est en train de se jouer dans une population si proche de nous. La Russie ferme la porte de l’aide pour l’instant et Chypre doit trouver près de 6 milliards d’euros pour lundi prochain, sinon c’est la faillite. La BCE ne veut même plus aider les banques chypriotes, ce qui est scandaleux puisque c’est dans ses statuts cette fois. L’UE ferme ses portes au plus petit de ses Etats, c’est si facile de tuer les faibles.
Le prétexte fallacieux de paradis fiscal ne tient pas lorsque l’on ferme les yeux sur le Luxembourg et le dumping fiscal qu’active l’Irlande depuis 2008. On en est à un plan B qui créerait un « fonds d’investissement de solidarité » dont le financement est opaque mais dont le montant doit être équivalent à la ponction sur les comptes bancaires refusée par le Parlement chypriote. L’impasse est quasi-totale, et une restructuration des banques semble inévitable. Ce faisant nombre de particuliers vont se voir spoliés d’une partie de leur argent car la garantie de l’eurozone est limitée à 100.000 euros.
Comme en Espagne, en Italie, le peuple chypriote peste contre l’euro et veut sortir de l’eurozone. C’est sans doute ce qui va se produire, l’UE préférant abandonner un cadavre plutôt qu’ouvrir son porte-monnaie un peu plus. La peur de la contagion des européens du sud, affamés de liquidités, fait trembler les pourvoyeurs dont l’Allemagne. La solidarité ne joue que tant qu’elle ne menace personne, elle a ses limites, comme la liberté, et ces limites sont dites atteintes… Chypre out !
Ce qui est terrible c’est que le pays va se retrouver dans un dénuement plus grand qu’avant son entrée dans l’euro. Sa sortie sera très douloureuse comme pour ceux qui attendent le dernier moment pour aller chez le dentiste. Mais on peut déplorer que ce soit le lampiste qui trinque après des erreurs monumentales de construction de l’eurozone en particulier. Avec l’Espagne et l’Italie, on prend des gants. Avec Chypre on avance qu’il n’est pas envisageable que sa dette représente 100% du PIB en 2020 pour lui mettre le couteau sur la gorge !
Par contre le déficit actuel de 120% du PIB de l’Italie est acceptable… grâce à Monti, émule de Goldman Sachs ! Alors il faut se demander ce qui se cache derrière cette frénésie guerrière. A y réfléchir, on voit que tout se joue entre quatre acteurs, l’Allemagne, la Russie, l’OTAN (autant dire les Etats-Unis), et les technocrates des BCE et FMI. Chypre n’est que la boule d’un billard à quatre bandes. Nos technocrates n’ont que faire de la démocratie puisqu’ils n’en dépendent pas. La Russie est très impliquée financièrement. L’Allemagne tient son cap d’austérité pour les élections de septembre et n’a aucune indulgence pour tout ce qui ressemble à la Grèce. Le Royaume-Uni a une importante base militaire sur le territoire chypriote et ne veut pas y voir la mainmise de la Russie.
Que représente, ce petit territoire, dans ce jeu géopolitique ? Rien ! Sinon que ce qui se passe à Chypre sur le plan économique a un retentissement mondial, que l’agence de notation Standard & Poors vient de classer ce pays en CCC, donc faillite évaluée comme quasi-certaine, et que sa sortie de l’eurozone se trouve programmée.
L’heure des grands chambardements dans une Europe encore un peu plus fragilisée arrive à grands pas. Les pourvoyeurs ne veulent plus payer pour les autres, la solidarité ne résiste pas aux lendemains de la crise de 2008-2009. En général il faut dix ans pour que les conséquences des mauvais choix se fassent sentir. L’euro était dans nos poches en 2002, il nous a souri jusqu’en 2003-2004… si l’on ajoute dix ans, cela fait ? Je vous laisse compter !
Petit à petit les pays en difficultés vont s’enfoncer
Les banques et les Etats auront les poches vides.
Vers quelles poches, croyez-vous, ira leur regard ?
A moins que… le peuple, spolié et désenchanté,
Casse leur jouet !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon