L’évènement est historique, la gauche s’empare du Sénat. Si cet évènement est dans la logique des élections municipales et cantonales, il est néanmoins une défaite pour la droite. Parmi les raisons de cette défaite, la réforme des collectivités locales et particulièrement la suppression de la taxe professionnelle ont joué un rôle important sur le mécontentement des grands électeurs. La déresponsabilisation partielle des maires a été accentuée et leur engagement diminué dans une politique d’attirance des entreprises sur le territoire de leur commune.
Les modifications apportées à la constitution ont agrandi le pouvoir du Sénat. Il devient l’égal de l’Assemblée Nationale pour l’ordre du jour du Parlement et son poids dans un Congrès des deux assemblées renvoie déjà la règle d’or budgétaire aux calendes grecques. Le changement de majorité va incontestablement ralentir la sortie des décisions ayant un impact budgétaire, décisions dont l’urgence se fait chaque jour plus sentir.
L’impact de cette défaite est cependant un révélateur de la faiblesse du camp à droite où des grands électeurs ont voté suivant leur ressenti local et non selon une discipline nationale. Le chef de l'Etat n'a pas réussi à faire rentrer dans le rang des candidats dissidents dont les plus emblématiques, comme son ex-conseiller Pierre Charon à Paris, ont réussi à se faire élire au détriment des candidats officiels. Cette défaite fragilise la légitimité et l'autorité de Nicolas Sarkozy dans son propre camp.
De plus cette défaite aux sénatoriales intervient en plein déballage sur des affaires dans lesquelles sont mis en cause des proches du président. Les règlements de compte ne vont pas manquer de se faire jour dans les proches semaines. Le climat risque d’être délétère et certains ne manqueront pas de se poser la question sur le bon choix du candidat aux présidentielles.
Rien n’est joué évidemment, d’autant plus que le président est redoutable dans l’adversité et que des évènements économiques gravissimes peuvent se produire à tout moment d’ici avril. Dans ce cas probable, la donne risque d’être bouleversée et favoriser la droite conservatrice par peur du pire dans l’esprit des électeurs.
La cohésion de l’UMP est donc actuellement ce qui va déterminer les chances de victoire de Nicolas Sarkozy. Mais une défaite au premier tour n’est plus exclue. Les candidatures de Christine Boutin et surtout de Borloo seraient presque suicidaires si elles étaient maintenues.
Néanmoins nombre d’électeurs qui l’avaient soutenu en 2002 se tournent désormais vers les souverainistes et Marine Le Pen. La capacité de cette dernière à capter dans le camp souverainiste et gaulliste tout en maintenant son ancrage dans la classe populaire sera décisive sur ses chances au deuxième tour. La perte de son aile droite ne peut que rassurer les hésitants.
Il est probable que le grand sujet sera économique avec ses conséquences sociales, dont principalement le chômage, qui reste à un niveau historique depuis le début de l’année 2000. La notion de gauche et de droite peut éclater au profit de la vision différente du traitement de la crise économique que nous vivons. L’essentiel des candidats du PS ne présente pas sur ce point fondamental des vues différentes de celles de l’UMP. Par contre d’Arnaud Montebourg, en passant par Chevènement, Dupont-Aignan, les souverainistes, jusqu’au FN, les visions sur la dé-mondialisation et sur l’euro se démarquent fondamentalement.
Ces derniers, dont le MPF fait partie, n’ont pas encore convaincu suffisamment d’électeurs sur la nécessité de changer ce qui nous conduit à notre déclin depuis trente ans. Toutefois, plus la menace va peser sur la France, plus cette évidence va frapper les esprits et plus une autre solution va apparaître comme une chance à saisir.
On risque donc enfin de se trouver dans un affrontement qui remette en cause nombre des options européennes des gouvernants sur lesquelles le peuple n’a pas été consulté ou a même vu son vote négligé et bafoué. Quel qu’en soit le vainqueur en avril 2012, le débat serait enfin posé avec un poids représentant au moins près de la moitié du corps électoral. Ce serait le premier signe d’un changement dans l’opinion française et un premier pas vers le redressement de la France.
De la gauche à la droite une nouvelle vision de l’avenir de la France unirait des français de sensibilité différente et une union de salut publique pourrait se faire jour comme ont su le faire les allemands. La gauche et la droite conservatrice des traités de Maastricht à Lisbonne ne doivent plus nous imposer des dogmes qui ont fait la preuve de leur inefficacité.
La France est en danger
L’heure est au rassemblement
Et à un vrai changement.
Claude Trouvé