Alors qu’Édouard Philippe affirme que le droit de grève ne doit pas nuire aux autres
citoyens, dont ceux qui ne peuvent pas accéder à leur poste de travail, il confond
deux choses, la grève contre l’employeur et la grève contre l’État. Dans les
grèves contre un employeur, les grévistes n’ont pas le droit d’empêcher les
autres d’accéder à leur poste de travail. Dans celui de la grève contre l’État,
il s’agit d’un mouvement politique et le but est d’apporter une gêne importante
aux citoyens de façon à se faire entendre de l’Etat. Les grévistes prennent alors
le risque de ne pas être compris de la majorité des citoyens. En ce qui
concerne les services publics, l’État est en même temps représentant des
propositions politiques et l’employeur. Donc sermonner les grévistes de la SNCF
en les conduisant vers un mode de grève non perturbant est non seulement
contraire à l’esprit de la grève mais une tentative de limitation de ce droit.
C’est
ce qui s’est d’ailleurs passé en Grèce où une grève a eu lieu le 12 janvier
contre le gouvernement d’Alexis Tsipras sur une réforme de la loi visant la
restriction du droit de grève. Pour satisfaire aux exigences de l'UE et du FMI,
ses créanciers, ce gouvernement porte un projet de loi stipulant que les grèves
devront dorénavant être votées par 50% des membres enregistrés des syndicats
(contre 20% actuellement). Compte-tenu de la faible représentativité des
travailleurs syndiqués dans les entreprises publiques et privées françaises, ce
serait dans les faits bannir le droit de grève, même si 50% des salariés
étaient pour.
Les inégalités qui
frappent la population sont en majorité de nature salariale ou sociale. L’aggravation
des inégalités est de nature à créer des tensions catégorielles et à augmenter
l’écart entre les plus riches et les plus pauvres. C’est aussi un facteur de pauvreté.
Même si elle est relative, elle crée un climat détestable et une tendance vers
un Etat autoritaire où règne la ploutocratie. C’est pour cela que cet article s’intéresse
à un indicateur des inégalités, l’indice Gini du nom de son inventeur Corrado
Gini. C’est un indicateur synthétique d'inégalités de salaires (de revenus, de
niveaux de vie...) par une mesure statistique de la dispersion d'une
distribution dans une population donnée. Il varie entre 0 et 100 et est égal à
0 dans une situation d'égalité. Sans être parfait il donne une assez bonne représentation
des inégalités et permet la comparaison entre pays.
L’UE
et l’euro, vendus comme facteur de prospérité, ont été interprétés par les
citoyens européens comme une assurance de mieux vivre les concernant. Il devient
de plus en plus évident qu’il y a erreur sur les destinataires de la prospérité
et que les peuples sont floués, comme les deux articles précédents l’ont montré
sur le PIB/habitant, auquel le niveau de vie est fortement lié, et le taux de
chômage. Qu’apportent alors l’UE et l’euro dans la maîtrise des inégalités ?
La carte ci-dessus donnant des informations sur 2013 montre clairement que la
valeur de l’indice n’est pas strictement liée à l’appartenance à l’UE et que
des pays très éloignés d’elle peuvent avoir des indices très comparables comme
l’Australie et le Canada, ce qui tient compte de leur niveau économique. Mais
des pays plus proches font aussi bien comme l’Algérie, le Tchad, l’Égypte et,
qui l’eut cru, le Pakistan, l’Érythrée et en mieux le Kazakhstan. A l’inverse on
trouve le Brésil et l’Afrique du Sud, pays aux richesses naturelles, dans les
pays très inégalitaires ainsi que leurs voisins. L’indice Gini est donc une mesure
de la politique menée par les pays, mais il montre aussi que les pays riches
devraient être dans ceux ayant le meilleur indice. En ce qui concerne l’UE on
voit que cela est vrai à l’Est et au Nord mais la France ne brille pas en la
matière. L’UE n’est donc pas un gage en soi de l’affaiblissement des inégalités
même si les États-Unis n’ont pas de leçons à nous donner.
On
peut s’intéresser de plus près à l’UE et à la zone euro où règnent des
contraintes différentes sur les politiques gouvernementales dans les pays dans
la zone euro et ceux hors de cette zone. Le premier graphique compare les variations de
l’indice de 2010 à 2016 dans les trois entités, UE, zone euro et hors zone
euro. Il est clair qu’en 6 ans d’une part la situation se dégrade sur l’ensemble
de l’UE, et que d’autre part ceci se fait près de 3 fois plus vite dans la zone
euro. Sur le deuxième graphique, on constate que les niveaux se sont considérablement
rapprochés entre les pays de la zone euro et les hors zone. On peut en conclure
que la politique de l’UE tend vers une aggravation des inégalités et ceci d’autant
plus qu’elle dispose de moyens renforcés d’action dans la zone euro.
On
peut préciser cette réflexion en s’intéressant aux pays de l’UE, auxquels les
données d’Eurostat permettent de rajouter l’Islande, la Suisse, la Norvège et
la Turquie, soit quatre pays hors UE. Sur le graphique de gauche, c’est l’Islande
qui possède le meilleur indice et la Grèce le plus mauvais. Sur les 35 pays ou
zones représentés en 2016, seuls cinq pays de la zone euro sont représentés
dans les meilleurs indices, l’Autriche, la Belgique, les Pays-Bas, Malte et la
Slovaquie. Dans les dix indices les plus mauvais, on trouve dans l’ordre
croissant sept pays de la zone euro, l’Espagne, la Lituanie, l’Irlande, le Royaume-Uni,
l’Allemagne, le Portugal et la Grèce. Ceci montre que l’Allemagne, le Royaume-Uni,
deux pays riches, voisinent avec le Portugal et la Grèce, pays en difficulté.
La France est en milieu de peloton à côté de Chypre mais fait moins bien que sa
sœur italienne. En tête des meilleurs indices on a dans l’ordre la Norvège, la
Slovaquie et l’Islande.
Le
graphique suivant donne l’image de l’évolution des pays dans cet indice entre
2010 et 2016. Il est remarquable de trouver la Norvège et la Slovaquie en tête
alors qu’elles faisaient partie des meilleurs indices sur le graphique
précédent. Il est aussi remarquable de trouver la Turquie dans ce groupe de
tête. Dans les baisses de l’indice, on trouve seulement trois pays de la zone
euro, la Slovaquie, la Lituanie et l’Autriche. Dans les dix plus grandes
augmentations, il y a 6 pays de la zone euro avec notamment la Grèce, le Portugal
et l’Espagne. On note combien les politiques d’austérité imposées à ces pays
ont pour effet d’aggraver les inégalités. Sur ce point il faut reconnaître que
la France s’en tire mieux que l’Allemagne et que la zone euro. Elle était
encore le grand pays de la zone euro qui était le plus rétif à l’application de
la politique d’austérité mais avec une aggravation de la dette plus importante
que les autres pays. C’est une petite victoire qui n’est pas sans montrer ses
limites et la valeur de l'indice reste forte.
La
baisse des inégalités n’est pas le fait de l’appartenance à l’UE mais celui d’une
politique résolue à le faire. L’appartenance à l’UE n’oriente pas les pays dans
ce sens et celle à l’euro l’aggrave encore. Les politiques de diminution des
inégalités sont d’autant plus faciles techniquement à prendre que le pays est
en bonne santé économique mais par ailleurs la rudesse des pays pauvres mais en
croissance incite à inclure ce but comme en Pologne et en Lituanie. La
prospérité pour la politique de l’UE ne signifie pas la diminution des inégalités,
mais la croissance dont profitent essentiellement les grandes entreprises.
Il n’y a rien à attendre de l’UE sur la diminution
des inégalités.
L’UE n’est essentiellement qu’une
machinerie économique
L’UE est manichéenne et au service d’une
ploutocratie
Où le gâteau se déguste entre le plus riches
Servis par les peuples enchaînés
A des dogmes mirifiques !
Claude Trouvé
05/04/18
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