Profitant du besoin des citoyens de penser à autre chose dans
une Europe en vacances, les dirigeants européens et les banques centrales ont
prononcé des propos lénifiants et anesthésiants. Les manipulations financières
se passent toujours dans la clandestinité surtout quand les situations deviennent
dangereuses.
« Tout a été
fait pour ne pas paniquer le citoyen européen de base, quitte à oublier de
l’informer purement et simplement ». Philippe
Mudry, L’Agefi n° 329, juin 2012.
« Quand ça devient grave, vous devez
mentir », Jean-Claude Juncker, chef de l’Euro groupe, mai 2011.
Cela devient
grave… donc ils mentent ! L’Espagne dit ne pas avoir besoin d’un nouveau
renflouement, l’Italie dit que la situation est sous contrôle, la BCE est prête
à tout pour le sauvetage de l’euro et dit que ses caisses sont largement à la
hauteur de la situation, notre président montre la solidité de notre pays en se
permettant même d’effacer trois milliards de dettes de son ami socialiste de la
Côte d’Ivoire, de repousser la CSG au-delà de 2013 et de supprimer la TVA sociale.
La crise est donc « sous contrôle » et à tendance positive comme
diraient les agences de notation !
Sauf que… la
Grèce veut plus de sous et que l’on hésite même à lui donner ce qu’il lui était
promis. Sauf que… les agences de notation délivrent des dégradations de note
sur nos entreprises, et des tendances négatives à la pelle même sur l’Etat allemand. Sauf
que… le chômage progresse dans toute la zone euro montrant une faiblesse
économique de cette zone. Sauf que… l’Allemagne ne veut plus payer au-delà de
ce qui a été promis. Sauf que… les citoyens allemands et italiens ne croient
plus en l’euro. Sauf que… les investisseurs retirent leur argent du continent
européen et les particuliers de leur banque. Sauf que… Sauf que…
Et alors me
direz-vous ? Notre gouvernement est serein, regardez le sourire enfariné
de notre président aux jeux. Il contraste évidemment avec les cris de désespoir
des grecs, l’angoisse des espagnols et des italiens. Car l’heure n’est plus à
savoir si la Grèce sortira ou non de l’euro, les préoccupations sont sur l’Espagne
et l’Italie. L’Espagne, qui entraînera le Portugal, et l’Italie sont au bord du
gouffre. Selon Jacques Sapir : « Les besoins en financement de ces deux pays peuvent
être estimés à 280 milliards d’Euros pour l’Espagne et 600 à 700 milliards pour
l’Italie, pour aller jusqu’à la fin de l’année 2012. » Ce sont des
sommes qui dépassent de loin les capacités de la Zone Euro, et que l’Allemagne,
menacée de perdre son triple A, se refusera, en tout état de cause, à fournir.
La détérioration explosive de la situation de ces deux pays se perçoit
nettement depuis novembre 2011 sur l’intervention de la BCE. La panique est
dans le système bancaire espagnol que ce pays ne peut plus financer alors qu’il
doit emprunter pour lui-même à des taux sans cesse croissants.
On observe d’ailleurs que la détérioration des taux d’intérêt suit une
évolution très comparable entre l’Espagne et l’Italie. La barre des 6% est de
plus en plus franchie, seuil au-delà duquel un pays ne peut plus
assumer les intérêts de la dette, seuil désormais repoussé à 7% pour les
besoins de la cause.
D’après Jacques Sapir : « De
fait, si l’on additionne la dette publique « officielle », la dette des régions, qui est en passe
d’être consolidée avec la dette du gouvernement central et les impayés de
l’État (qui ne sont rien d’autre qu’une autre forme de dette publique) on
atteint 100% du PIB à la fin du premier trimestre 2012. Or, en 2007, la dette
publique n’était que de 35%. »
Malgré ou à cause des mesures d’austérité, la situation économique et
financière s’aggrave très rapidement dans ces deux pays. L’explosion de l’euro
fait désormais partie des hypothèses de travail de nombreux états, de toutes les banques et
institutions financières. Plusieurs scénarios sont envisageables.
- La sortie de la Grèce et l’action de la BCE et du FMI (réticente pour l’instant) pour redonner d’une façon ou d’une autre de l’air aux deux grands pays menacés.
- La sortie de l’Allemagne qui ne veut plus un endettement abyssale de l’Europe du sud.
- La sortie unilatérale de l’Espagne qui redonnerait du souffle à son économie
- La sortie concertée de l’Italie avec l’Espagne ou la France (d’où la rencontre France-Italie à l'Élysée)
- La partition de l’Europe en nord et sud grosso modo avec une monnaie « eurosud » dévaluée
Etc. En bref tout ceci signe l’arrêt de mort de l’euro tel qu’il est
actuellement. Cependant les conséquences sont incalculables et touchent aux
fondements même de l’Union Européenne. Le Royaume-Uni n’y voit plus sa
participation comme une évidence. L’avenir est désormais totalement
imprévisible mais avec la crise en Espagne et en Italie, venant s’ajouter aux
crises Grecques, Portugaises et Irlandaises, la zone Euro est au bout du
rouleau.
Quand on ne
veut pas voir la vérité
Celle-ci finit
toujours par vous rattraper.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon