Macron vient de cirer
les pompes de Poutine après avoir fait celles de Trump. Gaullien chez Poutine et La Fayette chez Trump,
Macron a réussi à y adjoindre le florentin Mitterrand dans son art du « en
même temps ». Il faut évidemment s’appeler Macron pour réussir à
se dire le plus fidèle allié des Etats-Unis, ce qui
est d’ailleurs prouvé par les faits puisqu’on les
suit partout dans le monde avec nos armes et nos soldats, et de pouvoir dire
les yeux dans les yeux aux russes : « Le président Poutine le sait, la politique étrangère de la France, sous
ma direction, est pleinement indépendante. Nous ne nous alignons jamais sur
personne, nous prenons nos décisions par nous-mêmes et pour nous-mêmes... Notre
dialogue avec la Russie est un élément de cette indépendance. » C’est
avec le même « en même temps »
que Macron ne lève pas les sanctions contre la Russie, mais ne parle pas de la
Crimée, objet majeur de la présence des occidentaux en Ukraine et du
positionnement de l’OTAN sur ce pays. Il va même jusqu’à justifier l’aide russe
aux indépendantistes du Donbass et de Lougansk en affirmant qu’il « respect[ait] le rôle renforcé que la Russie
se donne dans son environnement régional », dont évidemment la Crimée et les
républiques autonomistes ukrainiennes font partie.
Exit la ligne rouge
de la Crimée, mais aussi exit l’accusation des Pays-Bas et de l’Australie sur
la responsabilité de l’armée russe accusée d’avoir abattu l'avion du vol MH17
en Ukraine en juillet 2014, Macron voit l’apaisement des relations de l’Europe
avec la Russie dans le seul règlement de la partie orientale de l’Ukraine. Il
assure par trois fois la « fiabilité »
de la France dans ses rapports avec la Russie oubliant l’affaire des Mistral.
Sans concertation avec les autres chefs européens, Macron affirme l’indépendance
de la France après avoir dû accepter les décisions de Trump sur l’Iran, et voir
les soldats français formellement repérés en Syrie aux côtés des rebelles
syriens et de leurs alliés terroristes contre les forces syriennes de Bachar el-Assad,
soldats et officiers sauvés par une intervention de l’aviation américaine.
Il affirme
qu’il soutient la Russie dans la résolution diplomatique
du conflit syrien, après la neuvième réunion d’Astana débouchant sur des progrès
sensibles avec la définition de 4 zones de désescalade militaire décidée par
les principaux acteurs dans le conflit, l’Iran, la Turquie, le Hezbollah, le mouvement
rebelle syrien et Bachar el-Assad. Mais il a le culot de dire que les réunions
du groupe de Genève avec l’ONU, dont il fait partie, réunions n’ayant eu aucune
suite concrète, sont un complément de l’action russe. Si la Russie n’était pas
intervenue, Bachar el-Assad serait mort ou en prison et la Syrie serait dépecée
entre la Turquie et Israël, en proie à un massacre des Kurdes, et pillée par
les grandes compagnies pétrolières occidentales. De même il affirme devant
Trump son soutien sans faille à l’alliance occidentale et à l’OTAN, outils
indispensables à l’hégémonie américaine, et il parle à tout propos de multilatéralisme,
donc de monde multipolaire pour des pays souverains, devant Poutine. Or là on
ne peut décemment pas faire du « en
même temps », il s’agit de deux orientations diamétralement opposées
de la géopolitique mondiale.
Macron
fait faire à la politique étrangère un virage à 180°, virage certainement
approuvé post mortem par De Gaulle dont le livre traînait ostensiblement sur le
bureau du nouveau Président Français lors de la photo officielle. Cela est remarquable
et on pourrait s’en réjouir, mais quel crédit, a notre Président dans le monde après
ce chevauchement perpétuel sur la thèse et l’antithèse ? Quel
crédit a-t-il auprès de Poutine lorsque celui-ci constate les opérations
militaires françaises contre son protégé syrien pour lequel des soldats russes
sont morts ? Quel crédit a-t-il auprès des européens dont
il veut l’union autour de ses propositions de plus grand fédéralisme et de plus
grande solidarité lorsque de son propre chef il bafoue la ligne atlantiste de l’UE,
et en particulier celle des pays de l’Est européen ?
Si l’affirmation
de l’indépendance et de la souveraineté de la France, éminemment souhaitable,
doit se construire dans un renforcement du fédéralisme européen, la dissolution
rapide de ces objectifs est programmée d’avance. Macron préparerait-il un vrai
retournement de sa politique en vue des européennes, ou n’est-ce qu’un faux
semblant, vite dénaturé une fois l’élection européenne passée ? Tout est
possible avec cette marionnette changeant de costume à chaque apparition sur
scène. Il faut d’ailleurs rapprocher ce discours en Russie de l’interview de De
Villepin à BFM TV, car il y a du copié-collé entre leurs propos. Est-ce la concrétisation
du délitement de la zone euro et finalement de l’UE avec la grosse goutte
italienne faisant déborder le vase ? Il se trame visiblement une évolution
rapide des principaux pays européens dans une UE où l’Allemagne et les États-Unis jouaient de pair en maîtres incontestés sur les plans monétaires,
financiers, économiques et militaires. Il semble y avoir de l’eau dans le gaz.
L’UE
à 28 États va perdre l’un de ses membres les plus importants par le Brexit, et l’Allemagne
prend peur devant le rôle de sauvetage récupéré par les transferts financiers
des pays mal en point vers elle. Sa position de pays ayant profité à plein de l’UE
et de la zone euro se retourne désormais contre elle. Elle pense à une porte
sortie de l’euro par un article juridique à inclure dans les traités, article censé
la protéger au maximum d’une sortie d’un pays du « Club Med », mais
permettant aussi sa propre sortie dans les meilleures conditions. La redéfinition
d’un groupe restreint de pays plus solidaires est dans l’esprit français et
allemand. Mais il y a fort à parier sur une volonté française de renforcer un
tandem franco-allemand, et sur celle différente de l’Allemagne de fédérer
autour d’elle les pays avec lesquelles vont ses intérêts historiques, la Grande
Allemagne, dont la France pourrait être exclue. Il faut bien se rendre compte que
l’intérêt de l’Allemagne pour la France réside essentiellement dans notre rôle
de client et notre voix de blocage au Conseil de Sécurité de l’ONU.
Si
la France veut retrouver son indépendance, elle doit d’abord sortir de l’OTAN
comme membre permanent, et retrouver une puissance militaire en déclin. Elle
doit retrouver sa monnaie et s’imposer sur l’oligarchie bancaire qui domine l’UE
et particulièrement la zone euro. C’est donc une toute autre relation européenne
à construire demandant une volonté politique sans faille et un peuple convaincu.
Rothschild a son mot à dire et Macron ne pourra pas prendre la position gaullienne
pour s’opposer à une vue différente de l’oligarchie bancaire, il n’a pas la
puissance intrinsèque suffisante. La France risque donc de subir une opération
de déstabilisation, de déstructuration dans laquelle la ploutocratie bancaire judéo-américaine
et le complexe militaro-industriel américain sont passés maîtres.
Macron
est un apprenti-sorcier et ses propos avec deux des plus grands pays du monde
sont d’une légèreté confondante. Elle montre pour le moins un manque de préparation
notoire, car on ne peut pas lancer un pavé dans la mare sans recevoir des
éclaboussures, et qui déclenche le vent récolte la tempête. Visiblement il ne
maîtrise rien et expose notre pays à des moments cruels dûs à son
inconsistance. Il s’agite beaucoup mais comme un poisson dans un bocal. Le charme
déployé est un aveu de faiblesse, seules les actions concrètes clairement assumées
permettent de se faire respecter au niveau international. On en est bien loin
et plus proche de la risée du monde que de son respect.
La prudence veut de ne pas parler pour
ne rien dire
Lorsque le risque d’un conflit mondial
devient fort
Et toute vague de plus peut générer la tempête.
Or nous allons tous, et de toutes parts,
subir
Des changements historiques mondiaux.
Claude Trouvé
26/05/18
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