Laurent Fabius quitte le Ministère des Affaires
étrangères pour un poste de prestige au Conseil Constitutionnel. Espérons qu’il
sera plus utile à ce poste qu’à la tête de la diplomatie française. En effet la
France « semble avoir perdu l’indépendance et l’intelligence des
situations qui lui donnaient un rôle à part ». C’est ce que dit le groupe des Vingt, anciens
ministres, diplomates ou personnalités qui se réunissent périodiquement pour
discuter de notre politique étrangère. Cette dérive s’est aggravée depuis
Sarkozy mais le recul de l’impact de la France sur la diplomatie mondiale est
encore plus net sous le couple Hollande-Fabius. Nous sommes toujours invités mais
peu écoutés. Seul notre véto au Conseil de Sécurité peut encore nous donner du
poids, si tant est que nous ne soyons pas interdits de l’exercer par notre
vassalisation renforcée aux Etats-Unis due à notre entrée dans l’OTAN. La
France a choisi de se mettre à l’abri des Etats-Unis au point de « devenir
le meilleur élève de la classe atlantique, concurremment avec la servile
Grande-Bretagne », virage pris par Nicolas Sarkozy, et signe le retour
des vieux réflexes de la guerre froide vis-à-vis de la Russie.
Depuis la chute de l’URSS, la France n’a
pas su redéfinir une politique vis-à-vis de la Russie et a rejeté Poutine comme
le Président d’une forme de démocratie qui n’est pas la nôtre. Si Sarkozy avait
su manier avec lui l’apaisement et apparaître comme un médiateur dans le
conflit avec la Géorgie, la France de Hollande n’a même pas su retrouver ce
rôle en confondant médiation et double jeu. Le refus de livraison des Mistral
et la proposition de coopération aérienne en Syrie sans contrepartie montre le
dédain vexatoire qui empêche la création d’un axe historique et naturel Paris-Berlin-Moscou
plutôt que Paris-Londres-Washington, lequel n’a existé que pour empêcher l’hégémonie
allemande de mettre à mal l’hégémonie anglo-saxonne partagée du XXème siècle. L’occasion
était belle de donner à la France son rôle de pont entre l’Est et l’Ouest et de
construire une Europe, forte économiquement de sa complémentarité
ressources-industries de pointe, et militairement suffisamment forte pour
permettre de défendre une vision indépendante du monde. La France frileuse ne
construit qu’un avenir de dépendance.
« La politique française au Moyen-Orient manque à la fois d’objectifs, de visibilité et de résultats. Elle est souvent plus dominée par l’émotion que déterminée par une évaluation des intérêts réels de la France. Elle n’a plus de lisibilité et déroute la plupart de nos interlocuteurs arabes. » Ce jugement est juste mais le résultat d’un suivisme aveugle de la politique étasunienne aussi illisible si l’on ne voit pas que c’est l’application de la théorie du chaos. Cette politique manie le mensonge, le double-jeu et joue en arrière-plan sur la montée des oppositions locales pour détruire toute cohésion et toute résistance des États réticents et forts. Nous devenons ainsi illisibles pour ceux qui ne voient qu’actions de démocratie, de défense des droits de l’homme et d’interdiction d’armes prohibées. Notre position partisane vis-à-vis d’Israël, pays frère selon Manuel Valls ( ! ), dans le conflit israélo-palestinien a pour conséquence que la France « n’a plus de lisibilité et déroute la plupart de nos interlocuteurs arabes. » On ne sait même plus si l’on lutte contre Daech ou contre Bachar Al-Assad en oubliant que celui-ci a été élu démocratiquement à la tête d’un Etat syrien reconnu par l’ONU et que l’EI s’est proclamé unilatéralement. Nous attaquons la Syrie en violation des lois internationales après avoir dit que nous reconnaissons l’opposition syrienne comme la réelle représentation de la Syrie. Aberrant !
La « diplomatie climatique », est devenue
en 2015 le sujet numéro un au quai d’Orsay, et la grande œuvre d’un Laurent
Fabius déclaré homme politique de l’année. La COP22 de Marrakech va vite
effacer la COP21 de Paris et les promesses des deux plus grands pollueurs Chine
et États-Unis vont fondre comme neige au soleil. La Chine est sans doute
préoccupée par la pollution de ses grandes villes et prendra les dispositions
indispensables en limitant la pollution industrielle et énergétique. Quant aux
États-Unis, ils voient la loi sur la limitation des centrales thermique
polluante bloquée par voie parlementaire et naître un nouveau plan de
développement du nucléaire considéré comme incontournable. Les écolos ont du
souci à se faire mais il est vrai qu’il est surtout important pour eux d’avoir
une place au gouvernement.
La prise en compte claire de la lutte contre l’immigration de peuplement et celle de la protection contre les attentats sur notre territoire devrait être la priorité dans notre politique étrangère. Le but n’est pas de détruire Daech et Bachar Al-Assad mais d’empêcher que le sang coule en France et que notre pays devienne à terme une république islamique, ce qui est totalement différent. La stratégie et la définition des priorités d’une politique étrangère claire est à reprendre à zéro. L’anticipation et la gestion des nouveaux déséquilibres dans un monde où deux conceptions vont s’affronter, doivent être assumées dans un but clair d’indépendance garantissant les intérêts de la France. On peut faire le même constat en matière de choix économique et dans celui des objectifs de l’Union Européenne auxquels a souscrit la France. Cela fera l’objet de la deuxième partie de cet article.
La France ne peut avoir la tête haute
En
bradant son indépendance.
Comme
le dit Talleyrand
“Soyez à leurs pieds.
A leurs genoux...
Mais
jamais dans leur mains.”
Claude Trouvé
Coordinateur MPF du Languedoc-Roussillon
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