vendredi 9 mai 2014

La stratégie guerrière de l'Occident en Ukraine



La situation en Ukraine dérive lentement mais sûrement vers une guerre civile qui couperait le pays en deux et cela dans les pires conditions, celle d’une guerre au sein de l’Europe, guerre alimentée par des pays extérieurs. Le soutien apporté aux nationalistes de l’Ouest de l’Ukraine, mis en marche et soutenus par l’Occident dans les manifestations de Kiev, a abouti à la destitution du Président dans des conditions ne respectant en aucune façon la Constitution de ce pays. Le nouveau responsable mis en place ne bénéficie pas de la légalité nécessaire, c’est un homme que l’UE veut tenir dans son camp et attirer ce pays dans une grande alliance transatlantique. 

C’est l’opposition entre les vues occidentales, la proximité économique, culturelle et linguistique de la partie est russophone du pays avec la Russie et la hantise de celle-ci de voir l’OTAN arriver à sa porte, qui sont la raison qui pousse à ce que la situation s’envenime. Sur ce dernier point, la Russie vient de s’exprimer clairement. On touche là à une ligne rouge au plein sens du terme. Sans l’aide américaine et israélienne, sans la poussée de l’UE pour englober l’Ukraine, les manifestations de Kiev n’auraient pas abouti à la situation actuelle. 

L’aide à la démocratie a bon dos. Comme elle a bon dos en Syrie où l’on soutient les rebelles contre un Président, régulièrement élu et qui maintenait la paix dans son pays. Le pays est à feu et à sang, Bachar el Assad est toujours là et reconquiert son pays pendant que nous essayons de retenir les jeunes français qui veulent partir là-bas faire le djihad ! La réponse militaire américaine est désormais de maintenir là-bas une guérilla permanente pour asphyxier lentement mais sûrement le pays, enlever ce soutien à la Russie et gérer son pétrole. 

L’affaire ukrainienne n’a pas commencé par des manifestations pro-russes destinées à déclarer l’indépendance de la partie est du pays. Cette demande ne prend corps que depuis que Kiev, se dote d’un chef dont la légalité est contestée et lance ses troupes contre les insurgés de l’est. Le Rubicon est désormais franchi, le sang a coulé. La Russie reste pour l’instant sur la réserve mais réaffirme sa position en attendant ce qui va sortir de ce chaos. 

La position occidentale est de faire élire un nouveau Président le 25 mai. Comment peut-on espérer qu’un tel vote puisse être représentatif tant que l’est et l’ouest de l’Ukraine ne se sont pas mis d’accord sur ce que doit être l’avenir de ce pays et tant que toutes les garanties ne seront pas données et acceptées par l’est ? C’est mettre la charrue avant les bœufs et se diriger tout droit vers une guerre civile d’autant plus meurtrière que l’Occident et la Russie prendront alors des positions diamétralement opposées et alimenteront le conflit. 

La Position occidentale défendue, entre autres par Hollande, est irresponsable. La seule issue valable est de rapprocher l’est et l’ouest du pays en créant une Assemblée Constituante, dotée aussi de pouvoirs législatifs, qui puisse écrire dans les textes ce qui sera considéré comme une garantie suffisante sur le respect d’une sorte de fédéralisme ou la partie russophone puisse se faire entendre et empêcher qu’elle soit incluse dans l’UE sans son assentiment. 

Ce n’est qu’alors que l’élection prévue le 25 mai peut garantir que les tensions s’apaisent. Ce n’est malheureusement pas le chemin qui est pris par les Occidentaux et qui veulent imposer leurs vues et continuer l’œuvre entreprise alors de la mise en place du Président par intérim dans des conditions bafouant la Constitution. La visite de Poutine en France, sans qu’une rencontre Obama-Poutine ne soit prévue est un mauvais signe. Nous sommes de plein pied dans une géopolitique américaine qui consiste à détacher l’UE de la Russie. 

Il va être intéressant de voir si la position russe évolue significativement après la rencontre du 20 avec la Chine. Dans la mesure où l’Occident pousse la Russie dans ses derniers retranchements, la voix de la Chine prend une résonance particulière. Très attachée à l’intégrité territoriale des pays, comme ce fut le cas dans toute l’histoire de ce pays, la Chine doit néanmoins maintenir des liens, souvent difficiles mais nécessaires, avec la Russie. Elle doit aussi faire face à l’hégémonie américaine. Calmera-t-elle le jeu ? 

La situation ukrainienne est encore un brûlot en Europe. 

Deux camps s’affrontent comme en Syrie. 

Les armes seront-elles diplomates ? 

L’Occident joue avec le feu ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon