Le flux migratoire n’est plus le plus
grave problème de l’UE mais il cache une explosion latente de celle-ci tant les
divergences s’accroissent entre les 28 pays sur fond de crise financière latente.
La réunion des 28-29 juin centrée sur l’immigration a accouché d’un communiqué
final qui ne résout pas grand-chose mais qui permet à chacun de repartir
affronter ses opinions publiques et adversaires politiques en donnant l’impression
d’une victoire même si c’est une victoire à la Pyrrhus. La plus nette attitude
de l’UE, à laquelle Macron a donné tout son appui est la création de « centres de débarquement hors zone
UE ». Comme attitude hypocrite, il est difficile de faire mieux.
Quelle belle résolution des problèmes, quand la solution est de le reporter
chez les autres ! Evidemment ceci est décidé sans qu’aucun accord
préalable n’ait été obtenu de quelque pays receveur que ce soit. On présuppose
que les candidats se presseront pour récupérer le problème dont nous ne voulons
pas. C’est d’ailleurs bien parti car le Maroc et l’Albanie ont déjà fait savoir
qu’il n’en était pas question pour eux.
Il semble que les centres de
débarquement soient le déversement d’un trop plein de réfugiés puisqu’il est
question de créer dans l’UE des « centres
de contrôles » dans lesquels seraient dirigés les réfugiés récupérés
dans les eaux territoriales européennes. Ces centres seraient créés dans des
pays volontaires, on peut se douter qu’il s’agit des pays périphériques de la
Méditerranée. Comme ils existent en Espagne, en Italie, à Malte, en Grèce, il
suffit donc à ces pays de se porter volontaires… Que fera l’Italie sinon accepter
du bout des lèvres un quota à sa mesure ? Il se cache de plus l’idée de
séparer les réfugiés récupérés par les ONG dirigés sur les centres de
débarquement, et ceux récupérés par les navires de Frontex conduits vers les
centres de contrôles. Ce serait une façon de rendre plus difficile la tâche des
ONG. Enfin tout ceci est moins que clair en dehors de l’idée de limiter l’accès
aux critères du droit d’asile. Ce qui est clair par contre c’est la volonté de
renforcer le contrôle des frontières de l’UE, mais aussi celui aux frontières
de chaque pays pour limiter les « mouvements secondaires » de pays à
pays de l’UE. Celle-ci se referme, ne pense plus beaucoup aux Droits de
l’Homme, et piétine par ailleurs l’esprit du Traité de Schengen. Même si la
réalité s’impose, on continue dans une attitude de plus en plus hypocrite de
prolonger la vie d’une UE moribonde. L’accord obtenu autour du mot « volontariat »
montre combien l’accord n’est que de façade. Cela me fait penser à un service
militaire où l’adjudant demanderait qui est volontaire pour « la corvée de chiottes » !
Mais l’attitude de la France qui,
finalement se fait le chantre d’un accord européen pour soutenir l’Italie alors
que nous n’avons pas brillé dans la prise en compte des réfugiés débarqués en
Italie, reste un modèle d’hypocrisie. Nous ne cessons de repousser vers
l’Italie les réfugiés tentant de passer de ce pays en France tout le long de
nos départements alpins frontaliers et de souhaiter le départ de ceux de Calais
vers le Royaume-Uni. Il en est de même au Yémen où nous couvrons le massacre
des chiites en fournissant armes et munitions à l’Arabie Saoudite, où une
frégate française participe au blocus,
et où nous engageons même des forces spéciales, tout en déplorant le génocide
en cours mais sans faire d’action diplomatique pour faire cesser les combats et
trouver un accord de paix. C’est aussi notre présence au Mali, où le problème
de fond du pays entre les berbères et la population noire de l’Ouest n’a toujours
pas de solution territoriale ou administrative, mais où nous nous maintenons
avec un gouvernement malien parrainé, sous le prétexte de la lutte contre le
terrorisme, alors qu’il s’agit de nos intérêts dans cette région dont
particulièrement dans le Niger.
Nous procédons de même en Syrie où
nous participons militairement officiellement avec les forces de libération
syriennes, parfaitement contrôlées par les forces terroristes en grande partie
formée de mercenaires venant de nombreux pays, en prétendant y être pour lutter
contre Daech. Nous suivons simplement la politique américaine du chaos qui veut
la chute de Bachar el-Assad et mettre dehors la Russie. Nos propos sont là
aussi d’une hypocrisie crasse, propos destinés à alimenter la croyance
populaire du rôle historique de la France dans le combat pour la liberté. Nos
soldats se font ainsi surprendre en flagrant délit de coopération avec Daech mais cela ne fait pas la Une
médiatique. Nous continuons à nous émouvoir de l’immigration syrienne dans l’UE
tout en continuant à provoquer des émigrations de syriens chassés par la peur
des combats. Même si la Syrie revient doucement vers une période de paix sur
les territoires reconquis par Bachar el-Assad, nous nous maintenons proches des
bases américaines à l’Est de l’Euphrate. Ce double jeu de puissance occupante,
sans autorisation de la Syrie, ne grandit pas la politique étrangère de la
France, d’ailleurs désormais brouillée dans le monde entier.
Mais on ne peut pas oublier le cas
emblématique russe. Il s’agit là de l’une des plus grandes puissances mondiales.
Au 12ème rang par son PIB en 2018, la Russie est en passe de
disposer de la puissance militaire la plus perfectionnée du monde, puissance
essentiellement dissuasive mais capable de damer le pion aux Etats-Unis. Elle
est désignée « ennemi numéro 1 » par les Etats-Unis. La France
intègre cette vision géopolitique pour honorer sa participation à l’OTAN. Si
Hollande a refusé de remplir les obligations du contrat de vente des navires
Mistral, les sanctions contre la Russie viennent d’être prolongées de six mois
le 29 juin 2018 au matin. Cette décision est basée sur le soi-disant non-respect
des accords de Minsk, mais n’a fait l’objet d’aucune réunion préalable avec la
Russie pour au moins confronter les points de vue. Ce refus de débats
contradictoire est général, comme pour Skripal et les gazages en Syrie. L’UE
mène les enquêtes, en refusant la participation russe, et décide seule… en
accord avec les USA. On peut remarquer que les accords de Minsk contiennent des
devoirs réciproques des signataires dont celui du dirigeant ukrainien recevant
les subsides européens en vue de son intégration à l’UE passant par celle à
l’OTAN mais violant sans arrêt le cessez-le-feu.
On peut deviner qu’il s’agit d’un jeu de dupes dans lequel la France
prend une participation majeure que ce soit dans les accords de Minsk, dans son
jeu en Syrie finalement contre la Russie, ou dans les sanctions votées suite à
l’annexion russe de la Crimée. Evidemment la France n’annexe aucun pays, elle
pollue nombre de pays par sa présence pour ses propres intérêts et contribue à
tuer ou à faire tuer des centaines de milliers de personnes. L’annexion de la
Crimée s’est faite sans aucun mort dans la population civile et avec son
approbation par vote local, approbation confirmée par la population ensuite. Le
pays se porte bien depuis et est ouvert vers l’extérieur. Son histoire et sa
langue marquent une appartenance russe indiscutable, mais quand on veut tuer son
chien, on dit qu’il a la rage. Ces sanctions ne font que participer à l’envie
américaine d’en découdre de nouveau avec l’ex-URSS pour maintenir son hégémonie
sur l’Europe, mais elles ne vont aucunement dans l’intérêt de la France.
Celle-ci joue d’ailleurs le jeu
hypocrite de relations économiques et scientifiques de la France avec la Russie
et en particulier dans le domaine de l’atome. La société russe Rosatom a fini
par priver la France de son leadership dans le nucléaire civil mais nos
contrats d’échanges commerciaux et de coopération, dont la maintenance
nucléaire et l’augmentation de la durée de vie des réacteurs, continuent de
plus belle. Si Rosatom a des contrats de construction de centrales nucléaires à
l’étranger (35 dans 11 pays), il s’est lancé dans la quatrième génération de
réacteurs rapides pour laquelle notre Superphénix avait 20 ans d’avance, et
tient à coopérer avec les équipes de recherche du CEA français. Quand un pays
commet des erreurs le mettant au banc des accusés par l’ONU pour acte belliqueux
sur une puissance étrangère, on ne peut pas mener un double jeu sans perdre
toute crédibilité. Que la Pologne et l’Estonie gardent un sentiment antirusse
peut se comprendre mais ils ne jouent pas dans l’hypocrisie française.
Dans la politique étrangère comme celle intérieure
Macron donne une image floue de notre pays
Dans une ambiguïté du « en même temps »
Et dans des compromissions incessantes
Donnant l’image d’un bateau ivre
Tout autour de la planète !
Claude Trouvé
29/06/18
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