Depuis le temps qu’il
est clair, donc depuis au moins le traité de Maastricht, que l’Union
Européenne portait dès sa naissance les stigmates de sa mort, l’heure de son
agonie est toute proche. Le Phénix renaîtra-t-il de ses cendres sous une forme
nouvelle de coordination ou chaque pays se séparera-t-il de la Bête monstrueuse
en emportant des lambeaux de sa dépouille ? En tous cas l’heure est
proche, ses jours sont comptés comme la place de Chancelière pour Merkel. Si l’Italie
vient de décocher le coup de pied de l’âne à une UE technocratique aux mains
des lobbies et de l’oligarchie financière, c’est bien l’Allemagne qui reste le
pivot de la stabilité de l’UE et de la zone euro. C’est un pivot pratique
faisant fi de toute idéologie sur le plan économique tout-au-moins en laissant
à la France idéologique et fédéraliste le soin de jouer le rôle de béquille.
Le
couple franco-allemand, encore en réunion aujourd’hui, ne fonctionne que
pour faire passer les vues allemandes à l’ensemble des autres pays. On peut
adjoindre les pays du Club Med, ayant l’œil sur la France, aux pays satellites environnants
et dépendants de l’Allemagne pour constituer une force de persuasion suffisante
pour créer l’unanimité des pays sur une décision. Mais ce couple porte en
lui-même une raison de division de l’UE, car cette prééminence constante ayant
pour but de faire plier les autres, y compris l’Italie pays fondateur et
troisième puissance économique, crée un sentiment de révolte rentré mais
croissant et cherchant désormais à faire entendre la voix des petits pays. Le groupe
Visegrad réunissant la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la
Slovaquie est une manifestation de faire poids pour faire valoir des intérêts
communs spécifiques. Il représente 63,8 millions d’habitants en 2016 (13 % de
la population de l’UE), soit presque la population de la France et plus que celle
de l’Italie.
Officiellement
Macron veut rencontrer Merkel pour harmoniser les impôts sur les sociétés entre
les deux pays. C’est le processus habituel pour créer une situation à deux
pouvant être imposée à tous. Macron est dans son axe prioritaire d’ultralibéralisme
pour lequel l’économie est le seul objectif. Tout laisse à penser que
sur ce sujet Merkel, en difficulté avec son Ministre de l'Intérieur, ne lâchera
rien qui puisse nuire à l’économie allemande. Les concessions à Macron seront
mineures et Macron est convié à Berlin pour toute autre chose : la politique
migratoire, principal sujet de préoccupation de la Chancelière dont l’autorité
chancelle justement. Elle a ouvert la porte à une immigration massive de
migrants en Allemagne créant une vague de « réfugiés » jetant le trouble
de la Grèce à l’Allemagne dans tous les pays traversés. Elle a fait payer les
pays de l’UE à la Turquie pour qu’elle ferme la porte avant une révolte des
pays traversés et fait voter des quotas imposés à tous les pays. Si la France a
traîné les pieds pour cet accueil, la Hongrie a créé la première résistance aux
décisions européenne en fermant
ses frontières.
La
population allemande, dans l’Est et en Bavière en particulier, réagit très
négativement à cet afflux dont ils perçoivent le poids budgétaire et l’insécurité
grandissante (préoccupation majoritaire pour 56% d’entre eux). Ils ont bien
compris que les
migrants en Allemagne ne se sont pas mis au boulot aussitôt. Sur 1.300.000
demandeurs d’asile, les médecins, les ingénieurs sont très minoritaires, moins
de 2% du total, et 85% des Syriens dépendent de l'aide sociale. La CSU,
pourtant favorable au principe initial d’immigration pouvant combler la perte démographique
et le manque
de main-d’œuvre, découvre la réalité avec une partie des allemands réalisant
avoir été manipulés. L‘immigration massive et non contrôlée provoque des
problèmes de prise en charge financière, de sécurité, d’intégration avant
assimilation, et des heurts civilisationnels liés principalement au nombre et à
la brutalité de son arrivée.
Angela
Merkel réussira-t-elle le coup de poker gagné par Theresa May avec le vote de
la Chambre des Lords pour le Brexit ? Rien n’est moins sûr. L’Italie a
jeté un pavé dans la mare et fait comprendre au duo franco-allemand que
leur inertie devant l’arrivée massive sur l’Italie devait cesser. Un axe
Berlin-Vienne-Italie se constitue sans accord explicite de la Chancelière. La
coalition est ébranlée et la CSU donne trois semaines à la Chancelière pour prendre
les mesures de non-acceptation automatique des migrants régularisés dans les
autres pays sous peine de leur retrait de la coalition. Secouée par le premier
et le troisième pays de l’UE, celle-ci est en voie de décomposition car le
sujet de la politique migratoire est loin de faire l’unanimité
en son sein. Par exemple la Hongrie argue que le transit de migrants
par l’Aquarius et le travail politique de certaines organisations ne peut se
faire sans l’aide du multimilliardaire Soros dont le but est en permanence la
déstabilisation des pays, en particulier par le flux migratoire, au profit de l’hégémonie
américaine.
Mais
l’UE est en ligne de mire de la guerre économique livrée par Trump, en particulier
l’Allemagne. Par ailleurs la croissance mondiale ralentit et l’UE risque d’être
durement frappée. Cela commence à se voir en France sur le premier trimestre,
alors que
notre croissance était déjà plus faible que la plupart des pays
européens en 2017. La dette mondiale augmente exponentiellement, le montant d’argent
nourrissant la spéculation n’a plus aucun rapport avec celui tournant dans l’économie,
et les profits spéculatifs détournent l’intérêt des investisseurs de l’économie
réelle. Cette situation devient explosive et risque d’engendrer une montée
des taux d’intérêt menaçant directement les budgets des États et ceci d’autant
plus que
leur dette est plus élevée. Une grave crise mondiale risque
de s’abattre sur une UE désarticulée et d’en faire la plus grande victime.
Où
peut aller l’UE ? La montée des nationalismes croît chaque semaine dans
les déclarations des élites et dans les résultats de chaque élection. L’UE
fédérale est devenue un leurre où il ne reste que Macron pour y croire ou
faire croire qu’il y croit. La force centrifuge exercée sur l’UE est telle que l’on
est en droit de se demander si même une UE des nations, celle qui aurait pu
avoir l’assentiment de De Gaulle est encore possible. Le découpage en zone euro
et hors zone euro avec des traités différents ne résoudrait plus rien, car l’Italie
a compris le tort de la monnaie unique sur son économie, même si la France ne
veut pas l’admettre pour elle-même. La suppression de la règle de l’unanimité pour
redonner du poids aux petits pays ne ferait que renforcer les forces
centrifuges. Il est plus probable de voir les pays revenir vers la zone de
libre-échange, principal fondamental de sa construction ne contenant pas
expressément le besoin d’une BCE, ni d’une technocratie bruxelloise, ni même d’un
Parlement européen. On pourrait donner le choix d’une monnaie commune, mais il
y a fort à parier que l’Allemagne en profitera pour faire payer
les créances cumulées chez elle par les pays endettés.
Il
apparaît clairement que la situation actuelle de l’UE n’est plus
tenable à partir du moment où des pays ne veulent plus se plier aux décisions
communes. La politique migratoire et la remise en cause de l’euro, soulevée par
la constitution du gouvernement italien, deviennent deux chancres dont l’UE
actuelle ne se relèvera pas. L’UE entre dans une phase de décomposition dont on
peut même penser qu’elle aura du mal à attendre les élections européennes de
2019 pour éclater.
Il n’est point dans le monde d’organisation
politique
Qui résiste
à des fondations trop mal construites
Étayées sans le respect total de la
démocratie.
L’UE paye ses erreurs de fonctionnement
Dans une crise finale très proche.
Claude Trouvé
19/06/18
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