samedi 9 juin 2018

Eurasiafrique ou le nouveau Monde (1ère partie)



Après l’introduction de la Russie dans le conflit syrien, l’Europe découvre que le couple israélo-américain ne fait plus la loi partout dans le monde. La France s’accroche alors à son « allié américain », il le croit encore. Bien calée dans une UE protectrice de sa monnaie euro, un OTAN représentant la plus grande puissance militaire, et respectée pour son siège permanent au Conseil de Sécurité de l’ONU, la France croit encore au couple franco-allemand dans lequel pourtant la politique migratoire de sa voisine complique les relations. Fortement traité médiatiquement et politiquement, le peuple français s’accroche toujours à l’Union européenne sans y croire vraiment, comme s’il n’arrivait pas à briser un rêve. Désinformé sur ce qui se passe vraiment au Royaume-Uni, il reste dubitatif sur l’intérêt de tourner la page d’un livre dont il attendait des merveilles, et boude son vieux rival historique d’Outre-Manche. Il a même tendance à souhaiter secrètement que le Brexit soit un échec, ce à quoi s’emploie l’UE, et maintenant le faiseur d’embrouilles nommé George Soros.

Visiblement le peuple avec son nouveau Président se pensait dans le changement non seulement sans casser le rêve européen, mais dans un nouvel élan. La France pouvait accepter l’ennemi désigné, la Russie et l’euro pouvait concurrencer le dollar. Si les Etats-Unis le disaient, il fallait les suivre. Ils étaient toujours le protecteur du dernier ressort. Notre aventure catastrophique en Libye pour eux, ne changeait rien au lien avec le pays de l’oncle Sam, et nous étions de même avec eux en Irak et en Syrie pour sauver là aussi la démocratie, puis lutter contre un radicalisme armé musulman, dit terroriste. L’ambiguïté de notre action était soigneusement camouflée et Bachar el-Assad, affublé du nom de « boucher », suffisait en soi à justifier une action contre lui finalement. Même nos militaires français pris la main dans le sac aux côtés des divers groupuscules se battant contre l’armée syrienne, n’ont pas généré beaucoup de commentaires dans les médias les plus lus ou vus. C’était pourtant la preuve de l’ambiguïté de notre action dans ce pays. 

L’avalanche de propositions de loi déclenchée par Macron, la déliquescence des principaux partis d’opposition, et les grèves, suffisaient à retenir l’attention du peuple. La visite de Macron en Europe de l’Est, terminée par un fiasco, n’avait ému personne. Macron était celui qui voulait relancer l’UE et proposait la mutualisation des dettes, un Ministre Européen des Finances, l’augmentation de la taxe carbone, et que sais-je encore, alors que la Chancelière était absente de l’actualité car engluée dans de longues discussions pour présenter un gouvernement. Macron faisait briller son entrain comme leader d’une UE assoupie. Bien des choses se passaient dans la géopolitique du monde, mais la France regardait l’ombre sur les murs de sa caverne, l’ombre chinoise et russe. Sur cette réussite factice en Europe, Macron franchissait l’Atlantique pour retrouver son nouvel ami Trump, mais comme qui aime bien châtie bien, il allait le tancer sur son départ de l’accord de Paris sur le climat, le dissuader de mettre des droits de douane sur l’aluminium et l’acier, et surtout le freiner dans sa volonté de sanctions sur l’Iran.

Ce voyage s’est finalement avéré comme le début du commencement de la fin de l’aura « macronienne ». Si les poignées de main, les tapes dans le dos ont été chaleureuses, l’image du vassal visitant son maître a déchiré le voile de notre complète dépendance. Macron est non seulement revenu bredouille mais il a concédé un nouvel accord sur l’Iran à son maître mais est revenu dessus dès son retour. Sa visite en Russie n’a fait progresser aucun dossier géopolitique et il a même dû minimiser sa dépendance aux États-Unis tout en maintenant les sanctions contre la Russie. Cette attitude de reniement affaiblit la crédibilité de la France et de son chef au niveau international. Mais la broncha du peuple était encore fixée sur les affaires nationales car son chef était à la recherche d’appui auprès de nos tous nos voisins et sa faiblesse éclatait aux yeux de tous. 

Mais la réunion du G7 va marquer le tournant géopolitique le plus important, non seulement pour notre pays, mais pour l’UE et cela aux yeux du monde entier. Le G7 trouve son origine dans le G6 (États-Unis, France, Angleterre, Italie, Allemagne de l’Ouest et Japon) créé en 1975 en pleine crise pétrolière. Cette initiative a été lancée par le président français Valéry Giscard d’Estaing et le chancelier allemand Helmut Schmidt autour de deux sujets majeurs, la crise pétrolière et l’échec des accords de Bretton Woods censés stabiliser l'économie mondiale. Le G6 devient G7 l’année suivant avec le Canada. La démarche de Macron auprès du Président canadien pour le rallier à la cause, dite européenne, ne peut aller bien loin car les liens entre les Etats-Unis et le Canada sont trop étroits pour que le Canada suive vraiment bien loin l’opposition à Trump, lequel trouvera rapidement un moyen de ramener le Canada à la raison moyennant quelques autres concessions. On ne reste pas longtemps dans la zone nord-américaine, c’est en fait un aveu de faiblesse. On peut penser la même chose du Japon.

Le groupe des six évoqué par Macron se réduit en fait à quatre, mais l’Allemagne et le Royaume-Uni ont des liens particuliers avec les États-Unis, et l’Italie a accepté d’être un pays important pour l’OTAN, avec ses bases et ses armes nucléaires. Ce pays en tire des avantages substantiels et y tient. Dans le cas d’accords négociés pays par pays avec Trump, la France est en réalité en position de faiblesse. Mais ce G7 est le révélateur de la dépendance de l’UE à son mentor américain. L’UE n’a pas de puissance militaire susceptible de peser dans le concert mondial, cela a été voulu par les américains. Elle doit rester une zone économique malléable à souhait par ce pays hégémonique que l’on nomme notre ami, notre allié, comme si l’histoire ne nous avait pas appris à se méfier surtout de nos amis. Les règles économiques sont encore régies par les USA dans la plupart des pays du monde, grâce à leur puissance militaire avec un budget supérieur à l’ensemble des autres budgets mondiaux, et à un dollar encore monnaie omniprésente dans les échanges commerciaux et pétroliers. 

L’Europe dans son ensemble n’existe pas autrement que par les échanges économiques. Trump vient seulement de le faire savoir explicitement et vient de sonner la fin des échanges commerciaux déficitaires avec les pays européens. Même la participation des pays européens aux dépenses de l’OTAN doit être réévaluée, les USA dépensent trop. Ils le vont savoir et se serviront de cet argument pour gagner le meilleur morceau de toutes les négociations. Il n’y a pas à être surpris. Trump l’a annoncé dès sa prise de fonction : les États-Unis dépensent trop dans le militaire, et sa tasse de thé est la guerre économique sur le slogan « Les États-Unis d’abord ». D’ailleurs Poutine dit la même chose et cela ne choque pas Trump qui n’hésite pas à demander la réintégration de la Russie dans le G7, prenant à contre-pied les autres pays.

Trump sait qu’il peut mettre facilement l’Europe à sa botte, mais qu’il n’en est pas de même avec la Russie et la Chine, l’un pour sa puissance militaire modernisée et efficace, l’autre pour sa puissance économique. Dans les discussions sur les échanges commerciaux, Trump a un atout majeur, c’est qu’il devient impossible de vendre les produits contenant le moindre composant fabriqué aux États-Unis si on refuse de suivre les injonctions américaines comme sur l’Iran. C’est ainsi qu’en ayant vendu Asthom aux américains, il nous devient impossible de construire des sous-marins parce c’est le fabricant des turbines embarquées. Notre naïveté n’a pas de limite et Macron mériterait d’ailleurs d’être accusé de trahison et d’être destitué pour cette simple action.

Ce G7 va projeter aux yeux du monde, et à ceux des citoyens non encore aveuglés par la propagande, la dépendance totale de l’UE, donc de la France, aux Etats-Unis. Elle met en évidence la faiblesse de l’UE dont on disait être une force capable de tenir tête autres puissances du monde sur des sujets vitaux. Non l’UE ne sert à rien sur ce plan et elle ne parle pas d’une voix unanime dans des grandes instances de décision comme le G7, ou le G20. Les intérêts nationaux des pays de l’Est vis-à-vis des États-Unis sont différents de ceux de la France ou de l’Espagne. L’UE se fait entendre par ses pays les plus importants, mais ils ne représentent que leurs intérêts personnels et non ceux de l’ensemble des pays la constituant. Mais l’Europe et la France en particulier n’ont pas réalisé que le monde qui les attend n’est pas de l’autre côté de l’Atlantique. Nous en parlerons dans le prochain article.
 
La France est passée à côté de l’histoire du monde. 

La Fayette n’est plus, il est déjà aux oubliettes

Dans ce monde économique sans pitié.

Une puissance forte d’aujourd’hui 

N’est déjà pas celle de demain.

Si un ami survit sur notre dos 

Un ennemi nous tendra

La main pour revivre.

Claude Trouvé 
09/06/18

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