La Chine a démarré ce
mercredi 6 juin le premier réacteur EPR de la planète. C’est l'un des deux
réacteurs qu'EDF a construit à Taishan, dans le sud-est de la Chine avec
l'électricien China General Nuclear Power (CGN). Il va maintenant y avoir une
montée en puissance progressive pour une connexion au réseau dans quelques
semaines. Pour EDF c’est un immense soulagement. Il détient en effet 30 % de la
coentreprise avec CGN et a investi 1 milliard d'euros en fonds propres dans le
projet. L'EPR de Taishan est le premier réacteur dit de « troisième génération
» à démarrer dans le monde. C’est une victoire importante de la technologie
française même si ce projet a pris quatre ans de retard par rapport au projet
initial. Son démarrage se produit avant celui de Flamanville commencé deux ans
plus tôt et reporté au début 2019. Les deux ont subi les retards dus essentiellement
aux défauts détectés sur les cuves et les couvercles fabriqués par AREVA.
Évidemment la nouvelle a fait pschitt
dans les grands médias, beaucoup plus intéressés par les comptes de campagne de
Macron, par son accolade à Trudeau comme à Trump pour finalement enfiler ses
gants de boxe contre lui lors du G7. Justement il faut réaliser que
cette victoire a une importance économique pour la France si celle-ci veut
rester dans le top des nations constructrices de réacteurs nucléaires. Grâce à son
PDG, Marcel Boiteux, EDF était devenu la plus grosse compagnie d’électricité
dans le monde. Or en Chine nous sommes en compétition directe avec les
Etats-Unis qui
construisent un AP1000 avec l’américain Westinghouse depuis 2006. La course
était engagée devant les autorités chinoises, plus portées vers l’AP1000 pour
leurs prochains réacteurs. Or la construction de 28 réacteurs va être engagées
dans les années à venir. Démarrer l’EPR français, et cela avant les américains,
est une double victoire française. Elle relance l’espoir de marchés futurs à
une dizaine ou plus de milliards par réacteur en Chine et renforce la position
française pour les autres marchés du monde avec 160 réacteurs en projet.
Si j’écris ce nouvel article, c’est
qu’un autre article à charge sur le nucléaire est fort opportunément publié sur
Agora Vox, article dans lequel on retrouve l’ensemble des menaces que
le nucléaire fait peser sur la France. Je lis beaucoup de bêtises dans tout ça.
Ceci prouve la désinformation générale ou le déficit d'information sur le
sujet. Ayant passé 37 ans de ma vie dans ce domaine de l'énergie nucléaire,
étant à la retraite ans et n’ayant aucun autre profit à tirer de mon passé
professionnel, je suis atterré par la lecture de l'article et d'un certain
nombre de commentaires. Comme toujours un peu de vérité fait passer d'énormes
contre-vérités dans un dossier à charge. Dès le début de l'article, je lis
l'affirmation d'une France possédant le plus grand nombre de réacteurs. C'est
faux, c'est les États-Unis et ceux-ci ne relancent pas encore le nucléaire pour
des raisons de surcapacité énergétique, et retrait assumé de la
"décarbonisation". La France est en revanche le pays le plus
nucléarisé du monde par habitant et est encore capable de produire 75% de son
électricité. Elle n'a été l'objet d'aucun "accident" selon l'échelle
internationale de gravité les classant de niveau 4 à 7. EDF n'a donc mis en
danger ni l'environnement ni l'homme, sinon tout incident serait classé accident.
Nous voulons arrêter nos
centrales à 40 ans d'âge alors que les États-Unis les poussent à 60 ans. Les
japonais vont relancer progressivement les réacteurs arrêtés par mesure de
précaution et de renforcement de leur sûreté. L'énergie nucléaire repart au
contraire dans le monde et Macron essaie de vendre des réacteurs aux demandeurs
des Emirats Arabes Unis. Les deux EPR chinois ont été construits avec succès et
le premier a démarré à 16h52 ce mercredi. Sa construction a démarré en 2009
deux ans après Flamanville et son démarrage devrait être salué par Macron car
il s'agit d'une technologie française. L’article d’Agora Vox stigmatise le
retard technologique de la France avec ses réacteurs de 3ème génération,
alors que
les réacteurs rapides de 4ème génération arrivent. C’est un comble. Pour
les réacteurs rapides nous avions 20 ans d'avance avec Superphénix, vilipendé
par les écologistes et arrêté par Jospin. On a perdu 23 milliards de francs et
ce sont les Russes qui vont maintenant vendre cette technologie de quatrième
génération avec le RN800, nous enlevant la place de deuxième constructeur
mondial avec la Chine.
L’article stigmatise EDF pour ses
pertes financières et ses échecs en Finlande et à Flamanville. Notre victoire
en Chine y répond partiellement. Il ne faut pas oublier que ce sont les premiers prototypes
d’une filière qui est un saut technologique important surtout en matière
de sécurité. Par ailleurs EDF a perdu beaucoup d'argent en s'immisçant sur
ordre gouvernemental dans les énergies renouvelables, les EnRia intermittentes
et aléatoires. Sans subvention ou droit de douane dissuasif, nous n'avons
aucune chance de concurrencer les éoliennes chinoises et le marché européen est
pris par le Danemark et l'Allemagne. De plus les terres rares sont nécessaires
à la construction des éoliennes et des panneaux solaires, or la Chine détient
80% de la production mondiale. Si celle-ci développe cette industrie des EnRia,
c'est pour en inonder l’Afrique devenu pour eux et les russes un continent
bourré de richesses naturelles à exploiter en partenariat. En réalité les
manipulations financières sur EDF ne se conçoivent que dans le contexte des
directives européennes auxquelles la France ne peut plus se soustraire. La
privatisation à venir d'EDF est une obligation faite à la France par l'UE pour
l'ouverture à la concurrence et cela touchera tous les services publics. L’État
a toujours empêché l'EDF de faire payer le kWh à son véritable coût, d'où une
situation déficitaire, et quand auparavant EDF faisait des bénéfices, l’État le
lui prenait pour se renflouer.
Enfin je me permets de
rappeler qu’un réacteur EPR, type Flamanville, de 1650MW produit en continu la
même quantité de kWh que 2690 éoliennes de 2MW. En plus ces dernières produisent
d’une façon intermittente et aléatoire, et demandent des énergies pilotables
pour répondre à la consommation. Les relevés sur les 3 derrières années publiés
par RTE montrent que 1 kWh d'EnRia, implique un complément en gros de 1kWh
d'énergie thermique. Ceci est aussi vérifiable sur les chiffres de production publiés
en Allemagne et en Belgique. C'est la raison pour laquelle on veut une centrale au
gaz à Landivisiau contestée par les écologistes. Pour les fermes de centaines
d'éoliennes dans les plaines de l'Allemagne de l'Est, je vous conseille d'aller
voir. Avec les centrales thermiques adjointes, l'air est irrespirable.
C’est aussi pour cela que l’Allemagne n’arrive pas à diminuer son bilan carbone
dans la production d’électricité. Il faut enlever toutes les illusions des écologistes
purs que
je respecte : « les EnRia ne peuvent pas diminuer la
production de carbone par suite de leur dépendance aux conditions de vent et de
soleil, ces énergies intermittentes et aléatoires demandent obligatoirement l’association
avec les énergies thermiques pilotables mais polluantes ». La régulation
rapide du réseau en 20 minutes, par les réacteurs nucléaires équipés pour cela,
est une action qui dégrade leur efficacité énergétique et augmente leur
vieillissement et les risques. L’importance des EnRia dans la production française
est publiée en GW, unité de puissance électrique, ce qui multiplie par plus de
4, l’idée fausse de leur présence réelle dans la production en kWh, et influe
donc l’opinion publique. On a une production électrique des EnRia de seulement 8%
en 2017, production presque totalement exportée dans des
conditions de vente en moyenne très inférieures au coût du kWh de ces énergies.
La conclusion, tirée simplement
des chiffres publiés, est que non seulement les EnRia ne peuvent pas participer à la « décarbonisation », par suite du
pilotage thermique obligatoire mais ils augmentent indirectement la pollution
des
vrais polluants émis par les énergies thermiques, même si les centrales à gaz
sont moins polluantes. On peut bien sûr agiter en permanence les grands
accidents de Tchernobyl et de Fukushima, en oubliant d’ailleurs que
ce dernier est dû principalement au tsunami de Tōhoku dont la vague de 30 m de
hauteur a tué par elle seule plus de 18.000 morts ou disparus. C’est cela la
vraie catastrophe humaine car pour la ville de Fukushima, il n’y a pas eu de
morts réellement déclarés pour cause de radioactivité. C’est une catastrophe
économique,
un déchirement social dû au déplacement de populations pour éviter les risques,
mais la vie normale reprend progressivement partout.
Enfin on peut constater que
l’Allemagne est encore loin d’avoir supprimé ces énergies polluantes en
ajoutant du gaz et des bioénergies polluantes pour 26% d’EnRia alors que
les seules centrales thermiques à base de lignite, les plus polluantes, représentent
24% de la production totale. L’Allemagne reste l’un des pays les plus polluants
avec la Pologne et le restera encore longtemps avec un coût du kWh l’un des
plus élevés d’Europe. C’est une véritable désinformation de la citer comme
modèle, le coût du kWh est élevé, les EnRia augmentent indirectement la
pollution totale, et l’Allemagne devient le pays le plus exportateur d’électricité.
Mais c’est une électricité provenant des EnRia, de mauvaise qualité, intermittente
et aléatoire, dont l’Allemagne doit se débarrasser à tout prix au risque de déstabiliser
le réseau européen et nous plonger dans le black-out.
Évidemment ceci ne convaincra pas
les écologistes idéologues mais je ne désespère pas pour les autres. Arrêtons
la gabegie du plan énergétique, il y a tant à faire dans l’écologie par
ailleurs.
La France comme dans d’autres domaines se laisse guider par l’Allemagne
Dans une politique énergétique la poussant hors du nucléaire.
Ceci veut dire à terme que
l’Allemagne avec le gaz russe
Va rendre la France dépendante pour son électricité.
Les bons sentiments écologiques sont exploités
Pour nous déposséder d’un atout majeur.
Claude Trouvé
08/06/18
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