Le
Président et le Premier Ministre ont prononcé leur discours de politique
générale, le quinquennat est lancé, enfin plutôt piano. On attendait le Renouveau,
le Printemps, et on est déjà à l’automne où on nous annonce l’hiver. Adieu
veau, vache, cochon, couvée, le gouvernement précédent a laissé une ardoise…
imprévue. Même le Ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, n’en savait rien, c’est
dire ! Du coup c’est quatre milliards qu’il faut trouver pour passer un
poil au-dessous du 3% du PIB en 2017, le feu rouge auquel tient Bruxelles… en
la personne de Moscovici, l’ancien ministre des Finances qui a redressé la France
et laissé tomber Cahuzac dans la fange. Car les ordres viennent désormais d’en
haut. Notre indépendance est devenue la liberté de pouvoir faire ce que l’on
veut, du moment que Bruxelles y consent. Alors les grandes envolées lyriques se
perdent dans l’abandon de la taxe d’habitation, reportée à plus tard, c’est-à-dire
sine die, et la taxation progressive du paquet de tabac à 10 euros continue. Les
buralistes étrangers frontaliers se frottent déjà les mains. C’est la recette
habituelle de l’impact sur la santé qui sert de support à la taxation, comme la
démocratie pour la guerre en Syrie. A cette allure on peut s’attendre à la taxe
sur le cannabis mis en vente libre.
Report
de suppression de taxe, augmentation de taxes existantes, et promesses du style
« demain, on rase gratis » fleurissent dans un discours qui sent le
rance : « d’ici la fin du
quinquennat, tous les Français auront accès à des offres de soins sans
aucun reste à charge pour les lunettes, les soins dentaires et les aides
auditives ». Dans le domaine des promesses qui n’engagent que ceux qui les
écoutent, on trouve « Les contribuables
ne seront pas la variable d’ajustement du budget », la « pression fiscale
baissera d’un point de PIB d’ici à 2022 et la dépense publique de trois points
de PIB sur la même période. » On note aussi le retour à l’équilibre du
budget de la Sécurité Sociale d’ici 2020. On peut s’attendre, comme d’habitude
à une baisse des remboursements. D’ici la fin du quinquennat, comme pour le
précédent, des écarts budgétaires auront eu le temps de se faire jour et justifier
un report… salutaire.
On
ne prévoit pas de hausse d’impôt mais la hausse de la contribution sociale
généralisée (CSG) est confirmée. Ce n’est pas un impôt, c’est une taxe comme
sur le tabac, l’alcool, le carburant, l’électricité. L’impôt a mauvaise
réputation mais la taxe est beaucoup moins traumatisante, et surtout a des
domaines d’application sans fin. Bercy a tout compris et notre portefeuille
aussi. Quand l’Etat dépense trop, le consommateur est toujours la vache à lait.
Mais là on a un véritable tour de passe-passe qui en dit long sur les ressorts
de la politique française dans le carcan de l’UE. L’UE demande le blocage des
hausses de salaire. Si cela est possible sans trop de récriminations chez les
salariés du public, qui viennent d’avoir une augmentation, cela apparaissait
beaucoup plus à risque de grèves violentes chez les salariés du privé. Alors on
va opérer par la technique des vases communicants. On prend de l’argent aux
retraités, peu enclins à manifester, pour le reverser aux actifs. Il s’agit d’une
augmentation de salaire des actifs par les retraités qui en tant qu’actifs
avaient payé pour les retraités. C’est le principe de la double peine. De plus
tout ceci risque fort de se terminer non pas par un allègement des cotisations
sociales payées par le salarié mais de celles payées par l’entreprise pour le
compte du salarié.
Évidemment il faut ajouter du social au libéralisme en s’appuyant sur le côté bonne âme
des petites gens, d’autant plus que cela était prévu par presque tous les
partis. Le relèvement de l’allocation aux handicapés, du minimum vieillesse à
800 euros, et l’amélioration du congé maternité et les solutions de garde
d’enfant, tiennent une bonne place dans le panel social. On joue aussi sur l’écologisme
qui a bonne presse pour se faire de l’argent avec d’une part l’accélération de
la « montée en puissance de la fiscalité
carbone », et d’autre part la convergence entre la fiscalité du diesel et
de l’essence « avant la fin de la
mandature », en 2022. Au passage l’augmentation des puissances installées
des Énergies renouvelables intermittentes entraînant une augmentation de la
production thermique, ceci se traduira par une augmentation du kWh pour le
consommateur. On voit aussi que les petites gens que l’on a poussées à acheter
du diesel et qui ne peuvent pas changer leur véhicule n’auront que leurs yeux
pour pleurer et on leur interdira même les grandes zones urbaines.
On
constate déjà que le volet social ne va pas très loin et se concentre sur ce
qui marque l’opinion, car la femme âgée solitaire, qui vit péniblement de sa
retraite même revalorisée, ne pensera pas Printemps si la CSG l’atteint, si
elle doit se priver de certains médicaments, et si elle doit en plus payer plus
cher son électricité. Les retraités, les automobilistes, les indépendants avec
la suppression du RSI sont dans le collimateur, car ils ont peu de poids dans
la contestation. Il risque à contrario de se passer un retour de bâton du côté des
entrepreneurs et des investisseurs car l’allégement de l’impôt sur la fortune
et la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE)
en allégement de charges sont reportés en 2019. Le report sur le crédit d’impôt
est particulièrement préjudiciable aux entreprises car elles avaient tenu
compte de cet allègement des charges dans leurs prévisions. Tout se jouera
alors pour eux sur la loi travail et les négociations seront plus dures.
On
notera le silence de Philippe sur la politique migratoire, dont on sait qu’elle
appartient désormais à l’UE mais les zones d’accumulation à Vintimille et à
Calais n’ont pas été évoquées alors que les incidents se multiplient. Les
actions sur la justice sont largement en dessous des besoins avec 15.000 places
de prison sur le quinquennat alors que 40.000 sont déjà nécessaires et les propos
tenus sur la loi quinquennale de programmation des moyens de la justice sont de
la bouillie pour les chats : « Cette
loi permettra à la garde des sceaux d’engager un vaste mouvement de
dématérialisation, de simplification et de réorganisation. » Plus
intéressant est le couplet sur la réforme sur l’Éducation Nationale pour une
mise en œuvre complète en 2021 : « Une
concertation sera lancée dès la rentrée prochaine, pour resserrer les épreuves
finales autour d’un plus petit nombre de matières et définir ce qui relève du
contrôle continu. » Pour une fois on se donne le temps jusqu’en septembre
2018 et on n’a pas des solutions toutes faites d’avance.
Par
contre il y a beaucoup à dire sur la suite des propos pour après le bac : «
Nous dépensons bien plus que les autres
pays pour le lycée, notamment parce que notre système est rigide et conçu
autour du baccalauréat, mais nous conduisons 60 % – 60 % ! – de bacheliers à
l’échec en licence ! » Dans les années 50 le taux de réussite en première
année de faculté en mathématiques était de 33%, soit 67% d’échec après un bac
qui sélectionnait 42% des lycéens. La baisse du niveau du bac pour atteindre
80% de reçus ne doit pas se perpétrer par un abaissement du niveau de la
licence pour relever le pourcentage de reçus. Pour la filière professionnelle
on ne semble pas avoir encore pris en compte que celle-ci doit s’ouvrir dès l’âge
de 12 ans où les enfants doivent avoir acquis les connaissances de base qui
leur permettent d’exercer un métier et d’avoir accès ensuite à des
enseignements pour adultes.
La
seule évaluation des dépenses de ce programme politique est centrée sur le gros
paquet de 50 milliards mis en œuvre pour la transition écologique, la santé,
les transports, l’agriculture et la modernisation de l’État sur le quinquennat.
On aurait aimé que soient précisés les investissements sur les énergies
renouvelables qui étaient à hauteur de 10 milliards par an dans le précédent
plan énergétique. Il ne resterait pas grand-chose pour le reste. Le plus
étonnant est que c’est l’économiste Jean Pisani-Ferry, conseiller de M. Macron
durant la campagne, qui en aura la charge. On n’aurait pas confiance en Hulot
et ses trois secrétaires d’Etat ? A ce propos le gouvernement s’est couché
à Bruxelles, sous la pression allemande, et a donné son aval au projet très
controversé de la Commission européenne sur la définition réglementaire des
perturbateurs endocriniens (PE), ces substances chimiques, omniprésentes dans
l’environnement humain, qui représentent un enjeu sanitaire majeur. Je croyais
que Hulot était intransigeant quand il s’agissait de la santé. L’Europe qui
protège ne protège que les lobbies !
Il n’y
a rien de nouveau dans ce discours de Philippe, sinon un nouveau tour de vis et
le respect des directives de Bruxelles. Nous ne saurons qu’en septembre si le
budget 2018 a reçu un avis favorable de Bruxelles. Mais la rentrée risque d’être
chaude car les premières lois vont en faire déchanter plus d’un. Le Printemps
est derrière nous. En attendant les soubresauts sociaux, l’état d’urgence va
passer dans la loi, donc se pérenniser. Notre liberté ne peut qu’en être
définitivement restreinte.
Pas de Renouveau en vue, pas plus de
Printemps précoce,
Notre nouvelle Assemblée est conviée au
même festin
Celui d’un programme qui sent le rance,
et le moisi
Sous la vraie houlette du triumvirat
USA-UE-BCE
Pour le plus grand bien des seuls puissants
Pour qui le peuple compte pour rien
Et ceux qui ne travaillent plus
Pour moins que rien !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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