De toute évidence le
français moyen ne s’intéresse à la géopolitique que lorsqu’il en constate les
effets sur sa vie quotidienne. Il lui paraît évident que cela est l’apanage du
gouvernement et, d’une façon moins claire, des représentants du peuple. En
réalité les commentateurs politiques, qui prennent la parole dans les médias et
surtout les télévisions, façonnent ce que le peuple a à en connaître, et en
présentent une facette qui va toujours dans le sens du politiquement correct. C’est
ainsi que nous avons eu une campagne pro-Obama qui a soulevé l’enthousiasme de
nos concitoyens. L’homme de paix et de l’Obamacare s’est transformé en homme de
guerre et a accouché d’un système couteux que les américains « de rien »
jugent inefficace et inégalitaire. On a assisté aussi à une stigmatisation en
règle du président syrien, le boucher qui extermine son peuple, pour aboutir
prochainement à une réunion de cessation des hostilités en présence du
proscrit. Celui-ci n’aurait pas résisté à cette attaque de la coalition
occidentale s’il n‘avait pas eu le soutien de la grande majorité de son peuple.
On a aussi vu l’attaque en règle contre le candidat Donald Trump, un rustre mal
coiffé, grossier, inexpérimenté et dont les compétences étaient si faibles que
les Etats-Unis couraient à leur perte. Par contre Hillary Clinton était portée
aux nues. Les révélations sur les Clinton ont terni leur image et finalement
Macron déroule le tapis rouge à Trump et lui tape dans le dos. Tout-à-coup la
presse met des sourdines sur Trump et se borne à le traiter de
climato-sceptique tueur de l’humanité, pour faire plaisir à notre Président.
On a eu l’anti-Brexit avec l’assommoir
du catastrophisme relayé abondamment par les médias et des « experts »
nous annonçant la perte du pouvoir d’achat, la dette qui s’envole, la
dévaluation au cas où nous aurions la malencontreuse idée de « Frexiter ».
La Banque d’Angleterre et même Obama voyaient le malheur s’abattre sur les
Britanniques. En décembre, la Banque d’Angleterre admettait que tout cela se
passait beaucoup mieux que prévu et le FMI augmentait la prévision de
croissance du Royaume-Uni pour 2017. « Cela
ne prouve rien, car le Brexit n’est pas acté dans l’UE pour l’instant »
disent les déçus du côté des français souvent proches des milieux bancaires. On
espère toujours déshabiller la City de ses banques. A part HSBC la France fait
chou blanc, Francfort fait mieux. On va donc leur donner des conditions plus
favorables encore…
Après le référendum
du 23 juin 2016 le Royaume-Uni a procédé en un peu plus d’un mois à une
dévaluation de 11% par rapport au dollar pour revenir à -3% aujourd’hui. Dans le
même temps l’euro était à 0,832£ le 20 juillet 2016 et est à 0,897£ le 20
juillet 2017 soit 4% de plus. Donc par rapport au dollar et à l’euro, la Livre
a perdu 3 à 4%. C’est peu et c’est profitable à son économie. Le PIB/habitant
du Royaume-Uni pour le premier trimestre 2017 est de 8700 euros, celui de la France
de 8400 soit 3,5% plus bas... juste le décalage des monnaies comme par hasard.
Au quatrième trimestre 2016 le chômage était de 10% en France et de 4,7% au RU.
Si la situation financière des consommateurs au cours des derniers mois s’est
améliorée en Allemagne, elle s’est dégradée en France et est restée
pratiquement stable au RU selon Eurostat. Côté balance des paiements durant le
premier trimestre 2017, l’Allemagne engrange 65,9Mds€
pendant que le RU en perd 19,3 et la France 20,3. Il serait donc bien
prétentieux de dire que la Livre défavorise le RU par rapport à la France et
son euro. Le problème est ailleurs et montre bien que l’Allemagne pompe sur le
reste de l’UE mais le plus inquiétant pour nous est que l’Espagne ne perd que
0,9Mds€ et
l’Italie gagne 5,5 Mds€. Au lieu de se moquer de la décision
britannique, nous ferions mieux de penser que notre situation est moins bonne que
le RU et que le tandem France-Allemagne est bien boiteux.
Si le RU a choisi de sortir
de l’UE c’est un signe que celle-ci n’apparaît pas ou plus comme une
institution lui apportant une meilleure vie. Les Britanniques ont alors souhaité
un retour sur l’intérêt d’avoir des frontières maritimes plus hermétiques que
les frontières terrestres. Le laxisme en matière migratoire, dont ils ont fait
preuve avec les conséquences d’une pénétration musulmane importante, les a conduits
à s’inquiéter de la présence d’un flux incessant en France prêt à se déverser
chez eux. Mais il y a une autre raison profonde, c’est l’obligation faite de se
conformer au droit européen. Non seulement c’est le signe ultime de la
dépendance à l’UE, mais en plus les bases de ce droit sont différentes du droit
britannique. Ce n’est pas par hasard que ce soit le premier sujet qui fasse
débat lors de la deuxième réunion des négociations RU-UE à propos des
ressortissants du continent présents dans ce pays et au sujet de leurs droits.
Le RU ne peut accepter que le droit européen interfère sur le droit britannique
sur son sol et propose une loi garantissant les droits des ressortissants
européens. Le RU ne lâchera pas sur ce point.
Trois grands axes de
discorde sévissent dans l’UE. Le premier axe est la mutualisation de la dette
des pays de l’UE qui se heurte à une opposition farouche de l’Allemagne.
Celle-ci s’estime la plus vertueuse et ne veut pas payer pour les autres. Les
discussions sur l’Europe à deux vitesses ne sont que le résultat de ce constat
d’éloignement progressif entre l’UE du nord et celle du sud. Le deuxième axe de
discorde est lié au flux migratoire, aggravé par l’ingérence de la coalition
occidentale au Moyen-Orient et le colmatage démographique de la chancelière allemande.
Un certain nombre de pays de l’Europe de l’Est et Centrale, comme la Hongrie et
la Pologne, manifestent une opposition farouche à un quota de réfugiés imposé
par l’UE, voire ferment leurs frontières. Le troisième axe de discorde concerne
le lien militaire avec l’OTAN et spécifiquement avec les Etats-Unis. Il oppose
désormais un bloc de l’Est, soucieux de présenter une solide défense en face de
la Russie, ennemi historique dont l’OTAN amplifie la menace avec l’aide de l’UE,
à une UE de l’Ouest moins préoccupée. Ce bloc nourrit une volonté d’indépendance
économique à base de pipelines nord-sud dans le groupe des Trois Mers, Mer
Baltique, Mer Noire et Mer Adriatique de façon à disposer d’une indépendance
énergétique face à la Russie.
Alors qu’une crise
financière majeure, avec un crash systémique bancaire pire qu’en 2008, se
rapproche sans que l’on puisse encore savoir si la situation actuelle peut
tenir encore un an, l’UE ne présente plus un front uni et au fond chacun essaie
de se regrouper dans des sous-ensembles qui ne peuvent que générer un
tiraillement condamnant l’UE actuelle. Celle-ci n’a pas d’autre politique
étrangère que celle calquée sur l’OTAN et elle est poussée à son extension
jusqu’aux frontières de la Russie. Il faut récupérer l’Ukraine et la Géorgie,
puis vendra le tour de la Biélorussie et de la Moldavie. Elle délègue le couple
franco-allemand, sous contrôle des États-Unis, pour faire partie des suites de
l’accord de Minsk en fermant les yeux sur toutes les violations de ces accords
par Porochenko. L’UE de l’Est soutient une telle orientation qui n’a pas d’intérêt
économique majeur si ce n’est de contrôler les pipelines acheminant le gaz et
le pétrole russe et de profiter de celui du Moyen-Orient. Tous ces pays sont un
poids économique pour l’UE, une menace migratoire qui pèse de plus sur l’emploi
dans ses pays de l’Ouest. Les États-Unis ne voient plus dans l’UE qu’un glacis
économique et militaire, et ils se satisfont désormais d’un non-aboutissement
du fédéralisme européen. Des sous-ensembles européens toujours orientés vers la
disparition des nations leur convient, car ils seront encore plus faciles à
manipuler.
La politique américaine
privilégie les accords économiques et militaires au-delà de toute idéologie
démocratique. Elle veut le TAFTA, bien préparé par le CETA, et une implantation
de ses soldats, de ses chars et de ses missiles au plus près de la Russie. Une
très grande opération de manœuvres OTAN vient de se terminer sur un front
allant des pays baltes à la Roumanie avec l’invitation de… l’Ukraine et de la
Géorgie ! Ces exercices axés sur le Danube réunissaient 25000 hommes dont
14000 soldats américains. La base roumaine « MK », Mihail Kogalniceanu, a été réaménagée
grâce aux fonds de l’initiative américaine de réassurance européenne dont le budget
atteindra en 2018, 4,8 milliards de dollars, un budget en forte hausse, sur décision
du président américain Donald Trump. Mais la politique américaine ne s’arrête
pas là. Les navires de guerre américains frôlent en permanence les eaux territoriales
chinoises en particulier auprès des îles contestées par plusieurs pays.
Mais leur nouvelle
réorientation vers l’Afrique est en cours et nous intéresse directement. Les
forces américaines interviennent dans la zone Mauritanie, Mali, Sahel sans que
l’on perçoive une véritable coopération avec la France. Les États-Unis ont
compris que la face ouest de l’Afrique était proche des États-Unis par la mer
et que sa face Est l’était des champs pétrolifères du Moyen-Orient. De plus l’Afrique
du nord au sud est riche en pétrole, diamant, or et minerais divers. On peut totalement
la contourner par voie maritime. Les États-Unis ont donc disposé trois forces
maritimes sur son pourtour. L’une est en Méditerranée pour contrôler le
Moyen-Orient et ses richesses pétrolières, une autre à la corne orientale de l’Afrique
pour contrôler aussi le passage du détroit d’Ormuz et les échanges pétroliers,
et la dernière au large de la côte ouest de l’Afrique proche des richesses
minières et pétrolières. Il est à noter que les chinois créent aussi une base militaire
près de Djibouti. L’effort sur l’Afrique fait par les américains, et la
présence de plus en plus importante des chinois doit montrer à la France que
son avenir se joue là-bas où son histoire lui avait donné des longueurs d’avance.
L’arrivée des églises protestantes baptistes des américains peuvent d’ailleurs nuire
au développement de la francophonie. La France est à l’angle des trois
continents, Europe-Asie-Afrique, reliés par voie terrestre, et son destin est donc
autant vers l’est que vers le sud. Ce bloc possible fait peur aux États-Unis
qui feront tout pour l’empêcher de se tisser des liens forts. La France n’en a
toujours pas pris conscience.
On ne bâtit pas un grand pays sans de solides projets géopolitiques.
On ne bâtit pas une politique étrangère pour le bien du peuple
Dans les bras d’un puissant qui tôt ou tard nous étouffera.
Le Royaume-Uni a retrouvé le vent du grand large
Il s’arme pour affronter seul les tempêtes.
La France au chaud dans la cambuse
Ne voit pas couler son navire
Dont la chaloupe est…
Pour son Chef !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du
Languedoc-Roussillon
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire