Le roi Abdallah d’Arabie Saoudite vient de
décéder à 90 ans et le Président Français s’est précipité des neiges de Davos
pour présenter au moins ses condoléances attristées au nouveau roi Salman bin Abdulaziz al Saud, le demi-frère
du précédent. Pratiquement au même moment 9 militaires français de l’Armée de l’Air
périssaient dans un horrible accident sur une base espagnole de l’OTAN. Ces
deux faits étalés sur une courte période de temps incitent à la réflexion car
deux des aviateurs français faisaient partie de l’élite de l’aviation de guerre
et étaient destinés à devenir des leaders de mission. Nos avions sont en Irak
où ils renseignent et bombardent aux cotés des saoudiens.
Premièrement cet accident, le plus meurtrier de l’histoire
de l’OTAN, peut prêter à hésitation entre l’accident dû au hasard malheureux de
guerre et l’accident provoqué. Le silence politique et médiatique tranche avec
le tapage fait sur les attentats des 7-8 janvier, en particulier sur Charlie
Hebdo. Le fait qu’il s’agit de militaires est considéré comme les risques du
métier. On a pourtant vu des rapatriements de militaires tués et des cérémonies
plus médiatisées, et des discours politiques beaucoup plus diserts. Evidemment
il s’agit de ne pas trop alerter la population française sur notre intégration
dans l’OTAN et notre engagement en Irak si l’on veut poursuivre tranquillement
cette opération. Certains détails révélés sur l’accident d’aviation et la
discrétion politique autour de lui laissent cependant un certain nombre d’interrogations.
N’oublions pas que nous sommes en guerre, comme l’affirme
Manuel Valls et que nos opérations sur l’Irak se font de concert avec les
partenaires de l’OTAN, USA en tête, mais aussi avec l’Arabie Saoudite et Israël.
L’ennemi déclaré est l’Etat Islamique bien que les avions US bombardent la
Syrie et que nous sommes prêts à nous y joindre depuis que notre président Hollande
ronge son frein. Al-Qaïda est partie prenante ainsi qu’Al-Nosra dans la guerre
contre les puissances occidentales, et nourrit les attentats dans notre pays.
Nous devons donc nous attendre à tout, même au sein de l’Armée. Le Moyen-Orient
est un foyer de guerre dans lequel se mêlent des intérêts divers où les guerres
d’influence religieuse, la mainmise sur le pétrole et l’affrontement avec la
Russie en sont les composantes.
Commençons par la composante géopolitique apparemment
la plus claire, celle qui lie la mouvance chiite, Iran, Hezbollah, Syrie et
Russie. Il s’agit d’un axe qui traverse l’Irak et qui lie une composante
religieuse avec le soutien russe. Les liens entre l’Iran et la Russie se resserrent
sur le plan économique et géostratégique. Il n’est pas question pour la Russie
de laisser les USA faire en Syrie ce qu’ils ont fait, sans nous d’ailleurs, en
Irak sous la présidence de Bush. Rien que la possibilité de pouvoir lancer leur
marine militaire sur la Méditerranée à partir de Tartous suffirait à comprendre
leur volonté de soutenir Bachar el-Assad. Par contre la position des chiites au
pouvoir à Bagdad oblige l’Iran à les soutenir contre les sunnites de l’EI dans
une position qui ne manque pas d’ambiguïté.
Par contre la composante géopolitique des
adversaires de l’EI est beaucoup plus complexe. S’il y a apparemment accord au
sein des pays de l’OTAN engagés sur l’Irak, il faut noter la position particulière
de la Turquie. Elle s’oppose aux kurdes en alimentant les forces de libération
de la Syrie et par là-même l’EI, en servant de base de repli et de transit d’armes
et d’argent, alors que les forces de l’OTAN évite toute attaque contre les
kurdes irakiens qui servent de frontière aux avancées de l’EI au nord. Par contre
l’Arabie Saoudite joue un double jeu au vu et au su de tous en soutenant financièrement
l’EI sunnite pour son combat contre les chiites et en participant en même temps
aux frappes aériennes sur lui avec l’OTAN. Si l’on ajoute la Jordanie qui sert
de pays d’entraînement des mercenaires qui opèrent sur le terrain en Irak
contre l’EI et la lutte d’Israël contre l’axe Hezbollah-Iran, on voit que le
Moyen-Orient est un melting-pot géopolitique où personne ne joue franc-jeu.
Cela peut même aller plus loin. La
guerre contre l’Etat Islamique ne peut se terminer que par l’envoi de troupes de
l’OTAN au sol. Le blanc-seing de l’ONU ne peut s’obtenir à cause de l’opposition
russe et chinoise au Conseil de Sécurité, mais nous avons depuis la Libye pris
l’habitude de passer outre. Par contre les opinions politiques, américaines en
particulier, peuvent créer des difficultés insurmontables. Si l’on part de l’idée
que la guerre frontale ne peut se terminer par une victoire nette sur le
terrain, une autre stratégie est en train de s’élaborer. C’est celle du ventre
mou d’un Etat Islamique enfermé dans une nasse empêchant son extension. L’idée
serait concoctée par un axe Washington-Riyad-Tel-Aviv. Contrairement à ce qu’on
dit sur l’antagonisme entre Israël et l’Arabie Saoudite, il ne faut pas oublier
qu’ils ont un ennemi commun, le chiisme pour Riyad la Mecque du sunnisme, donc
l’Iran pour Israël. Les ennemis de mes ennemis sont mes amis.
Israël joue un jeu complexe dans le but d’éliminer
la Syrie de Bachar el-Assad pour couper l’axe chiite Liban-Iran. Selon un
journal libanais : «Nous savons qu’Israël accueille des blessés
d’al-Nosra dans ses hôpitaux pour les renvoyer ensuite au combat». Ce groupe est pourtant l’auteur des plus
sanglantes tueries. Si l’EI est circonscrit, il est facile de prévoir que des
négociations s’engageront avec ses chefs. L’argent fera son œuvre et ce ventre
mou sunnite coupera l’axe chiite à la grande satisfaction des USA, d’Israël et
de l’Arabie Saoudite. Est-il possible qu’une telle tactique puisse germer dans
l’esprit de Washington et de son satellite israélien ?
En 2005, l’ex-ministre britannique des Affaires
étrangères, Robin Cook, avait écrit dans The Guardian : «Dans
les années 1980, [Oussama Ben Laden] était armé et financé par les Saoudiens
pour déchainer le djihad contre l’occupation russe en Afghanistan. Al-Qaïda
[sic], littéralement “la base de données”, était initialement le nom du fichier
informatique contenant les noms des milliers de Moudjahidins recrutés et
entrainés avec l’aide de la CIA pour aller se battre contre les Russes. »
Vous voyez que tout est possible. Si l’on ajoute à cela que l’Arabie Saoudite a
eu des liens très forts avec Al-Qaïda et que, selon mes informations personnelles,
Ben Laden est mort d’urémie en Arabie Saoudite, on a de quoi ne s’étonner de
rien. N‘oubliez pas que l’Armée obéit et qu’on la nomme la Grande Muette… mais
nos soldats, pères, mères et enfants, meurent pour elle !
La France
n’est plus maîtresse de sa politique budgétaire, elle mendie.
La France
n’est plus maîtresse de sa politique étrangère, elle suit.
C’est peut-être la Grèce qui lui rendra
son identité
Beaucoup mieux que Charlie Hebdo !
Claude Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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