dimanche 4 janvier 2015

Celui qui croyait prendre, pourrait bien être pris !



La guerre USA-Russie est ouverte au moins depuis que les Occidentaux soutiennent et arment les rebelles syriens, eux-mêmes phagocytés par les djihadistes de l’Etat Islamique aidés par la Turquie pour réduire les kurdes. En attaquant finalement l’Etat Islamique, tout en procédant à la destruction de l’économie syrienne par des raids aériens qui ne font guère de distinctions sur les hommes visés sur le terrain et imbriqués dans les combats, les USA et leurs amis occidentaux ont directement visé la Russie, partenaire de la Syrie avec son port de Tartous sur la Méditerranée. Cette ouverture sur les mers du sud fait partie intégrante de la géopolitique russe, géopolitique ancestrale. Le soulèvement largement aidé de la place Maïdan contre le régime ukrainien, la mise au pouvoir d’un Président par une assemblée terrorisée par les groupes néo-nazis et par les alliés occidentaux, président largement contrôlé par des ressortissants américains, ont déclenché une révolution pro-russe et une répression qui ensanglante le pays.

La manœuvre avec la main tendue de l’Europe à l’Ukraine pour l’intégration à l’UE et le traité d’assistance de l’OTAN conclu avec les USA, tend à séparer ce pays de l’orbite économique russe et à implanter l’OTAN à la frontière de celle-ci. Cette approche militaire des frontières russes est aussi insupportable pour ce pays que les missiles à Cuba pour les américains. Ces derniers continuent d’ailleurs à « s’intéresser » aux « printemps de la liberté » dans le monde asiatique, comme à Hong-Kong et à Moscou récemment, suivant sa stratégie du chaos dont le premier volet est le pourrissement intérieur social et économique. Pour compléter l’action extérieure actuelle, une attaque spéculative sur le rouble a été propulsée alors qu’une baisse du pétrole simultanée a été observée sous la pression de l’Arabie Saoudite. 

Mais tout ne se déroule pas comme prévu, la Russie permet à Bachar el-Assad de ne pas plier, empoche sans coup férir la Crimée volontaire pour l’annexion, et aide les pro-russes ukrainiens à bloquer la reconquête de la partie Est du territoire ukrainien par le pouvoir central tant que des concessions majeures d’autonomie n’ont pas été obtenues. La réaction russe a été cette fois très rapide après avoir été échaudée en laissant faire l’intervention en Lybie. L’attaque spéculative sur le rouble a affaibli celui-ci de 45% par rapport à l’euro mais il était surévalué de 15%, la chute n’est en fait que de 30%. Mais surtout la Banque centrale russe a racheté des roubles par l’intermédiaire de la Chine, le rouble et le yuan renminbi étant liés à parité constante. Par ailleurs la Chine a montré qu’elle ne laisserait pas s’écrouler le rouble en mettant ses réserves de 4.000 milliards dans la balance. La chute du rouble de 30% est en réalité que grossièrement l’impact de la baisse du pétrole à 55$ le baril, pétrole et gaz dont dépend fortement l’économie russe.

Si l’aide aux rebelles syriens réduit la Syrie à une immigration massive, à une économie exsangue et à une partition de fait du territoire, Bachar el-Assad, démocratiquement élu, est toujours là et toujours soutenu par le peuple. Si la menace de l’OTAN est présente en Ukraine, la Crimée s’est ralliée à la Russie et n’en sortira plus, et l’Ukraine ne pourra continuer à exister sans lâcher une grande indépendance à la Novorussia de l’Est. Si l’attaque contre le rouble affaiblit l’économie russe, elle est désormais bloquée. Si la baisse du pétrole diminue les rentrées de devises, curieusement les pétroliers russes ne s’affolent pas et Poutine ne prend pas contact avec l’Arabie Saoudite pour qu’ils agissent ensemble pour relever le prix du baril. Tiens ? 

Si les Etats-Unis se sont mis d’accord avec l’Arabie Saoudite pour mettre la Russie en difficulté, celle-ci ne semble pas crier au loup, par contre l’huile de schiste beaucoup plus chère à l’extraction que le pétrole saoudien et même russe va mettre en difficulté tous les producteurs américains. Ces derniers ont souvent investi en empruntant pour l’achat des terrains et l’investissement en matériel d’exploitation, or à 55$ le baril ils produisent à perte. La première année d’extraction le coût est de l’ordre de 60$ mais il augmente rapidement avec le temps, l’extraction devenant de plus en plus difficile, et atteindre 80 voire 100$ le baril. On peut donc penser que de nombreuses faillites vont se produire dans les prochains mois. Si c’est les Etats-Unis qui ont lancé cette chute du prix en accord avec l’Arabie Saoudite, ils ont bien mal joué, car le retour économique et social va leur faire du mal rapidement, d’autant plus que la légère embellie de la croissance américaine est largement liée à l’autonomie pétrole de l’huile de schiste. Ce que j’avais déjà fait remarquer.

Une autre hypothèse est possible, l’idée ne serait pas américaine mais russe et saoudienne. N’oublions pas qu’un accord existe entre les Etats-Unis et l’Arabie Saoudite stipulant que cette dernière assure l’approvisionnement des Etats-Unis et qu’en contrepartie ceux-ci garantissent la protection de l’Arabie Saoudite. S’ajoute à cela la contrainte de la vente du pétrole en dollar qui a été imposée en plus à l’OPEP grâce à l’Arabie Saoudite, contrainte devenue la pièce maîtresse de l’hégémonie américaine. Or l’autosuffisance américaine en pétrole change la donne. L’Arabie Saoudite perd le marché américain sauf si le prix du marché met le pétrole américain en difficulté. Des trois producteurs, Etats-Unis, Arabie Saoudite, Russie, le plus handicapé est le premier ! 

Cela expliquerait l’apparent dos rond russe à la baisse du pétrole. La Russie attendrait que la production américaine s’effondre, ce qui pourrait se produire assez vite dans le premier semestre 2015. Il lui faudrait tenir jusqu’à ce que l’effet sur les USA se produise mais l’impact pour elle serait moins important sur cette durée et son pétrole serait toujours payé en dollars. Ensuite il suffirait de faire remonter les cours vers 80$ pour que les dollars affluent de nouveau chez les pétroliers russes et saoudiens alors que les USA ne seraient plus auto-suffisants. Poutine joue sans doute beaucoup plus fin que les Etats-Unis auquel cas l’ours russe montrerait alors un talent stratégique remarquable. 

La stratégie américaine est tellement grossière et connue 

Que ses adversaires échafaudent facilement des parades.

L’heure de l’hégémonie américaine est en phase de déclin. 

Nous entrons dans la poussée d’un monde multipolaire

Où les risques d’affrontement se multiplient ! 

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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