Après la loi sur la déchéance de
nationalité, la prolongation de l’état d’urgence et le flux migratoire sur
Calais on pouvait espérer une pause dans la fébrilité gouvernementale. Le
clivage de la population était largement ouvert et les esprits avaient
abandonné la guerre au Mali, au Tchad, au Niger, en Centre-Afrique en Ukraine,
en Irak, en Syrie, au Yémen et en Libye où nous sommes plus ou moins présents officiellement
ou officieusement. La population finissait par revivre normalement malgré les
nombreux rappels faits sur l’état de guerre du pays. La Grèce continuait à
mourir dans des conflits sociaux de plus en plus nombreux, le Portugal et l’Irlande
étaient en difficulté, l’Italie voyait l’armée US l’investir comme la Lituanie
et la Roumanie, l’Allemagne faisait renaître des mouvements nationalistes
hostiles au flux migratoire pendant que plusieurs pays fermaient leurs frontières
et que d’autres remettaient en cause leur appartenance à l’UE. Le FMI et l’OCDE
annonçaient une situation économique grave et une baisse des prévisions de
croissance mondiale au sommet de Davos. Au fond rien qui pouvait détourner le
Président d’un voyage hautement utile aux antipodes et d’une annonce
fracassante particulièrement difficile par temps calme et périlleuse dans la
précipitation.
Tapi
dans l’ombre du Premier Ministre et de la Ministre du Travail, Lionel Macron
laissait à ses deux confrères le soin d’annoncer la bonne nouvelle d’une loi du
Travail cousue main pour le Medef donc le Haut-Patronat. On en attendait pas
moins d’un ambitieux qui avait rempli son carnet d’adresse chez Rothschild, s’y
était fait adouber et était éclos au bon moment dans la couveuse de Jacques
Attali. Tout ce beau monde a justement pour ambition de le réformer selon les
principes de la Cabale de l’argent. Nous voilà devant un nouveau clivage, un
piège pour les partis de gauche et de droite, une France des salariés révoltée
devant cette atteinte à ses salaires et à son mode de vie. Le peuple a très
vite compris que le slogan de cette loi, c’est « Travailler plus, pour
gagner moins », un remake de l’exploitation de l’homme par l’homme.
Car
enfin quel est le but économique que doit poursuivre un gouvernement ?
Maintenir ou augmenter le niveau de vie de son peuple sans creuser les
inégalités. Or il n’en est nullement question dans ce projet de loi. C’est la
plongée dans une politique de l’offre qui s’appuie sur une dévaluation interne
consistant globalement à diminuer le salaire horaire des salariés. La
diminution du chômage est considérée comme une résultante automatique. On a pu
constater que le Pacte de responsabilité et le Crédit d’impôt n’avait pas
empêcher le chômage d’augmenter et les usines de fermer, de se délocaliser et d’être
absorbées par des concurrents étrangers. Par contre les marges des grandes
entreprises ont augmenté pendant que le secteur de la construction était si peu
porteur que les architectes, comme les petits agriculteurs mettent la clé sous
la porte, à un rythme croissant.
Que
ce soit pour les agriculteurs ou pour les entreprises petites et moyennes, la
vraie difficulté tient à l’euro, surévalué par rapport à notre compétitivité. L’euro,
issu de franc, est surévalué de 35% environ par rapport à l’euromark et de 15%
par rapport au dollar selon plusieurs experts économiques. Il est illusoire de
penser qu’en jouant sur la productivité nous pourrons compenser ces handicaps.
Il reste la compétitivité par la baisse
des salaires directement ou indirectement. C’est ce qui se passe quand on
augmente la possibilité d’allonger le temps de travail au-delà des 35 heures en
baissant la compensation en salaire sur les heures supplémentaires. L’augmentation
de la flexibilité du travail ne peut avoir un impact positif réel sur le
chômage que si nous avons une compétitivité significativement améliorée mais l’accroissement
possible n’est pas de l’ordre de grandeur nécessaire.
Par ailleurs, au moment où la Suède, qui
se porte bien sur le plan de la croissance et du chômage comme je l’ai montré
dans de précédents articles, expérimente la journée de 6 heures, on voit bien
que nous allons à contre-courant. Il est prouvé que plus le temps de travail
journalier est long plus la productivité horaire diminue sans parler de l’absentéisme.
Ces facteurs peuvent donc annuler une grande partie de l’augmentation de la
compétitivité obtenue, qu’on le veuille ou non, par une dévaluation interne. De
nombreux salariés vont avoir un pouvoir d’achat diminué et consommer moins, ce
qui jouera sur la production. Il y a beaucoup de choses à revoir dans la réglementation
qui pèse sur les entreprises et particulièrement les petites, plus mal armées
pour y faire face que les grandes. Ce sont elles qui produisent le maximum des
emplois. Le Medef, qui se frotte les mains, ne les représente pas. Revoir les règlementations
du Code de Travail est un travail long et difficile qui doit se faire lentement
et dans une grande concertation du monde salarial et entrepreneurial. Dans la
précipitation et dans une pédagogie inexistante pour le présenter, le projet
final risque d’être vidé de son contenu.
On ne gouverne pas dans la précipitation
Quand on a eu quatre ans pour le faire
Sauf quand on ne pense plus
Au bien commun
Mais à soi !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire