Une
loi Travail qui s’attaque au Code du Travail mélange deux objectifs, celui de
la simplification d’abord, c’est-à-dire remplir les mêmes fonctions mais avec
plus de clarté et en moins de mots, et celui plus confus d’améliorer la
compétitivité des entreprises et le chômage. Sur le premier point, il est
évident que la précipitation avec laquelle cette loi veut être votée, ce qui
est encore loin de sa mise en application, ne peut permettre une étude longue,
approfondie et discutée avec les syndicats. Exit donc un véritable peignage de
l’existant pour le rendre plus lisible, compréhensible donc plus efficace. Sur
le deuxième point nous sommes dans le flou le plus complet, sinon que ce texte
fait la part belle à l’entreprise au détriment de la sécurité du salarié et
manque d’explications persuasives pour ce dernier. Mais il doit être abordé en
définissant clairement l’objectif. Est-ce de favoriser l'entrepreneuriat ou de
faire baisser le chômage ou les deux ? A quel prix ? Est-ce au prix
de la sécurité de l’emploi par des dispositions favorisant le licenciement
? A celui de la diminution du pouvoir d’achat par baisse moyenne de l’heure
travaillée ? Ou les deux ?
La mesure la plus
représentative de l’amélioration de la performance d’un pays est le
PIB/Habitant, car finalement travail ou pas, l’essentiel pour un citoyen en âge
de travailler c’est de pouvoir vivre correctement, et pas moins bien demain qu’aujourd’hui.
Le graphique ci-contre (données Eurostat) montre que la politique d’austérité
imposée aux principaux pays de la zone euro n’a pas amené ce que l’on pouvait
en attendre puisque, hors l’Allemagne, cet indicateur est à la baisse sur 3 ans
du quinquennat de François Hollande. Les pays hors zone euro ou hors UE, comme
le Royaume-Uni et l’Islande s’en tirent beaucoup mieux. On ne s’étonnera pas
que la majorité des italiens veuillent sortir de la zone euro. Le but de la loi
Travail, qui va dans le sens d’une exploitation plus grande des salariés, ne
peut que redonner les résultats obtenus sur 3 ans. Les chiffres de 2015,
officieux, le confirment. On peut d’ailleurs remarquer que le PIB a cru dans
les pays du sud moins vite que la population en grande partie par l’immigration
et la fécondité.
Pour
que le chômage diminue, il faut que le PIB croisse plus vite que la population
en âge de travailler. La population totale française a augmenté de 1,5% de 2011
à 2014, mais la population issue de l’immigration récente a augmenté de 2%. Or on
sait que c’est dans cette population immigrée que le taux de chômage est le
plus élevé. Il faut donc une croissance d’au moins 2% pour voir le PIB/habitant
progresser. D’après l’INSEE, le pouvoir d’achat des ménages s’est accru de 1%
au terme de ces 3 années alors que le PIB/habitant a décru de 1%. Ceci montre
que la situation ne pourra pas continuer longtemps ainsi et que le déficit du
commerce extérieur, qui intervient dans le PIB pour 50Mds€, doit diminuer. La
recette de la loi du Travail qui consiste à rendre globalement moins payée l’heure
travaillée, par la baisse du coût des heures supplémentaires, ne va déjà pas
dans le bon sens en plombant le pouvoir d’achat et par là-même la consommation
intérieure. Celle-ci se répercute sur les entreprises et la moindre demande d’emplois.
Les entreprises font moins de bénéfices ou investissent moins. La boucle est
bouclée, car même si le salarié consommateur voit une répercussion à la baisse
des prix de ses achats, celle-ci sera minime et n’impactera pas les produits
étrangers.
Mais
alors que la progression de l’automation, qui va décupler son intervention dans
le travail par l’apport d’une intelligence artificielle de plus en plus
performante au point de dépasser les capacités humaines pour certaines tâches,
les tâches offertes aux humains vont se réduire inexorablement. Une loi Travail
qui permet d’allonger la durée du travail, va déjà à l’encontre de l’embauche,
mais de surcroît ne prend pas en compte le fait de la raréfaction du travail
humain qui va se produire de plus en plus. Il est temps de penser à taxer les « robots »,
donc tout qui se substitue à l’homme à la hauteur de ce que coûte celui-ci. Au
cours du XXème siècle la machine a remplacé l’humain sur des tâches
dangereuses, fastidieuses et avilissantes. Mais, à la fin des années 1970,
l’invention de l’ordinateur personnel modifie de manière
dramatique le travail. Presque aucune tâche, manuelle ou
intellectuelle, n’est désormais à l’abri de cette « ordinisation ». De
plus, si un travail semble complexe, il est logiquement bien rémunéré : il
y aura donc une incitation financière à le remplacer par une machine. Ce
ne sont plus seulement les manœuvres qui sont visés mais les personnels
qualifiés et les cadres.
Cette
loi Travail est celle des grandes puissances de l’argent. C’est un cadeau aux
entreprises qui n’aura pas plus d’impact sur le chômage que les précédents pour
plusieurs raisons. La population, donc celle en âge de travailler, croît à un
rythme que la croissance ne peut suivre, en particulier en Europe continent à
la traîne. La baisse globale des salaires ajoutée à l’augmentation de la durée
du travail n’incite pas l’entreprise à embaucher lorsqu’elle n’a pas de
perspectives nouvelles. L’arrivée de travailleurs potentiels plus nombreux dus,
d’une part à la croissance de la population française, et d’autre part au
remplacement progressif de l’homme au travail par une robotisation de plus en
plus intelligente, augmentera le chômage. Je suis bien placé pour le savoir
puisque déjà en 1992 j’ai terminé l’automatisation complète d’une importante installation
industrielle complexe qui demandait des centaines de personnes auparavant et n’ait
laissé en gros que des tâches de surveillance aux équipes de trois conducteurs
de ce processus marchant 24h sur 24.
Encore
une fois la politique du court terme, la vision bornée et le suivi des
puissances de l’argent, sont l’apanage des pleutres, des soumis qui ne
développent que des actions les mettant en valeur tout en satisfaisant leurs
commanditaires. On voit le Medef et le patron de la FNSEA (et pas celui des
petits agriculteurs) applaudir à des mesures qui leur permettent de faire
croître leur entreprise, les salaires des PDG et la rémunération des
actionnaires. Leur souci est d’optimiser le poids des impôts, de délocaliser si
besoin et d’augmenter leur compétitivité à l’exportation, ce n’est pas le
pouvoir d’achat du salarié, ni le chômage. La multiplication des cadeaux
sonnants et trébuchants ainsi que les lois avantageuses, jette un voile opaque
aux yeux des salariés et de l’opinion. C’est sans doute pourquoi la diminution
des charges salariales des entreprises, qui était une mesure simple, facilement
évaluable et contrôlable, n’a pas vu le jour. Ne parlons pas de la sortie de l’euro
que toutes les forces de la pensée unique et des lobbies ne cessent de décrire
comme catastrophique. Nombre d’Etats ont pourtant montré que l’on pouvait vivre
mieux sans l’euro, qui reste un euromark et engraisse l’Allemagne et seulement
elle. Devant une véritable révolution du monde du travail, qui pose un grave problème
de société, et par là même de la vie de l’homme sur terre, on accouche d’une
loi mal préparée, mal ficelée, mal expliquée, dont l’impact ira toujours dans
les poches de ceux qui ne cessent de les remplir avec une disparité toujours
croissante entre dominant et dominé. La jeunesse l’a sans doute déjà compris…
je l’espère.
Nos gouvernants de la pensée unique nous
prennent pour des cons.
Jusqu’à présent ils avaient raison parce
que nous étions des veaux.
Pourtant les lucioles de la jeunesse
vont éclairer le paysage.
Espérons que le souffle du NOM ne les
éteindra pas !
Claude
Trouvé
Coordonnateur
MPF du Languedoc-Roussillon
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