De nombreux commentateurs se sont réjouis, à l’instar du gouvernement et des signataires de l’accord de sécurisation de l’emploi du 11 janvier 2013. Cet accord interprofessionnel vise à améliorer la compétitivité des entreprises et la sécurisation de l’emploi et des parcours professionnels des salariés. Il s’inscrit dans le cadre de la notion de « flexisécurité ». Les principales dispositions sont les suivantes :
1. Principales dispositions sociales de l’accord
· Garantie complémentaire santé/prévoyance
· Création de droits rechargeables à l’assurance chômage
· Création d’un compte personnel de formation
· Création d’un droit à une période de mobilité volontaire sécurisée
2. Nouvelles obligations d’information collective des salariés
· Création d’une base de données sur les informations sociales et économiques des salariés
· Extension du domaine de la GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences)
3. Adaptation des entreprises aux problèmes conjoncturels pour préserver l’emploi
· Accords de maintien dans l’emploi
· Règles relatives au licenciement de 10 salariés et plus sur une même période de 30 jours dans les entreprises d’au moins 50 salariés
· Expérimentation du contrat de travail intermittent
4. Rationalisation des litiges prud’homaux
· Renforcement de l’audience de conciliation
· Délais de prescription ramenés à 24 mois afin de sécuriser la rupture du contrat de travail
Les deux premiers paragraphes sont à mettre au crédit des avancées sociales même si, d’une part la garantie complémentaire santé va coûter à l’employeur mais aussi au salarié, et si d’autre part les droits rechargeables à l’assurance chômage vont coûter à l’UNEDIC donc finalement à l’Etat. Dans le deuxième paragraphe on note de nouvelles contraintes d’information pour les entreprises donc des coûts supplémentaires.
Les deux derniers paragraphes sont à mettre au crédit de la flexibilité demandée par les entreprises. Ils vont se traduire inévitablement par des baisses de salaire mensuel dans de nombreuses entreprises que l’accord oblige par ailleurs à des dépenses supplémentaires. Néanmoins au niveau d’une entreprise on peut penser que celle-ci sera bénéficiaire et plus compétitive, c’est-à-dire à l’échelle micro-économique. La baisse des salaires prend le nom de dévaluation interne puisque le pouvoir d’achat est affecté. Celle-ci ne touche pas la monnaie mais espère provoquer par effet d’entraînement une baisse réelle des prix. Elle est différente de la dévaluation externe qui modifie la monnaie et augmente les prix des seuls produits importés. Elle permet ainsi de redonner de la compétitivité aux entreprises par un taux de change avantageux.
Dans la dévaluation interne on maintient le taux de change nominal constant, mais l’on fait baisser les salaires réels en espérant que l’effet de cette baisse sera équivalent à une dévaluation externe. C’est un pari risqué au niveau macroéconomique. L’équivalence suppose que la baisse des salaires n’affecte pas la productivité relative par rapport aux autres pays et que celle de la demande des consommateurs n’incite pas les entreprises à diminuer les investissements, ce qui abaisserait la productivité. Par ailleurs elle suppose que la diminution du pouvoir d’achat se répartira d’une manière équivalente sur la demande interne et externe. Si la demande externe ne varie pas, la demande interne devra baisser puisque la demande globale diminue.
La baisse des salaires ou de la quantité de travail pour une production en diminution, joue sur la consommation interne et se répercute donc sur la quantité à produire. On voit qu’une politique bonne au niveau microéconomique peut s’avérer mauvaise sur le plan macroéconomique. En conséquence, vu le contexte économique européen en particulier et la politique choisie d’austérité et de dévaluation interne, les effets ne peuvent qu’entraîner une année difficile sur l’emploi et la croissance.
L’OFCE estimait en septembre dernier que la hausse du chômage serait de 243 000 personnes en 2013, et que l’on atteindrait 11% de la population active à la fin de l’année. Au vu du ralentissement extrêmement fort de la croissance en Allemagne, et de la dépression en cours dans des pays comme l’Espagne et l’Italie, un chiffre compris entre 240 000 et 300 000 est probable pour 2013. Après les dispositions du nouvel accord négocié entre partenaires, on peut s’attendre à voir ses chiffres dépassés. En effet si les entreprises françaises veulent rétablir leurs marges et le taux d’autofinancement dans le cadre de l’Euro, elles ne pourront le faire qu’au prix d’un choc important sur les emplois. Un taux de chômage à 12% en fin d’année n’est pas à exclure.
D’ores et déjà le 0,8% de croissance doit être considéré comme inatteignable et la pression concurrentielle de pays qui dévaluent leur monnaie comme le Japon, ainsi que la détérioration en cours en Espagne et en Italie ne laissent augurer guère mieux qu’une « croissance » à 0%. L’aggravation du chômage jouera sur le niveau de vie et sur les dépenses sociales renforçant la dégradation de la croissance. Comme l’euro zone ne nous permet pas de dévaluer notre monnaie il ne nous reste plus que la méthode « Coué » de la compétitivité retrouvée et du chômage en baisse, annoncés… en France seulement !
Les vœux d’Angela Merkel au Bundestag :
« La crise est loin d’être finie et 2013 sera pire que 2012 »
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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