Nous avons vu, dans les deux précédents articles, que la mondialisation ne peut conduire à une vaste zone de libre-échange sans la persistance des Etats. De même elle ne peut aboutir à une gouvernance mondiale à but économique. Cette gouvernance ne peut que générer un Etat mondial dont la cohésion ne pourrait être garantie que par le totalitarisme, vu son étendue. Les limites territoriales de cet Etat mondial, ayant été repoussées aux limites de la planète, l’appât du gain et des pouvoirs ne s’y exprimerait alors que par des guerres intestines dans un ensemble trop vaste, en attendant… la guerre des mondes.
Seul l’Etat peut garantir à l’économie la stabilité que représente le droit à la propriété car il est le seul à pouvoir assurer la sécurité. L’économie ne se développe bien que dans les Etats stables car un marché de consommateurs n’est réellement sécurisé que par un Etat solide. Ce n’est pas le cas de l’Union Européenne, car ses frontières ne sont ni définies, ni stables, ni défendues. La sécurité interne n’y est assurée que par les Etats. Par ailleurs elle n’a même pas réalisé une unité linguistique propre, condition indispensable pour développer une identité et une unité européenne. On ne peut donc espérer pour elle des effets positifs de la mondialisation sous sa forme actuelle à l’instar de grands ensembles comme les Etats-Unis, la Chine, l’Inde, le Brésil, la Russie qui ont un territoire, une identité et une unité suffisante.
L’année 2012 s’est terminée sur une note relativement optimiste sur l’économie, tout au moins sur le marché boursier, et sur une accalmie dans la stabilité de la zone euro alors que les dangers l’ont menacée sans arrêt comme on pouvait s’y attendre. Le malade en est-il pour autant guéri ? La réponse est non, les nuages sont toujours au-dessus de nos têtes et sont toujours prêts à réduire en pâte à papier nos monnaies de singe, ou de Monopoly, dans une inondation géante.
Si l’on jette un simple coup d’œil sur la répartition des richesses dans le monde on constate que la plus grande partie de celles-ci, soit 639.000Mds$, sont localisés dans des produits dérivés. Ces derniers sont des opérations entre un vendeur et un acheteur, payables à terme et qui sont un véritable pari sur l’avenir, donc les plus difficilement vendables et les plus éloignées de la richesse réelle. A l’autre extrémité se trouve l’or, denrée la plus proche de la richesse réelle et qui était, il n’y a pas si longtemps, la garantie d’échange de la monnaie fiduciaire, celle que nous avons dans notre portefeuille.
Selon le journal « Le Monde », les banques centrales et les organismes financiers mondiaux auraient en réserve 31.500 tonnes d’or soit au cours actuel de celui-ci, 1670Mds$. Les actifs financiers de valeur volatile, essentiellement liée à la confiance que l’on a en eux, sont donc 380 fois plus importants que les actifs proches de la richesse réelle ! Autrement dit, si cette confiance disparaît, le système se casse la figure. Désormais la richesse réelle ne garantit plus rien. Or cette confiance dans l’avenir est liée à une croissance à venir de l’ordre de 5%. Les Etats-Unis prévoient 2,3% en 2013 et l’UE 0,4% ! On est loin du compte.
Le monde économique et financier est comme une toupie dont la pointe serait l’or et les actifs financiers risqués le corps. Celle-ci tourne mue par la confiance, issue de la croissance. Plus la confiance diminue, plus elle ralentit et plus elle oscille sur sa pointe. Si la confiance cesse, elle s’écroule. C’est pourquoi les pays émergents, qui ont des réserves de change, achètent de l’or. Les banques centrales, elles, achètent en masse des obligations souveraines aux Etats et inondent le monde de liquidités. C’est aux Etats-Unis les QE1-QE2 (Quantitative Easing) au rythme de 85Mds$ par mois, et l’annonce d’un QE3 à 40Mds$/mois, les 9 injections successives d’argent par la Banque du Japon, celles de la Banque d’Angleterre et les 1600 Mds€ de la BCE. Tout cela ne repose sur pratiquement rien… sinon la confiance en l’avenir. On se nourrit d’un argent de faussaires qui parient sur l’impunité.
Grâce à cet argent facile, la dette des Etats ne cesse de croître et il est de plus en plus évident que la plupart ne pourront rembourser leur dette. C’est déjà le cas de la Grèce dont une partie de celle-ci a été effacée. On soutient une croissance artificielle et famélique par la planche à billets. Le chômage augmente et les bulles se reconstituent. Les politiques et le monde de la finance et de l’économie affichent la confiance dans l’avenir car elle seule tient encore le système debout. L’argent mis dans le circuit profite pour l’essentiel à la spéculation et non à l’économie, ce qui a d’ailleurs pour conséquence de limiter l’inflation. La croissance réelle, liée à l’innovation, la créativité, la productivité, la baisse des coûts de production est largement inférieure à la croissance constatée. Celle-ci, rappelons-le, n’est que la variation de la somme des dépenses publiques et non une création de richesses.
Tout est artificiel et tout peut donc basculer d’un moment à l’autre. La date est imprévisible mais le moment où il faudra faire disparaître cet argent factice ne saurait être évité. La mondialisation fait que personne ne peut échapper à ses conséquences. Tout le monde, consommateurs compris, sera touché. Après un jeu de bulles de crédits qui éclatent et génèrent de nouvelles créations de monnaies, celles-ci finiront par s’écrouler.
Il est temps de réinventer un modèle économico-financier qui nous sorte des faibles croissances et de la soumission à la mondialisation en donnant la priorité à la croissance la plus forte possible, au plein-emploi et à l’émergence d’un nouveau projet social. Un nouveau noyau européen plus restreint autour de l’Allemagne et de la France pourrait en être le lieu d’éclosion. Ce modèle n’est sûrement pas celui du racket fiscal, du gaspillage public et de l’appauvrissement de l’ouvrier. Mais l’économie de la dette ne peut indéfiniment croître alors qu’une croissance de la véritable richesse ne la soutient pas.
On ne peut pas garder la méthode « Coué » de l’avenir serein
Comme seule bouée de sauvetage
Avant… la noyade.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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