La croissance, la croissance, voilà le leitmotiv que l’on entend dans la bouche des politiques et d’un certain nombre d’économistes. Est-ce le remède miracle ? Est-ce compatible avec la réduction du déficit et le remboursement de la dette ?
Regardons ce que font les États-Unis les grands artisans des plans de relance, les « Quantitavive Easing ». La semaine dernière, on a appris que l'économie américaine s'était développée pendant le trimestre précédent. Elle a grimpé au taux annuel de 1,8%, bien au-dessous des 3% attendus par le consensus des économistes. Cela a remis l'économie US à ses niveaux de 2007, mais à quel prix ? Les autorités ont ajouté 6 000 milliards de nouvelles dettes pour regagner environ 600 milliards de dollars de production annuelle.
On est donc loin du remède miracle. Les États-Unis laissent filer la dette, ils maîtrisent leur monnaie et elle est encore monnaie de référence. Ce sont deux atouts majeurs que nous n’avons pas. La réduction du déficit budgétaire et le remboursement de la dette ne sont pas compatibles avec la croissance dans l’économie française où nous n’avons pas la maîtrise de la monnaie, ni même du rythme de réduction du déficit budgétaire.
Quels leviers nous reste-t-il ? La réduction des dépenses publiques d’une part et les impôts et taxes d’autre part. Dans l’idéal la réduction du déficit budgétaire doit se faire sans toucher au pouvoir d’achat, soit pas de réduction du nombre de fonctionnaires. Il faut donc espérer une simplification des tâches et une « productivité » meilleure. Dans le programme de Sarkozy on est devant une réduction autoritaire du nombre de fonctionnaires qui amène une désorganisation de l’appareil administratif et une démotivation mais peu de marge de manœuvre pour la croissance. Dans le programme Hollande on ne cherche pas à réduire la dépense publique mais on mise sur les impôts et taxes, ce faisant on agit fatalement sur le pouvoir d’achat global.
Dans les deux cas, booster la croissance demande un apport financier qui va jouer immédiatement sur l’endettement et le pouvoir d’achat donc la consommation intérieure même si l’on parie sur une relance à moyen terme. N’oublions pas que les emprunts ne sont pas à taux zéro mais à celui décidé par les banques. On est dans un système d’endettement qui s’auto-alimente où seules les banques en tirent des bénéfices sauf en cas d’effacement de tout ou partie de la dette. C’est le cas pour la Grèce où on voudrait leur faire accepter 60% d’allégement de la dette.
Dans le cas d’un défaut de paiement complet les banques récupèreront leurs fonds grâce aux CDS (Credit Default Swap). Dans le cas d’allégement des dettes, la perte subie par les banques se répercutera fatalement sur les emprunts des États donc sur nous. Pour que leurs taux ne montent pas trop la BCE achète des obligations souveraines et pourries. Elle prend les risques à sa charge car personne n’en veut. Le pire c’est que les banques remettent de l’argent à la BCE sachant que celle-ci a abaissé ses taux et diminuent ainsi volontairement leurs capacités de prêt.
Il est évident que nous ne pouvons sortir de la crise que par une croissance qui n’est pas celle d’un coûteux plan de relance. Si nous arrivons à réduire la dépense publique à un rythme soutenable, le gain peut être affecté soit à la réduction de la dette soit à la relance de l’économie. Dans le premier cas nous nous désendettons, mais encore faut-il que ce désendettement soit supérieur à la surcharge créée par de nouveaux emprunts. Dans le deuxième cas l’effet peut être plus intéressant à court terme mais c’est un pari trop risqué sur la rapidité de la reprise économique pour un pays qui continuera à s'endetter dans une Europe en récession.
En conclusion il est clair que les chances de réussite sont faibles dans un rythme de rigueur imposé par Bruxelles, à cause de l’impossibilité d’emprunter à taux nul comme aux États-Unis et surtout de n’avoir aucune maîtrise sur la monnaie. Nous devons gagner 25% de compétitivité pour se retrouver dans une situation permettant d’équilibrer notre commerce extérieur. L’étranglement par la rigueur tue la Grèce et le Portugal qui vient d’emprunter à 17%, autant dire que plus personne ne veut lui prêter. A qui le tour ?
Si la France ne veut pas s’isoler
Elle participera au suicide collectif !
Claude Trouvé