Hier c’était Roncevaux ! Notre trompettiste Président, sonnait la charge… des taxes, des impôts et du chômage ! Le capitaine a son navire dans la tempête, il embarque des paquets de mer, il reçoit des SOS des bateaux proches, les hommes sont malades et prient, l’ouragan va encore se renforcer dans les prochaines heures mais demain il fera beau… si on arrive au port !
Quoi de nouveau dans le discours ? Rien, sinon que le Président est conscient que la situation est grave, c’est le minimum de ce que nous pouvions attendre. Le cap ? 2014 au mieux, la fin du mandat au pire. Le pacte ? Entre qui et qui ? Entre lui et une nation où deux citoyens sur trois ne lui font plus confiance ? Le pacte avec le Diable ou avec Dieu pour qu’il réalise la croissance de 0,8%, ce phare dans le lointain que la brume européenne rend inatteignable ?
Le pire c’est que la magie du verbe va encore agir… un certain temps… peut-être jusqu’au printemps 2013 au mieux. Le Président sait que ses mesures, étalées dans le temps, ne suffiront pas à passer le cap de 2013, année charnière pour toute l’Europe. Il sait que nous ne tiendrons pas le déficit de 3% du PIB mais il pense que plusieurs autres pays n’atteindront pas non plus le déficit auquel ils se sont engagés. En conséquence il joue la montre et la renégociation des engagements. La Grèce ne pourra pas non plus soutenir l’austérité dans laquelle la plonge la troïka et nombre de pays de la zone euro ne veulent plus la soutenir jusqu’en 2020 et montre leur refus de prolonger la période de rétablissement jusqu’en 2022.
Le Président sait que la Grèce ne pourra pas être sauvée sans une sortie provisoire de la zone euro et un effacement pur et simple d’au moins 60% de sa dette, mais il fait comme si la zone euro allait continuer à la soutenir sans broncher. Le Président sait que l’Union bancaire n’est pas prête à être mise en œuvre. Non seulement il faut attendre 2014 mais le Royaume-Uni n’est pas prêt d’accepter la mise sous tutelle de ses banques, l’Allemagne non plus d’ailleurs. Le Président sait que le Mécanisme Européen de Stabilité n’a pas les moyens de faire face à un défaut de l’Espagne et encore moins à l’ensemble des pays du Sud. Le Président sait que le MES ne peut être mis en œuvre que lorsque l’Union Bancaire sera mise en place, donc pas avant 2014 mais il fait comme si le pansement ne demandait plus que la jambe du malade.
Le Président sait que l’Allemagne et la France ne peuvent s’accorder sur la direction à prendre. Il sait qu’Angela Merkel n’approuve pas son budget et craint un effacement de la France dans le commerce européen. L’Allemagne ne veut notre santé que pour assurer ses exportations. Le Président fait comme si nous marchions la main dans la main, alors que l’Allemagne lorgne du côté de la supervision des budgets nationaux par la BCE, sur laquelle ce pays a la plus grosse influence. Il sait que le piège est tendu et que nous nous affaiblissons chaque jour pour y résister.
Mais le Président distribue du rêve… pour après-demain, car le but est de gagner du temps pour 2013. Après on verra bien, la zone euro n’existera peut-être même plus sous sa forme actuelle, la guerre aura peut-être éclaté dans un Moyen-Orient surchauffé, tout peut arriver et surtout l’imprévisible. Alors gagnons du temps. La Grèce est toujours là, alors gagnons du temps. La zone euro existe encore, alors gagnons du temps. Le déficit ne sera pas tenu, gagnons du temps en subodorant que ce critère peut perdre de son exigence bientôt. Le MES arrivera beaucoup trop tard, l’important c’est qu’il est signé, gagnons du temps en vantant son importance.
Le Président du « Moi je » sait que les mesures prévues seront insuffisantes mais ne sait pas faire autrement. Le Président sait que l’ampleur de la réduction des dépenses publiques et sociales est hors de portée sans un discours Churchillien. Un voile pudique est donc lancé vers l’opinion et la promesse du ciel a pour but de préparer à la dureté de l’avenir proche. Le choc de compétitivité est devenu un pacte d’attente somnolente, cette espèce de flottement dans l’irréalité que procure la drogue. La réalité nous rattrapera mais ce ne sera déjà plus la réalité d’aujourd’hui mais celle du futur… que l’on peut toujours espérer beau, alors gagnons du temps.
Nous sommes invités à oublier que les Grecs, les Espagnols, les Portugais, les Italiens sont dans la rue et que leur situation s’aggrave chaque semaine. Nous sommes invités à oublier que le consensus entre les pays du Nord, le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France, n’existe pas sur la politique économique de l’Union Européenne. Nous sommes invités à oublier que la croissance ne se décrète pas et qu’elle n’est ni au rendez-vous mondial ni européen.
L’Europe se meurt et perd pied petit-à-petit. La zone euro s’effrite et les rêves s’éloignent pendant que nos dirigeants s’accrochent à ce dogme, cette idéologie, de l’Europe à vocation fédérale, de fait unitaire, vouée à une monnaie unique dont les ravages sont de plus en plus évidents. Poussés par les puissances financières on n’abandonne pas, on y enfonce ses concitoyens car un politique a toujours raison… par définition. Le Président enfile un chandail pour affronter le froid polaire… en espérant un réchauffement climatique ou l’arrivée de Dame Bonne Fortune, et vend la peau de l’ours avant de l’avoir tué !
L’hiver est annoncé, quand partent les cigognes,
L’homme précautionneux est déjà en besogne,
Il prépare son feu, aujourd’hui pas demain !
S’il a trop attendu, le froid gèle ses mains.
Jacques Ouvert
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon