mercredi 21 novembre 2012

AA1 ? La perte d’un cran n’a-t-elle aucune importance ?


Il est dramatique d’être pris pour des imbéciles dans une démocratie normale puisque ce sont alors des imbéciles qui orientent leur pays. En France, où la démocratie est déclarée imparfaite par les observateurs, c’est sans conséquence puisque le citoyen n’est pris en considération que pour élire un représentant. Après celui-ci, arrivé au pouvoir, s’occupe de tout et raconte n’importe quoi au citoyen débile pour le maintenir dans une euphorie abêtissante !
Moscovici ne tient aucun compte de la dégradation de la note de la France par Moody’s et de la perspective négative qui lui est associée. Pourtant si la mauvaise note est due principalement à l’équipe gouvernante précédente, les perspectives négatives s’adressent expressément à l’avenir, donc aux dispositions budgétaires et structurelles envisagées par la France.
Bof me direz-vous, l’impact sur nos taux d’emprunt est très peu affecté après cette annonce et la différence de taux avec l’Allemagne (le Spread) reste constante. Il y a plusieurs raisons à cela, la première est que les banques avaient déjà anticipé cette dégradation après celle de Standard & Poors en février. La réglementation leur impose en effet de constituer des fonds propres dès qu’elles se portent acquéreuses d’obligations d’Etat dont la note n’est plus maximum, et ce d’autant plus que la note est basse.
La nouvelle perspective négative va les obliger à continuer à augmenter leurs fonds propres dans la perspective d’achat d’obligations françaises. Tout ceci s’étale dans le temps et n’a pas d’effet immédiat. Cependant les banques ont encore le choix des pays notés AAA. Il n’est pas dit que l’obligation française soit toujours aussi attractive. Son taux est maintenu artificiellement par la nécessité de ne pas briser le duo franco-allemand pour la survie de l’euro, car la dégradation de la santé économique de la France ne peut en être la justification.
Les banques ont par exemple un choix plus sûr et moins rentable avec l’Allemagne ou plus risqué mais plus rentable avec l’Italie. La baisse de la note française va donc jouer sur l’attractivité des OAT françaises. Si c’est le cas nos devrons accepter un taux plus élevé dans les mois qui viennent. D’ailleurs les assurances-vie qui voient leurs clients retirer leur argent au profit de la Caisse d’Epargne et du LDD, auront moins d’argent à placer. Le placement des obligations en sera plus difficile. La digestion du A manquant est pour le moment indolore, le temps que le marché des obligations se réorganise.
Ceci est très ennuyeux car en 2013, la France sera de très loin le plus gros émetteur de dettes en euro, devant l'Espagne. C'est donc en 2013 que les rendements et les taux devraient monter de façon significative. Mais il est vrai que les français sont censés ne rien comprendre et que pour l’instant on est en 2012. Il est vrai aussi que l’Etat s’ingénie à lui tendre des pièges comme le relèvement du dépôt maximum sur les livrets Caisse d’Epargne et LDD. En effet 65% de ces dépôts sont mis à disposition de la Caisse des Dépôts et Consignations, donc de l’Etat. Cela a deux conséquences, d’une part c’est autant d’argent qui ne va pas alimenter le circuit économique et est soustrait à la Bourse mais d’autre part c’est de l’argent facilement blocable pour raison d’Etat. Il court déjà dans l’air l’idée de fiscaliser les gros livrets…
La perte d’un cran n’est que la matérialisation de notre chute et de perspectives peu encourageantes. D’ailleurs, selon le rapport PWC, la France est à la 167ème place sur 185 en matière de compétitivité fiscale pour les entreprises. Cela justifie l’empressement des entrepreneurs à aller voir ailleurs, au Luxembourg, en Irlande et même, surprise, au Danemark ou en Islande.
La France se comporte comme le mauvais élève qui cache sa feuille de notes,
Repousse à demain une réelle diminution des dépenses publiques,
Et endort le citoyen dans une fausse sécurité avant de le dépouiller.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon