Cinq ans après le début de la crise, la situation économique de l'Union demeure lamentable : pas moins de 17 des 27 états membres sont en récession. Déjà en 2009 Angela Merkel mettait en garde : « ne nous attendons pas à des miracles, car nulle décision politique, aussi courageuse soit-elle, ne pourra conjurer l'effondrement de l'économie européenne. » Elle était alors très isolée dans sa façon d'envisager l'avenir. Aujourd’hui on s’aperçoit qu'elle voyait juste. De plus les écarts avec ceux qui s'en tirent le mieux ne font que se creuser, mettant en péril l'unité et la stabilité de l'Union.
Dans les pays les plus durement touchés comme l'Espagne ou le Portugal, il faudra au moins une génération pour compenser l'effondrement du niveau de vie. Pour la Grèce on sait d’ores et déjà qu’elle ne survivra qu’en effaçant sa dette et en étant rejetée provisoirement hors de la zone euro. Le maintien de l’aide à cette dernière ne dépend plus que de la volonté de l’Allemagne. Il s’agit pour elle de gagner du temps, le temps que ses banques se débarrassent sans trop de casse de leurs obligations grecques. Mais c'est 138 milliards que l'UE vient de débourser en une semaine entre les 40 milliards d'effacement de la dette et les 44 milliards de prêts à la Grèce, les 17 milliards à Chypre, et les premiers 37 milliards aux banques espagnoles alors que les pays fournisseurs sont tous endettés... qui va finalement payer ?
« Pour la première fois depuis sa création, l’Union européenne, peut-être plus vite que la zone euro, risque de s'effondrer. Chaque mois, ce scénario se précise un peu plus, sans que l'on puisse clairement dire quel processus prendra le pas sur l’autre : celui d'un Euroland renforcé autour de l'Allemagne ? Ou celui de la désintégration du bloc des pays eurosceptiques, Royaume-Uni en tête ? » (Le Monde)
L’évolution actuelle ne réjouit pas l’Allemagne qui souhaite fédérer autour d’elle la Pologne et les autres pays d’Europe centrale, dans lesquels elle a délocalisé ses productions et dont elle a besoin pour lui assurer une compétitivité au moins européenne. Ce sont aussi ceux qui défendent la politique allemande d’austérité et de réformes structurelles. Cet îlot, auquel s’ajoutent les Pays-Bas, la Suède et la Finlande, crée une zone de déséquilibre économique avec la possibilité de crédits à taux faibles pour les entrepreneurs qui leur assurent un avantage considérable.
Ceci a entraîné l’augmentation des différences de niveau de vie et la fin de l’Europe sociale que la gauche avait mise en avant pour faire voter Maastricht. Cette évolution signifie que les intérêts des Etats membres seront de plus en plus divergents. Tandis que les Roumains, les Bulgares, les Grecs ou les Portugais vont chercher à assurer la survie de leurs populations en insistant sur cet enjeu auprès de Bruxelles, l'Allemagne et la Suède préféreront mettre l'accent sur l'écologie et les sources d’énergie alternatives.
En fait la perspective d’une Europe à plusieurs vitesses prend de plus en plus de vigueur. Il faut reconnaître que l’euro crée provisoirement une raison économique de cohésion dans sa zone mais les tensions entre pays dues à la crise européenne, plus violentes qu’ailleurs, risquent de balayer la peur de l’inconnu et de l’échec.
Le dépouillement des nations de leurs pouvoirs législatifs, 70% de nos lois émanent directement ou indirectement de l’UE, et désormais budgétaires, affaiblit l’idée de nation chez les peuples européens. Dans un contexte de récession et de baisse des niveaux de vie chez de nombreux pays, on voit fleurir les désirs régionaux d’indépendance. Sur ce thème les élections du 25 novembre 2012 en Catalogne en sont une preuve. Le « détricotage » des nations était bien dans l’esprit de Jean Monnet, fondateur de l’Europe.
Les discussions avortées sur le budget européen sur fond de crise européenne ne sont qu’un soubresaut d’un malade atteint mortellement et que l’on maintient parce que l’on ne sait pas quoi faire de son héritage qui ne comporte que des dettes. 2012 était l’année de tous les dangers, 2013 s’annonce l’année du grand craquement, celle de l’heure de vérité.
L’Europe a pêché par orgueil et par vanité en s’élargissant sans relâche,
Elle va finir comme la grenouille devant le bœuf de Jean de la Fontaine :
« S'enfla si bien qu'elle creva. »
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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