mercredi 6 juin 2012

L’Espagne trop grosse pour faire faillite

La crise est enfin arrivée au "cœur inflammable de la zone euro", écrit ce matin le Financial Times. L'Espagne, quatrième économie européenne, a annoncé hier ne plus être en mesure de renflouer ses banques sans l'aide de Bruxelles. Le Premier ministre du pays, Mariano Rajoy, pourrait maintenant demander officiellement un plan d'aide européen. Mais la taille économique de l'Espagne pourrait rendre cette opération très difficile: Madrid représente 12 % du PIB européen, contre seulement 6% pour l’Irlande, le Portugal et la Grèce réunis [Libération]

L'Espagne est donc "au bord du plan de sauvetage" [Le Figaro]. Mariano Rajoy était "réticent à accepter un sauvetage européen qu'il juge humiliant" et qui l'obligerait à accepter les mesures d'austérité définies à Bruxelles. Il a pourtant appelé hier l'Europe, lors d'un discours au parlement de Madrid, à "soutenir les pays en difficulté", dont l’Espagne fait désormais partie. D'abord parce que son système bancaire, "plombé par des actifs immobiliers douteux" [Libération], a besoin d'une recapitalisation. Deuxièmement, parce que le surcoût à payer pour emprunter sur les marchés financiers, est très, trop, élevé. "L'Espagne n'a pas accès aux marchés", a déclaré hier le ministre espagnol du Budget Cristobal Montoro.
Le pays attend donc un "coup de pouce de l'Europe" [Les Echos]. Mais le MES, qui entrera en vigueur le 1er juillet 2012, ne peut prêter qu'aux Etats, et non directement aux banques. Il faudrait donc modifier son statut. Ce soir on se dirigerait vers une « union bancaire » qui serait une solidarité entre les banques et un tri pour sélectionner les banques en mesure de se redresser et laisser les autres disparaître. Les clients de ces derniers seraient remboursés mais pas les actionnaires.

Selon la presse italienne Mario Draghi préparerait une grande réforme de la BCE. De toute évidence, d’une façon ou d’une autre, on s’apprête à faire marcher la planche à billets. L’Espagne est trop grosse pour faire faillite sans créer un éclatement de la zone euro. L’Allemagne et la France s’opposent sur les moyens de la financer mais le problème de la survie de l’euro est posé.

"L'Espagne est l'illustration magistrale de notre crise : des Etats insolvables sauvent des banques insolvables, qui, à leur tour tentent de sauver des Etats insolvables. En 2008, la bulle immobilière espagnole est gonflée à haute pression. Pour ne pas laisser sombrer ses banques, l'Etat s'endette afin de les renflouer.

Début 2012, les banques espagnoles – toujours mal en point – souscrivent aux émissions de l'Espagne dont les taux montent sur les marchés. Si les taux montent, cela signifie que le prix des obligations baisse. Ce sont donc des pertes supplémentaires pour ces banques. Mi-2012, les banques espagnoles ont besoin d'être recapitalisées : leurs pertes dépassent leurs fonds propres. Comme vous le voyez, les évènements s'accélèrent. » [Simone Wapler]

Les feux des projecteurs ne font plus quitter l’Espagne et la Grèce va se trouver affaiblie pour négocier le maintien dans l’euro et un plan d’austérité… moins austère. En effet l’urgence  et l’importance écnomique de l’Espagne deviennent l’objet de toutes les attentions.

La zone euro va jeter ses derniers feux.

Les clauses des traités vont voler en éclats.

L’Allemagne va se poser la question de l’intérêt de l’euro.

Claude Trouvé