Nous sommes à quinze jours du premier
tour de l’élection présidentielle et le citoyen se demande s’il va voter ou non
et si oui pour qui. Cette lapalissade n’est pas anodine car aujourd’hui la
première décision est de s’abstenir ou de voter, et elle n’a sans doute jamais
été aussi difficile à prendre pour une élection présidentielle.
Traditionnellement sous la Vème République, cette élection est celle qui, avec
les élections municipales, mobilise le plus. Le calamiteux déroulement de la
campagne avant l’officialisation des candidats a joué le rôle de repoussoir.
Les primaires de gauche et de droite se sont avérées des désastres politiques
qui marquent pour longtemps les deux grands partis de gouvernement. Personne ne
s’est posé la question de la constitutionnalité de ces primaires qui violent le
droit d’égalité de représentation médiatique de tous les partis politiques.
Cette copie du système américain, le mimétisme allant jusqu’à adopter le nom
« Les Républicains » et laissant redouter que le croupion de parti
socialiste ne fasse de même avec « Les démocrates », est néanmoins
pleine d’enseignements.
Le vieux débat gauche-droite, la
dérive vers un changement de pratique de la démocratie avec les primaires, les
dix années de déception des partis de gouvernement, les guerres déclenchées
sans assentiment démocratique et sans autorisation de l’ONU, ont dégoûté les
français des pratiques politiques. Pour les plus avertis c’est le sentiment de
manipulation par une puissance étrangère. Le sentiment européen s’est étiolé en
voyant les frontières de l’UE devenir des passoires et les réactions des pays
les plus impactés. L’imposition du flux migratoire aux allemands a fait aussi réfléchir
sur l’impuissance des peuples européens à choisir leur destin. L’électeur est
dégoûté des politiciens qui ont œuvré depuis plusieurs décennies et il l’a fait
savoir lors des primaires en pratiquant une première coupe sombre dans les
caciques de la politique. Ce dégoût les pousse dans un premier temps à
l’abstention mais l’importance de l’enjeu, après deux quinquennats ratés où le
chômage a explosé avec la dette, va faire fondre le camp des abstentionnistes
dans ces quinze derniers jours de campagne.
Depuis l’affrontement des onze candidats
sur BFMTV, une interrogation nouvelle s’est faite jour. L’électeur a pu
constater que la plupart des candidats remettaient en cause le fonctionnement
de l’UE, chacun voulant aller à un charcutage des traités. Malgré le battage
médiatique sans précédent, certains pensent que la France est suffisamment
forte pour passer outre à ses engagements dans le traité de l’UE et être capable
de rallier à elle les 26 ou 27 autres pays. Marine Le Pen, Dupont-Aignan,
Mélenchon émettent l’idée d’une sortie de l’UE en cas d’échec des négociations
avec nos partenaires européens. Benoît Hamon évoque une évolution du
fonctionnement dans un sens allant plus loin dans le fédéralisme mais pas de
sortie. Un seul candidat propose le Frexit, c’est-à-dire une sortie avec
l’application immédiate de l’article 50 des traités comme le fait le Brexit,
Asselineau.
Cette arrivée brutale de ce qui
aurait dû être débattu depuis le début de l’année change la donne et met en
lumière la tactique utilisée par les tenants de l’UE, de l’euro et de l’OTAN.
Le battage médiatique, les sondages trafiqués et les affaires sorties
opportunément, poussées au judiciaire le plus rapidement possible, sont le
rideau de fumée qui a permis d’éviter jusqu’au dernier moment la discussion de
fond qui commence à s’imposer dans d’autres pays d’Europe comme l’ont montré
les néerlandais. La bataille médiatique et « sondagière » n’est pas
close mais l’œil de l’électeur s’exerce sur les réseaux sociaux avec un autre
angle de vision. La question de savoir si on peut faire évoluer les traités ou
non est posée. Le futur Président, chargé de respecter les traités, devra
ferrailler dur pour les changer après une construction de 60 années
d’empilement de négociations et de textes. L’électeur prend conscience que la
vraie question est de savoir si l’on veut continuer ou non sous la tutelle de
l’UE, fille des Etats-Unis, et de l’OTAN après l’exemple de la Grèce et notre
lente descente vers la récession, la pauvreté et le chômage.
L’électeur, assez porté à
« renverser la table », commence à se détourner du couple
Macron-Fillon, les deux candidats restants adoubés par le groupe Bilderberg des
puissances de l’argent, après l’éviction de Valls et Juppé. Seule la crainte
d’une sortie, serinée comme catastrophique, retient ceux qui croient encore
qu’ils vont lâcher la proie pour l’ombre et que tous les autres candidats sont
des irresponsables. Non ce n’est pas par hasard que la plupart des candidats
remettent en cause le fonctionnement de l’UE. Les raisons économiques et
sociales se voient en Grèce, mais aussi au Portugal, en Espagne et en Italie.
Cette dernière est dans une situation qui tourne à la catastrophe et préoccupe
l’Allemagne. La France se trouve avec un handicap de compétitivité de 21% avec
l’Allemagne, handicap que la dévaluation interne demandée dans les orientations
économiques imposées aux pays par l’UE ne peut compenser sans rapprocher la
France de la Grèce. La dévaluation interne c’est la baisse des salaires, des
pensions et des prestations sociales, l’augmentation de la TVA, la coupe sombre
dans les fonctionnaires d’Etat, etc. pour reporter toutes ces « «économies
sur les entreprises », y compris les grosses qui échappent facilement à
l’impôt.
C’est parce que l’on a soigneusement
caché la vérité que les électeurs montrent un intérêt certain sur les réseaux
sociaux à cette dernière partie de la campagne. Ils expriment leur intérêt et
pour beaucoup leur peur de la sortie de l’euro, dont ils ont l’impression que
la monnaie les touche plus personnellement. La sortie de l’euro n’est pas
prévue dans les traités au contraire de la sortie de l’UE, mais la sortie de
l’UE implique ipso facto le retour à la monnaie nationale. Après tout le
battage fait sur le catastrophisme de la sortie de l’euro, cette crainte est
légitime. L’électeur devient avide d’explications et tout candidat qui s’engage
de suite ou plus tard à la sortie de l’UE ou de l’euro ne peut éviter ce débat
et les explications sur les raisons qui poussent au retour au franc sans que
l’électeur se retrouve dans une situation dite catastrophique. La discussion
est évidemment un peu technique, donc ne peut se faire dans les quelques
minutes que les journalistes s’ingénient à imposer pour éviter tout débat de
fond. Mais l’électeur est devenu curieux et internet est à la portée de tous
même des plus anciens et cela va changer
la donne du tout au tout.
La manipulation des puissances de
l’argent pour bloquer le débat, comme cela fut fait pour Trump et pour le
Brexit, est en train d’être éventée. Plus les candidats de la remise en cause
de l’UE et de l’euro feront appel à l’intelligence et plus ils argumenteront
d’une façon pédagogique et claire, plus ils exciteront la curiosité d’électeurs
avides de vraies discussions sur leur destin. Mais on voit aussi sortir la
discussion sur l’OTAN car on finit par comprendre que l’attitude guerrière de
la France non seulement n’apporte pas de solution, mais au contraire crée ou
envenime les problèmes géopolitiques dont l’immigration. C’est à une véritable
ouverture des esprits critiques à laquelle nous allons assister en accéléré et
les urnes pourraient bien révéler d’énormes surprises.
C’est à une autre campagne accélérée que nous assistons.
L’électeur va peut-être pouvoir faire un véritable choix
Entre deux orientations différentes de son destin
Après vingt années de gouvernance accoquinée
D’une gauche et une droite antidémocratiques.
Ne pas voter c’est ne pas comprendre l’enjeu.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du
Languedoc-Roussillon
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