La
pensée unique fait chorus sur le sort mérité des Grecs qui payent cher leur
appartenance à l’euro. L’argumentation sur l’absence de cadastre et la paresse
des Grecs est non seulement une insulte à ce pays mais totalement hors du
dramatique enjeu, qui conduit la Grèce à une contribution financière que l’on
pourrait comparer à celle qui a frappé l’Allemagne après sa défaite en 1918,
pour avoir le droit d’exister au sein de l’UE. La tutelle de la troïka
UE-FMI-BCE, largement inspirée par l’Allemagne, n’a pas réellement cessée, car
la dette n’est pas effacée mais prolongée sine die moyennant des intérêts
usuraires et l’obligation d’un déficit public primaire (hors intérêt de la
dette) ramené à zéro. En refusant l’effacement au moins partiel de la dette
grecque, l’Allemagne, principale bénéficiaire de l’UE et de la zone euro, a
montré les limites de la solidarité européenne. La falsification des comptes
publics grecs par les sbires de Goldman Sachs a amené ce pays dans le giron de
la zone euro avec une économie incapable d’assumer l’équilibre de son solde
commercial avec cet euro trop fort, taillé comme un compromis entre le mark et
la drachme. C’est d’ailleurs ce handicap qui a touché de grands pays comme
l’Espagne et l’Italie. Les conséquences ne se sont pas fait attendre avec une
augmentation de la dette et du chômage dans ces deux pays. Mais la moquerie des
français pour la Grèce montre bien que la solidarité n’est pas de mise au-delà
des beaux discours de paix et d’aide mutuelle, et que ceux-ci ne sont pas
conscients, qu’avec un certain retard mais inexorablement, nous suivons le
chemin de la Grèce malgré notre meilleure compétitivité initiale. Si l’Italie a
commencé à réaliser qu’elle allait finir au niveau de la Grèce si elle ne
réagissait pas en défendant des options budgétaires moins adaptées à son cas,
la France se laisse glisser dans les bras mortifères de l’UE et de l’Allemagne.
Dans l’article
précédent les différences de solde commercial entre des grands pays de la Zone
euro ou voisin comme la Suisse ont été complétés avec les indicateurs de solde
cumulé sur la période 2009-2018 (une
erreur de libellé sur le graphique précédent du solde cumulé/habitant et non
solde cumulé/PIB a été corrigée). On peut constater l’ampleur du déficit
commercial grec et son poids par habitant double de celui de la France. Mais on
peut constater que cette dernière prend le chemin de la Grèce avec un solde
négatif par habitant beaucoup plus inquiétant que celui de l’Espagne. La
désindustrialisation de notre pays ne peut qu’accentuer ce phénomène avec une
augmentation des importations très supérieure à celle des exportations. La
compensation sur le PIB se fait par une politique d’austérité qui touche
essentiellement aux salaires, aux retraites et aux prestations sociales en
général plutôt qu’à la diminution du coût des services publics sans baisse de
la qualité de ceux-ci. On constate que l’Italie, en récession en 2018,
maintient un solde cumulé positif qui lui laisse des perspectives plus
prometteuses en 2019 où sa croissance est repartie, même si c’est très
faiblement avec 0,02%. Si l’on excepte le cas spécial de l’Irlande, c’est
l’Allemagne et ses satellites qui empochent la mise. Elle empoche plus de deux
fois la perte cumulée de la Grèce, la France et l’Espagne. Toutefois avec une
croissance ramenée à 1,43% en 2018, inférieure à la France avec 1,52%, cela
signifie que l’Allemagne a épuisé sa supériorité économique. On note que les
Pays-Bas suivent l’évolution économique de l’Allemagne. Avec une croissance de
2,54%, supérieure à celle de l’UE à 1,96% et un solde cumulé positif, la Suisse
montre que l’appartenance à l’UE n’est pas un gage de réussite. Le graphique du
bas, qui donne cette fois réellement le solde cumulé/PIB, montre que
l’Allemagne a gagné en 10 ans l’équivalent de 9 mois de PIB 2018, quand la
France a perdu 4 mois et la Grèce 15 mois. A l’opposé l’Irlande a gagné plus de
16 mois de PIB, et l’on s’étonne que cette situation de concurrence faussée
soit tolérée. Ceci prouve bien que les grands lobbies imposent leur loi à l’UE.
Ces graphiques montrent que la situation de la France est potentiellement plus
dangereuse que celle de l’Italie même si celle-ci a une dette et un taux de
chômage encore plus élevés.
La
zone euro est-elle une garantie de protection de la croissance ?
Vu les résultats de
la France et de l’Italie on est en droit de se poser la question de savoir si
la zone euro est un ensemble territorial qui permet de mieux résister aux
grands pays du monde que ne peuvent le faire les pays à monnaie nationale. Le
graphique ci-contre est une première réponse. Depuis la fin 2010 on constate
que la Chine affiche une supériorité mondiale incontestable avec une croissance
qui reste au-dessus des 6% et ne faiblit que lentement. Les Etats-Unis ont une
croissance supérieure à la zone euro sauf au 1er trimestre 2014 et
la période 2016-2017. Depuis la nouvelle politique de Donald Trump, la
croissance retrouve son niveau le plus haut. Dès 2018 la croissance de la zone
euro plonge très rapidement vers la barre des 1% et s’écarte de plus en plus de
la croissance américaine. La trajectoire de la croissance russe est très
significative d’une part de l’impact des sanctions économiques qui lui ont été
imposées par les occidentaux, et d’autre part de la spectaculaire remontée après
une période de récession d’un an et demi. La croissance russe rejoint la
croissance américaine et semble en voie de la dépasser en 2019. Force est de
constater que la zone euro ne procure aucun avantage particulier sur la croissance
et peut même être entrainée vers la récession en 2019.
La
participation de la France à la zone euro lui donne-t-elle une croissance plus forte ?
Force est également de
constater que la France suit péniblement la moyenne de la zone euro et est même
légèrement en-dessous depuis 2014. L ‘appartenance de la France à la zone
euro ne lui procure aucun avantage même si elle s’en tire mieux que l’Italie depuis
2017. On remarquera que la Grèce est revenue dans le peloton moyen des pays de
la zone euro, mais cela cache une politique de dévaluation interne drastique.
Les salaires et les retraites ont été poussées au niveau le plus bas possible
et l’échéancier de remboursement de la dette a été repoussé dans le temps. La
Grèce va donc payer pendant de très nombreuses années un lourd tribut au seul
paiement des intérêts de la dette et maintenir son pays dans un niveau de vie
déplorable et une paupérisation dramatique. L’Italie rentre dans la récession
et doit réagir rapidement si elle ne veut pas tomber sous les fourches caudines
d’une troïka qui la privera de sa souveraineté budgétaire et lui appliquera les
mêmes recettes qu’à la Grèce.
La France
fait-elle mieux que les pays européens hors zone euro ou hors UE ?
Là encore le constat
est amer. La petite Islande, malgré une oscillation importante de sa croissance
fait nettement mieux que la France bien qu’elle ait renoncé à faire partie de l’UE.
Il en est de même de la Suisse dont la croissance est moins variable dans le
temps même si l’année 2018 ne lui a pas été favorable tout en restant au-dessus
de la croissance française. Elle confirme ainsi que l’appartenance à l’UE n’est
pas nécessaire pour résister aux géants économiques mondiaux. D’ailleurs l’évolution
de la croissance britannique est globalement meilleure que celle de la France sauf
en 2017 car due en majeure partie aux effets immédiats du vote référendaire du
Brexit. Ceci amène deux réflexions, d’une part que l’on peut très bien résister
avec une monnaie nationale, d’autre part les effets d’une sortie de l’UE sont
vite atténués puisque la croissance britannique est supérieure à celle de la France
en 2018.
L’ère
de croissance de l’Allemagne se poursuit-elle ?
On vient de voir que
la croissance de la zone euro reste globalement inférieure à celle des grandes
économies, et que la France ne bénéficie pas d’un apport supplémentaire à l’intérieur
de celle-ci. Par ailleurs en dehors d’une volonté politique ou idéologique l’appartenance
à l’UE et à la zone euro joue plutôt le rôle d’un carcan que d’une aide
supplémentaire entraînant des performances économiques supérieures à celles de
pays hors UE ou hors zone euro. Jusqu’à présent la grande gagnante de ces choix
est l’Allemagne et ses pays satellites dont les économies sont très liées à l’économie
allemande. Par son poids économique et le pompage exercé sur les autres grands
pays de l’UE, en particulier les pays du sud, l’Allemagne a amassé des centaines
de milliards chaque année. Cette situation peut-elle encore durer quand les
autres économies montrent des signes inquiétants d’appauvrissement ? Ce
dernier graphique apporte des informations supplémentaires. On note que la suprématie
des Etats-Unis sur les grands pays de la zone euro (Allemagne, France, Italie),
suprématie un moment contestée par l’Allemagne, reprend ses distances depuis le
2ème trimestre 2017. L’écart s’aggrave alors sous l’impulsion de la
politique de Donald Trump et elle distance les trois grands pays de la zone
euro et même la Suisse qui subit l’imbrication de son économie avec ses trois grands
voisins. On assiste à un double phénomène, la renaissance de la croissance
américaine et l’effondrement de l’Allemagne qui entraîne ses voisins avec elle.
De toute évidence l’Allemagne a mangé son pain blanc et elle va entraîner l’ensemble
de la zone euro dans une chute brutale de la croissance dont l’Italie est la prochaine
victime expiatoire.
Est-ce
la fin de l’UE et de la zone euro ?
Si
un rebond spectaculaire de l’économie allemande ne se fait pas sentir, la zone
euro est condamnée, et étant globalement contributrice au budget de l’UE, elle
signera la mort de l’UE. On comprend le désir de l’Allemagne de ne pas laisser
partir le Royaume-Uni, principal acheteur de ses voitures, et son envie d’un
prolongement sine die de la situation actuelle. On comprend également le désir
de l’Italie de mener une autre politique que celle de l’austérité, de la
dévaluation interne, et de distendre ses liens avec la politique budgétaire d’inspiration
allemande. Les clivages entre les intérêts nationaux vont se faire de plus en
plus voyants, car le transfert de richesses des pays du sud vers le nord et de
l’ouest vers l’est, rend les pays bénéficiaires de plus en plus forts et
exigeants. La contestation de la politique migratoire de l’UE n’est que le
début d’un mouvement général. La politique de défense va être une autre raison
d’affrontement entre ceux qui privilégient la tutelle de l’OTAN, ceux qui ne
veulent pas laisser le duo franco-allemand saisir la meilleure part de la
puissance militaire, et les mouvements d’opinion que cela va engendrer en
particulier en France et en Allemagne. La stratégie franco-allemande actuelle
ne peut que soit tourner au fiasco, soit donner à l’Allemagne une mainmise sur
toute l’Europe et transformer cette zone de paix intérieure en champ clos d’affrontements
guerriers et révolutionnaires. Donner à la puissance allemande, l’aide d’une France
plus faible mais conservant des atouts-maître à l’ONU et dans la puissance
nucléaire, c’est jeter celle-ci dans la gueule d’un loup autrefois repu mais
qui est en train de chercher une autre proie devant un avenir moins riant.
Macron est psychopathe ou traître… peut-être les deux. Sortons-vite de l’UE et
de l’OTAN avant que son hégémonie germano-américaine, aux mains des grands
lobbies judéo-américains, ne tue la France sauvée par De Gaulle après le
découpage du monde par les accords de Yalta en février 1945.
Le chemin de la Grèce passe par les
fourches caudines Berlinoises
Celui de l’Italie s’y dirige avec
réticence mais avec réticence
La France s’y engouffre librement mais en
état de faiblesse
Elle devrait bien relire l’histoire du
petit chaperon rouge !
Claude Trouvé
13/05/19
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