Le
gouvernement se livre à une manipulation des chiffres de la croissance qui
jette un voile sur la croissance réelle française. Cela mérite d’être expliqué
pour ne pas laisser l’impression que tout va bien. Le gouvernement a publié
récemment une croissance de 1,5% pour 2018 alors que juste avant l’UE
publiait par Eurostat une croissance de 1,2% pour la Zone euro. Au vu de
ces chiffres on pourrait penser que la France fait mieux que la zone euro. J’ai
pour ma part publié la croissance annuelle de quelques pays européens pour
lesquels Eurostat avait publié les PIB trimestriels en volume (désaisonnalisés et
corrigés des effets de calendrier) dont ceux de la France. Ce sont ces PIB qui
servent aux publications des croissances des pays. Ils sont plus réalistes que
les PIB en euros courants car ils tiennent compte de l’inflation.
La
croissance annuelle 2018 de 1,2% publiée pour la zone euro par Eurostat est
calculée à partir des croissances trimestrielles de 2018. Le même mode de
calcul donne une croissance de 0,92% pour la France ! Alors
pourquoi la France annonce-t-elle une croissance de 1,5% ? C’est ce que je vais expliquer le plus
simplement possible. En fait il y a deux façons de calculer la croissance mais
elles ne sont pas équivalentes. La première consiste à calculer après chaque
trimestre la croissance par rapport au trimestre précédent autrement dit le
rapport du PIB d’un trimestre par rapport à celui du trimestre précédent.
Chaque trimestre la France fait connaître ce chiffre aux français. Elle a
officialisé par exemple une croissance de 0,2% pour le 1er trimestre
2018 ou 1,002 fois le PIB du trimestre précédent. La multiplication de ces
chiffres de rapport sur les quatre trimestres donne la valeur de la croissance
annuelle. Ce sont bien les 1,2% pour la
zone euro et 0,92% pour la France. Ces deux valeurs sont cohérentes entre
elles.
Il
existe une autre façon de calculer la croissance annuelle, c’est tout simplement
de calculer le rapport du PIB total 2018 et du PIB total 2017. Par ce calcul on
obtient une croissance de 1,54% pour la France. Les deux chiffres sont
valables mais alors pourquoi sont-ils différents ? Tout d’abord il faut
s’entendre sur la méthode calcul. Or il semble que l’UE publie des chiffres
avec la 1ère méthode et la France avec la seconde. C’est une
anomalie grave qui jette la confusion dans les esprits. Si la France fait
partie de l’UE, elle devrait publier avec la même méthode que l’UE. Par
ailleurs ces chiffres sont différents parce qu’ils ne sont pas liés à la même
période de temps. La première méthode donne la croissance réelle de 2018, la
seconde la croissance entre la moyenne du PIB de 2018 et celle de 2017. C’est
un peu comme si on regardait la croissance sur une année glissante entre
juin-juillet 2017 et juin-juillet 2018. On a un décalage d’environ six mois.
Quelles sont alors les conséquences sur l’interprétation des chiffres ?
La
première est que l’on ne peut pas comparer le 1,5% de croissance annoncé par la
France et le 1,2% publié par Eurostat pour la zone euro. La France leurre ainsi
les français en laissant à penser que la France fait mieux que la zone euro, ce
qui n’est pas le cas. Si la croissance de la zone euro est calculée selon la
seconde méthode, elle est alors de 1,84% donc supérieure à la croissance
française. La publication d’Eurostat
avec la première méthode est celle qui donne la croissance réelle sur l’année
2018. Alors le graphique ci-dessous donne les croissances calculées à
partir des données publiées à ce jour sur Eurostat pour 7 pays plus l’UE et la
Zone euro selon les deux méthodes.
On
voit que les chiffres sont très différents pour l’Italie, la France, la Zone
euro, l’UE, et l’Autriche. Pour ces pays ou ensemble de pays la croissance
réelle est inférieure à celle sur une année à cheval sur 2017 et 2018.
Autrement dit ces pays sont en perte de croissance nette. L’Italie se dirige
vers la récession et la perte de croissance sur la zone euro est spectaculaire.
La France est en perte nette de croissance et cela est encore plus visible si
on calcule l’année 2017 avec la première méthode qui donne une croissance 2017
de 2,82% à comparer au 0,92% de 2018. C’est une chute vertigineuse qui peut
conduire à la récession en 2019 ! Si l’UE et la Zone euro sont en perte de
croissance, ce n’est pas le cas pour la Lituanie et pratiquement pas le cas
pour l’Espagne, le Royaume-Uni et la Norvège. Ceci montre, s’il fallait encore
le démontrer, que l’euro ne nous protège pas plus que l’UE, puisque le
Royaume-Uni a la Livre et que la Norvège n’est pas dans l’UE.
La
France veut pavoiser avec 1,5% de croissance et montrer qu’elle s’approche de
sa dernière prévision de croissance à 1,6% mais la réalité est beaucoup plus
dure si l’on s’intéresse à la croissance réelle des pays représentés ici. Le
graphique ci-dessous donne les valeurs de croissance réelle du PIB en 2017 et
2018 (1ère méthode).
On constate la bonne performance relative de la France en 2017 par rapport à la zone
euro et à l’UE et en même temps la chute la plus inquiétante en 2018 avec une
perte de -1,90% ! Contrairement à ce que l’on pouvait conclure à partir du
graphique précédent, l’Italie ne perd que 1,5% comme la Zone euro mais sa
croissance la conduit bien à la récession. La perte importante de la Zone euro
signifie très probablement une perte importante de l’Allemagne mais je ne
dispose pas des chiffres du 4ème trimestre de ce pays. On peut en
faire une évaluation prévisionnelle en prenant la croissance entre le 3ème
trimestre 2017 et le même en 2018, on trouve une croissance de 1,16%, valeur
probablement optimiste. Le couple franco-allemand est donc en perte de
croissance. Ceci va jouer sur la politique économique de ces deux pays et sur
leurs relations bilatérales, comme on vient de le voir avec le traité
d’Aix-la-Chapelle.
Alors
que les discussions sur le Brexit sont encore en cours avec une sortie
néanmoins actée dans les faits quelle que soit la date réelle ou l’accord
conclu ou non, le Royaume-Uni montre qu’il a mieux résisté que la France à la
baisse générale de croissance. La Livre n’a pas été un handicap et on peut
faire la même réflexion pour la Norvège où être hors de l’UE est plutôt
bénéfique dans la résistance à la décroissance européenne. Si l’Espagne s’en
tire bien c’est sans doute à une politique mieux adaptée que la nôtre car elle
montre en plus une baisse nette du chômage. En conclusion la France cache
encore par une manipulation des chiffres sa perte de croissance économique mais
le masque va tomber d’une façon terriblement cruelle en 2019 car on ne peut le
cacher bien longtemps encore. Les promesses tout azimut de Macron sur des
points de détail masque, d’une part la non-réponse à l’appel des gilets Jaunes
pour une démocratie beaucoup plus participative et un rejet de l’UE donc de son
représentant Macron, et d’autre part de l’impossibilité de répondre à toutes
les aspirations corporatives issues du Grand Débat National. En effet la
croissance en berne ne peut que conduire à une augmentation du déficit
budgétaire, ou (et) à une politique d’austérité encore plus dure sur les
citoyens à base de dégradation des prestations sociales et du service public,
de vente de patrimoine, de dénationalisation, de transfert d’une poche dans une
autre comme la CSG sur les retraités, d’augmentation de l’âge de départ à la
retraite, de baisse des pensions et de creusement des inégalités dans une
politique de l’offre mortelle en cas de faible croissance.
La récession ou presque pend au nez de
la France dès 2019
L’UE et la Zone euro non seulement ne
nous protègent pas
Mais ils nous enfoncent dans une spirale
mortelle
Dans laquelle l’Allemagne tente de s’échapper
En élargissant sa puissance sur la
France.
Dans l’UE, le RIC est une chimère.
Sortons vite pour sauver
La démocratie et
Notre pays !
Claude Trouvé
13/02/19
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