Le
précédent article a montré que les prévisions à très long terme sont très piègeuses
et que les conclusions à en tirer doivent être perpétuellement remises en
cause, que ce soit pour la température du globe ou la population mondiale. J’ai
beaucoup travaillé dans les perspectives à long terme qui permettent de
réfléchir et de définir un cap à tenir… jusqu’à ce que la réalité constatée
dans le court et le moyen terme vous oblige à changer de cap. Il existe
pourtant des règles de bon sens. Plus la préoccupation est certaine, plus elle
est importante, et plus ses effets sont immédiats, plus elle doit retenir
l’attention des gouvernants et plus son urgence est grande. La croissance
rapide de la population mondiale remplit ces trois critères, la croissance de
la température mondiale ne remplit pas celui de certitude. Par ailleurs ses
effets ne sont pas brutaux mais progressifs. Les phénomènes migratoires ont une
brutalité d’effets à court terme plus préoccupante que par exemple la montée
lente et progressive des eaux à raison de 1 à 34mm/an.
On se doute que la
montée inexorable de la population mondiale n’est pas de la même valeur partout
dans le monde et il est indispensable d’en avoir une idée spatio-temporelle. Je
vais me focaliser sur l’année 2035 suffisamment proche pour ne pas trop
entacher d’incertitude les prévisions et sur l’hypothèse basse 2, celle d’une
décroissance progressive du taux de croissance annuelle. Je pense que tout
phénomène trouve en lui-même une régulation, comme on dit « les arbres ne
montent pas jusqu’au ciel ». Le graphique ci-contre représente l’évolution
de la population en 2035 pour de grands ensembles géographiques et économiques
du monde actuel. Trois zones géographiques retiennent immédiatement
l’attention, deux en Asie et une Afrique, par la rapidité et l’importance de
leur croissance. Il s’agit de l’Asie du Sud, de l’Est et du Pacifique d’une
part, et de toute la partie subsaharienne de l’Afrique. Ces trois ensembles de
pays représentent une croissance de 1,08 milliards sur les 1,73 milliards
d’accroissement total. On note que l’accroissement très spectaculaire de
l’Afrique subsaharienne la rend en 2035 plus peuplée que l’ensemble des 35 pays
membres de l’OCDE.
Si le nombre
d’humains en plus est important, la vitesse d’évolution ne l’est pas moins et
permet de mieux cibler les changements démographiques. On retrouve bien les
trois ensembles cités plus haut mais cette fois c’est toute l’Afrique qui est
en tête et entraîne la croissance mondiale sur un rythme de 2,04%/an. A
l’inverse les pays européens sont les derniers dans la croissance de
population. La croissance annuelle de population de l’union Européenne est
réduite au minimum de 0,204%. Elle n’est pas loin de son apogée puis de son
dépeuplement. On est étonné à première vue de voir que l’Asie de l’Est et du
Pacifique est en dessous non seulement de la croissance mondiale mais de celles
des Amériques. Ceci mérite une étude plus fine sur la Chine et le Japon. On
commence à comprendre la raison des flux migratoires qui viennent désormais
essentiellement de l’Afrique et de l’Asie du Sud (Iran, Afghanistan, Pakistan,
etc.).
Mais le cas de
l’Europe est particulièrement intéressant car elle devient de plus en plus un
nain qui se rabougrit. La croissance de sa population est désormais 10 fois
moins importante que celle de l’Afrique subsaharienne et plus de 4 fois moindre
que celle du monde entier. Son pouvoir d’achat et sa qualité de vie en font
encore un déversoir potentiel pour toute l’Afrique. Mais en 2017 l’Afrique
comptait 1,14 milliards d’habitants, en 2035 ce sera 5,90 milliards. Je
rappelle ici que ces chiffres proviennent de l’hypothèse basse de l’évolution
mondiale. L’Europe montre les signes de son déclin car plusieurs pays sont
passés dans la décroissance de population dont les Pays Baltes, la Hongrie et
la Russie. A l’inverse les pays du Nord l’Irlande, l’Islande, la Norvège sont
parmi les pays en croissance, mais seule l’Irlande est au-dessus de la
croissance mondiale. Ce fait remarquable de ce petit pays n’est sans doute pas
déconnecté de ses très bons résultats économiques.
Ces
projections sont affublées d’une condition que l’on exprime par « toutes
choses égales par ailleurs ». C’est cet ajout qui demande une
réactualisation permanente des prévisions, mais elles sont une indication
précieuse sur les tendances. C’est ce que n’a pas fait le GIEC à partir de son
rapport AR5 qui a servi pour la COP24 sur le réchauffement climatique. Si cela
avait été le cas il aurait dû prendre en compte le décalage des années 2017 et
2018 dont les températures mesurées sont en total décalage par rapport aux prévisions
alarmistes. Donc en matière de prévisions, la plus grande prudence s’impose.
Il est temps d’en
revenir à notre pays et de voir la direction démographique vers laquelle il se
dirige, après avoir vu les tendances mondiales, par continent et par pays
européen. Le graphique ci-contre montre l’évolution du taux de natalité depuis
l’entrée de la France dans la zone euro. Elle est représentative de la
confiance des français dans l’avenir. L’appréhension de l’entrée dans l’euro a
fait décroître le taux de natalité de 2000 à 2003. Il s’en est suivi une
période de stabilisation jusqu’en 2010. La crise 2008-2009 a enclenché une
période de doute sur l’avenir au sein de l’UE et le moral des français n’a
cessé d’influer négativement et de plus en plus sur le taux de natalité jusqu’en
2017. A raison de 0,3%o par an, la population française
va vite atteindre le stade de la décroissance de population en dehors d’un solde
positif entre immigration et émigration. La démographie devrait prendre alors
une place beaucoup plus importante que la transition énergétique dans la
politique de notre pays. Il faut aller plus loin dans l’analyse et le prochain
article sera le dernier dans cette série.
La démographie vient de rappeler son
importance
Et le traité de Marrakech en est l’illustration.
La répartition mondiale des peuples
évolue
Et change les puissances économiques.
L’Europe s’éteint, l’Afrique explose,
La France ignore la démographie
Et se prépare à disparaître.
Claude Trouvé
24/12/18
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