Le gouvernement avait
tendu un piège avec la loi El Khomri, le piège s’est refermé sur lui. En vassal
discipliné de Bruxelles, il avait aménagé une loi, foncièrement favorable au
Medef, selon les directives de Bruxelles, tout en y associant quelques
avantages pour les salariés dont le report des droits à la formation en cas de
changement d’entreprise. Ce point était habilement cohérent avec la priorité
donnée à la formation, sans laquelle la mobilité est théoriquement limitée. Ceci
n’est que théorique car, pour garder ses droits, le demandeur d’emploi est
finalement obligé d’accepter un poste pour lequel il n’est pas obligatoirement
formé ou de sortir de Pôle Emploi, ce qui permet de diminuer le nombre de
demandeurs. C’est souvent le cas dans les emplois de service. Nombre de
salariés sont formés sur le tas, soit dans des formations internes à l’entreprise,
soit sur le tas sous forme d’apprentissage. Pour avoir embauché du personnel,
je sais que la motivation du candidat, son adaptabilité sont souvent beaucoup
plus intéressantes pour l’employeur que sa formation. La formation exercée par
les entreprises spécialisées est souvent un énorme gâchis d’argent par rapport
au résultat obtenu.
Ceci étant, les concessions
aux salariés devaient permettre de faire passer l’essentiel de la loi, le « détricotage »
des 35 heures, tout en criant maintenir fermement leur existence, et la
dépossession des syndicats de leur pouvoir de nuisance dans les négociations
par entreprise et non par branche. Tout cela est fondé sur le diktat de
Bruxelles pour laquelle la compétitivité se gagne d’abord par l’austérité sur
les salaires et la flexibilité du temps de travail. Il n’est évidemment pas
question d’alléger les charges des entreprises, ce serait trop simple. Il
convient d’empiler des avantages, types crédit d’impôt et avantages à l’embauche,
toutes choses administrativement compliquées pour les petites entreprises et
qui génèrent des effets d’aubaine qui en diminuent l’efficacité. On oublie
ainsi que c’est la monnaie qui est en cause dans tous nos échanges en dehors de
la zone euro. L’euro est surévalué pour notre pays et adapté pour l’économie
allemande. En fait l’occasion est trop belle de demander aux salariés d’assumer
le manque de compétitivité des entreprises.
La politique socialiste n’est
plus que libérale et tourne franchement au capitalisme car les bénéficiaires
sont les grands groupes dont les profits dans les opérations financières sont
souvent plus importants que ceux issus des produits vendus. Leur présence dans
les paradis fiscaux n’est un secret pour personne et ils disposent de tous les
moyens pour échapper à l’impôt. Leurs possibilités de délocalisation des sièges
et des usines leur donnent un éventail dont ne disposent pas les petites
entreprises sur lesquelles la monnaie impose son joug contraignant. La loi
Travail est donc une loi ayant pour but de maximiser les bénéfices des
entreprises. Le Medef possède un droit de chantage avec la menace de la
délocalisation et le gouvernement est piégé par Bruxelles et le Medef qui a de
nombreuses entrées dans les Commissions bruxelloises.
Cette loi est un piège à
salariés et à syndicats dans laquelle le salarié obtient de petits avantages à
court terme et oblitère l’avenir. L’attitude de la CFDT ne peut s’expliquer que
par un discours masquant les vrais buts de la loi, buts qui échappaient à la
majorité des citoyens. La perspective d’un recyclage des secrétaires, comme
Nicole Notat et François Chérèque, ne font qu’introduire, avec le gouvernement une
collusion finalement néfaste au salarié. L’extrême gauche a senti le piège
ainsi que le FN dans une moindre mesure. La CGT et FO se sont mobilisés. Les
citoyens, au départ assez favorables à une loi dont on vantait l’importance
pour l’économie française et connue comme portée par Emmanuel Macron, ont
ouvert les yeux. La ténacité des manifestants, même ternie par les casseurs, la
répression policière et le refus du gouvernement de négocier les points forts
de la directive bruxelloise, ont finalement fait basculer l’opinion publique.
La
bataille a tellement duré et les manifestations ont pris tellement d’ampleur
dans l’ensemble des grandes villes, que les syndicats ne peuvent plus reculer.
Le gouvernement ne peut plus renouer le dialogue et s’enferre dans l’interdiction
de manifestations. Son argumentaire est faible mais les forces policières ne
peuvent plus assumer tout, les attentats, les casseurs, la protection de l’Euro
2016 après celle de la COP21, et celle des manifestants. Il devient difficile d’expliquer
que l’on préfère assurer la protection de l’Euro 2016 plutôt que le respect du
droit à manifester. Ni les droits
sociaux, ni les droits démocratiques ne sont négociables. Le Président Hollande
a oublié le candidat Hollande : « Le
seul droit que nous avons, c’est le droit de manifester autant que
nécessaire. »
Déjà, sur une pétition en
ligne plus de 120 000 citoyens s’adressent au gouvernement Valls, UE, MEDEF et
lui disent « je ne respecterai pas l’interdiction de manifester ».
Les députés s’en mêlent et des politiques iront manifester demain. L’interdiction
renforce la cohésion entre les syndicats de salariés et la CFDT ne peut plus
rester isolée sur la défense du droit à manifester. L’intersyndicale ne peut
que maintenir le défilé et non une réunion statique qui limite forcément le nombre
de manifestants à la surface attribuée. Le gouvernement est dans la nasse, il n’y
a plus d’issue sauf un autoritarisme autiste qui s’arcboute sur le 49.3 et l’article 2 de la loi.
La droite a
encore perdu une occasion de mettre en difficulté le gouvernement et d’en
précipiter sa chute. Son acquiescement initial la décrédibilise et sa
volte-face en stigmatisant le manque de fermeté du gouvernement arrive bien
tard lorsque l’on a vilipendé les premières manifestations syndicales. Pour le
gouvernement c’est un refus d’obtempérer qu’il doit assumer de la part des
syndicats avec un accord d’une « manifestation
qui va tourner en rond de façon statique » comme le dit avec humour
Jean-Luc Mélenchon. Le discours de
Manuel Valls devant l’Assemblée, discours où il insiste sur la décision prise à
trois avec le Président de la République et le Ministre de l’Intérieur est un
aveu de faiblesse d’un homme qui n’est plus capable d’assumer seul la
responsabilité des actions gouvernementales. C’est aussi une manœuvre du
Président pour faire assumer le poids, qu’il ne veut pas assumer seul, sur son
Premier Ministre.
Ce mini-parcours de la Bastille à la Seine est l’image
d’un gouvernement acculé qui cherche dans un autoritarisme inutile un substitut
à la fermeté qu’aurait dû exercer un gouvernement fort. Il y a un décalage
entre les préoccupations du gouvernement et ce qui se passe sur la scène
internationale. Angela Merkel parle d’augmenter le budget de la défense
allemande. La Pologne apprête ses troupes à en découdre avec la Russie. L’OTAN
claironne qu’une simple cyber-attaque russe sur un pays de l’OTAN serait une
raison de déclencher un conflit auquel elle se prépare dans les Pays Baltes, en
Pologne et en Roumanie avec de nouvelles armes offensives pointées vers la
Russie. « Les bases de l’OTAN croissent
plus vite que les McDonalds » selon le journaliste américain Robert
Bridge et il devient impossible de les dénombrer. Pendant ce temps on apprend
que Daesh a utilisé des armes chimiques dans la bataille du carrefour de Raqqa-Tabaqa
et il n’en est pas à son premier coup d’essai. Pensez-vous un instant que cela
soulève une opération punitive mortelle de la part de la coalition dont
nous faisons partie, comme ce fut le cas pour Bachar el-Assad ? Ce sera au
plus un simple pschitt !!
Brexit,
intense flux migratoire sud-nord, guerre Irak-Syrie,
Prémisses
d’éclatement d’une bulle financière
Laissent
la place à une bataille intérieure
Sur
une loi inutile dans le chaos
D’un
Président discrédité.
Partez
Monsieur !
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon
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