Olivier Véran et Agnès Buzyn
mis sous le feu d’une enquête judiciaire, Didier Raoult vilipendé et humilié
par toutes les instances médicales françaises, le confinement se termine en
règlement de comptes. La bataille des chiffres se fait dans la plus basse
malhonnêteté. On reproche au Pr Raoult les chiffres avancés alors que ceux-ci
émanent des statistiques publiées dans les médias. Ou ces chiffres sont faux et
ce sont les auteurs ou les journalistes qu’il faut accuser, alors pourquoi ne
pas les avoir dénoncés plus tôt, ou ils sont vrais et une enquête sur le
mauvais score de santé en Ile-de-France doit être diligentée. Tout sera fait
pour étouffer l’affaire et pour manœuvrer par derrière pour empêcher le Pr
Raoult de troubler les responsables politiques et médicaux du système de santé
sous la coupe des grands laboratoires. Gilead ne lâchera pas son remdesivir avant
l’arrivée du vaccin et poussera de toutes ses forces pour que l’Etat alimente
la peur du rebond.
Le
satisfecit affiché par Edouard Philippe et Castex est une hypocrisie éhontée.
La France vit la levée de l’état d’urgence auréolée du titre de vice-championne
du monde du plus grand dégât global, sanitaire et socio-économique, de la
pandémie du COVID-19. Si sur le plan santé nous sommes à la 6ème
place, nous sommes à la première sur la perte de croissance et l’augmentation
de l’endettement à prévoir. La Suède, à la 5ème place des
décès/million d’habitants, fait un peu plus mal que nous sur le plan des décès,
mais a sur la France un avantage économique considérable en n’ayant pas confiné
à résidence. Si la Belgique va finir au plus haut niveau de décès par habitant,
elle semble avoir moins souffert économiquement. Si l’Italie a moins protégé
sanitairement sa population, je dois montrer de nouveau que l’évolution des
décès dans les deux pays par rapport à leurs populations respectives a été
rigoureusement la même durant les 40 jours qui ont suivi le jour d’atteinte du
1 décès/million. Pour la France ce 40ème jour correspond au 10
avril. Dès le lendemain les évolutions se séparent au bénéfice de la France.
Force est de constater que, hasard ou pas, cela correspond à la période de
début avril où l’usage de la chloroquine a commencé même officieusement dans de
nombreux hôpitaux. On ne peut pas pour l’instant trouver une autre explication
sauf par une étude comparative de chercheurs spécialisés sur les pratiques de
chaque côté des Alpes après le 40ème jour d’évolution de la pandémie.
Mais un fait
géopolitique majeur émerge de cette crise épidémique transformée en crise
économique par les pays de l’Europe de l’Ouest, trois pays ont échappé à la forte
mortalité, la Suisse, le Portugal et l’Allemagne. Avec une politique de
dépistage précoce, de tri, de confinement ciblé et d’incitation à la
distanciation physique, l’Allemagne a préservé au mieux son économie. Elle a
déconfiné plus tôt avec moins de contraintes imposées durant cette phase avec
une souplesse d’action donnée aux Lands. Ses frontières avec les Pays-Bas et la
Belgique sont restées très permissives. Avec 4,5 fois moins de décès qu’en France,
l’Allemagne sort grandie de cette épreuve. Parmi les pays les plus touchés au
monde (Belgique, Royaume-Uni, Espagne, Italie, France) notre pays affiche le
plus désastreux impact économique.
La gestion française de l’épidémie
avec le « quoiqu’il en coûte » est le choix de la dette à long
terme, celle que l’on repousse devant soi quand on ne sait pas traiter les causes
et que l’on minimise les effets. À défaut de prendre les bonnes mesures
comme l’a fait notre voisine allemande, la France plonge son économie déjà en
perte de vitesse avec -0,1% de croissance au 4ème trimestre 2019
dans une chute vertigineuse qui pourrait aller jusqu’à 20% de perte de PIB en
2020. Notre dette vue par l’UE pourrait dépasser les 120% du PIB en 2020, mais
vue par l’OCDE qui tient mieux compte de tous les engagements de l’Etat, elle est
déjà de 122% et pourrait s’approcher des 150% en 2020. La dette pour l’OCDE est
la somme des catégories d'engagements suivantes (le cas échéant) : numéraire et
dépôts, titres de créance, crédits, droits sur les régimes d’assurance, de
retraite et de garanties normalisées, et autres comptes à payer. Nous risquons
de devenir le 4ème pays le plus endetté du monde derrière le Japon,
la Grèce, l’Italie, et les Etats-Unis. Mais le Japon a l’essentiel de sa dette
détenue par les ménages japonais, ce qui n’est pas notre cas. D’où les regards
du pouvoir sur l’épargne des français. La perspective la plus dangereuse pour l’Italie
et la France, c’est de se voir incapable de rembourser le capital des emprunts
arrivant à terme, de demander de les repousser dans le temps, et de se voir
imposer des taux d’intérêts usuraires. C’est la situation grecque, où les grecs
travaillent pour payer les intérêts de la dette avec une épée de Damoclès de la
dette repoussée au-dessus de la tête pour des dizaines d’années et une mise sous
tutelle de fait.
La perte économique va générer une
perte d’emplois comme la France ne l’a jamais connue qui va pousser le taux de
chômage largement au-dessus des 10% dès la rentrée d’octobre. Le rebond
économique de sortie de confinement n’aura qu’un effet passager quand les
grands moteurs économiques auront pris toutes les mesures pour survivre. Les
licenciements, les délocalisations, les faillites vont se succéder sur toute l’année
car les mesures d’aide provisoires tiendront hors de l’eau les plus réactifs et
les plus solides mais laisseront finalement couler les autres. On va aller beaucoup
plus loin dans la perte d’emplois que ce que génère l’assainissement normal qui
veut que l’évolution économique tue les entreprises les moins solides et les
moins adaptatives pour en promouvoir de nouvelles en plus grand nombre dans une
économie de croissance. De la 7ème place de notre taux de chômage
dans l’UE, nous risquons de passer à la 2ème place du plus élevé derrière
l’Espagne !
L’Allemagne
aux commandes de l’Europe
Par sa perte de croissance, son
endettement, et son chômage, la France devient un pays à risque et un grand
pays malade dans l’UE des 27. A l’inverse l’Allemagne se sert de l’épidémie du
COVID-19 pour réaffirmer sa suprématie et sort de son doute sur l’intérêt de l’Allemagne
à continuer à appartenir à une UE en souffrance. Désormais l’Allemagne fait le
choix de pousser l’UE en avant parce qu’elle y voit son intérêt. Son économie
relativement peu atteinte, son équilibre budgétaire peu fragilisé, son
endettement possible vu qu’il était en phase de résorption, son faible taux de
chômage, son plus haut solde du commerce extérieur dans le monde, la placent de
facto comme la super puissance européenne. L’UE sous influence allemande
devient un objectif depuis le départ du Royaume-Uni et la chute économique de
la France. L’Allemagne peut reconstruire l’UE à sa manière et se placer comme
le pays leader de la relance en portant secours à la France, principal client et
enrichisseur de l’Allemagne. Plus les capacités économiques de la France seront
en-dessous de celles de l’Allemagne, plus le lien entre l’Allemagne et la France
seront étroits mais dans une dépendance de plus en plus grande. Angela
Merkel résume parfaitement sa pensée à propos du plan de relance
franco-allemand : « Ce faisant bien sûr, nous agissons aussi dans notre
propre intérêt. Il est dans l’intérêt de l’Allemagne que nous ayons un marché
unique fort, que l’Union européenne devienne de plus en plus unie et qu’elle ne
s’effondre pas. Ce qui était bon pour l’Europe était et demeure bon pour nous
» Le Monde, 1er juillet 2020, p. 6.
Angela Merkel va assurer la
présidence du Conseil des Ministres de l’UE et elle veut en terminer avec l’opposition
entre les pays « frugaux » du nord de l’Europe, dont l’Allemagne faisait
partie, (Autriche, Danemark, Pays-Bas, Suède qui rejettent le principe de
subventions proposé par la Commission européenne) à l’égard des pays les plus
touchés par la pandémie. L’heure est à la solidarité sous la houlette
allemande :
« La pandémie a entraîné un énorme
fardeau pour l’Italie et l’Espagne, par exemple, tant sur le plan économique et
médical que, en raison de nombreux décès, sur le plan émotionnel. Dans ces
circonstances, l’Allemagne ne peut pas seulement penser à elle-même, mais doit
aussi être prête à faire un geste de solidarité extraordinaire. C’est dans ce
sens qu’Emmanuel Macron et moi-même avons fait notre proposition »
La position allemande est
pragmatique, mieux vaut pour l’Allemagne une UE unie et demandant un effort
financier allemand plutôt qu’une UE brisée en deux ou trois blocs où l’Allemagne
serait perdante économiquement et où le rêve pangermanique serait perdu pour
longtemps. A l’heure de la pandémie où a régné le chacun pour soi, l’Allemagne veut
recentrer les Etats sur leurs points communs et lutter contre le
protectionnisme. L’éclatement de l’UE avec la possibilité de résurgence de
droits de douane pourrait être plus fatal à l’Allemagne qu’un fardeau alourdi pour
elle dans l’entraide mutuelle. Mais l’Allemagne tient désormais l’UE dans sa main.
La présidence de la Commission européenne est assurée par une Allemande, Ursula
von der Leyen. Toutes les missions importantes au sein de l’UE ont des
représentants allemands en particulier pour tout de qui touche à la Finance. L’Allemagne
verrouille pratiquement toute la marche de l’UE et même influe lourdement sur
le choix des représentants étrangers. La présidence de la BCE, attribuée à Christine
Lagarde, si tant est que celle-ci ne soit pas plus américaine que française, est
un organisme indépendant dont la mission est définie par les traités et vient d’être
recadrée d’ailleurs par la Cour constitutionnelle allemande de Karlsrhue pour
dépassement de ses missions dans l’attribution directe de prêts aux Etats.
La partie n’est pas gagnée pour
Angela Merkel mais elle a tracé la voie allemande en reléguant les visions
idéologiques de Macron sur l’UE dans un pragmatisme qui enferme notre
Président. Elle a posé les bornes de l’effort allemand en refusant la
mutualisation des dettes. L’Allemagne entend mesurer son effort sans contrainte
de l’UE. Cela étant les pays « frugaux » et le groupe Visegrad, des
pays de l’Est très à cheval sur la défense de leur identité propre et signant entre
eux des accords sans l’aval de l’UE, sont des obstacles de rébellion toujours
en éveil. Les relations avec l’OTAN sont de plus en plus compliquées, avec
Trump qui entend faire payer plus l’UE pour l’OTAN, et le conflit avec lui sur
le gazoduc Norh Stream 2 amenant du gaz russe pour faire de l’Allemagne la
plaque tournante de la distribution du gaz sur l’Europe. D’ailleurs l’Allemagne
veut devenir aussi le château d’eau de la distribution électrique en devançant
la France comme plus gros exportateur. Tout recul de la France, pays
exportateur d’électricité, comme la fermeture de Fessenheim, renforce sa
position de leader.
Par la primauté de l’importance de
son soutien financier de sortie de crise, sa mainmise sur les principaux
rouages du fonctionnement de l’UE, son importance stratégique pour l’OTAN, sa
prédominance dans la fourniture des énergies, gaz et électricité, l’Allemagne dispose
désormais des atouts de dépendance des autres Etats pour mettre l’UE à sa botte.
L’affaiblissement spectaculaire de la France lui ouvre les portes. C’est sa
position qui va prévaloir face aux deux grandes puissances du monde, Etats-Unis
et Chine, et elle sera la seule à pouvoir garder une relation économique forte
avec la Russie. Chaque chose en son temps mais l’habileté, et le pragmatisme patient
d’Angela Merkel ne lâchera pas dans le court terme l’arrivée de l’Allemagne au
Conseil de Sécurité de l’ONU dans un siège présenté par la France qui lui sera de
plus en plus redevable.
Empêtrée dans une catastrophe
économique et sociale qui va véritablement marquer ce pays dans le quatrième
trimestre 2020, la France va devoir se retrouver des alliés pour pouvoir peser
sur les décisions européennes. Malheureusement les contacts avec l’Italie sont
empreints d’une teinte de rivalité de leadership des pays cigales, et la
mayonnaise ne prend guère avec l’Espagne. La France est désormais isolée et
cela d’autant plus que le Royaume-Uni va quitter définitivement l’UE
probablement avec un « No deal » ou presque. Les français, qui
n’ont toujours pas tiré un trait sur le lyrisme arrogant de Macron et vont
encore croire que ce nouveau gouvernement est susceptible de créer un rebond
nous évitant de continuer à descendre relativement au reste de l’UE, n’ont pas
d’analyse des médias pour les avertir du danger d’une revanche allemande. Cette
victoire allemande se prépare et se fera en douceur avant que le joug se fasse
sentir. Attachés aux idées généreuses et de pensée mondiale, les Français aiment
qu’elles soient reconnues dans le monde entier mais s’oublient ensuite dans
leur application et dans les bénéfices à en tirer. André Comte-Sponville : « Les
Français adorent donner des leçons au monde entier sans en recevoir de personne
».
De la déconsidération d’une partie du
peuple
De la fracture des systèmes de
protection
De la désinformation et de la peur
Va sortir une France affaiblie
Qu’une Allemagne
Revancharde
Engloutira.
Claude Trouvé
08/07/20
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