Le paiement des
chômeurs et des retraités est sur la table du gouvernement dans le cadre d’une
politique d’austérité qui s’applique préférentiellement au peuple en excluant
d’office le 0,1% des plus riches qu’il
faut privilégier parce que c’est le cœur de la renaissance française… enfin
c’est ce que l’on veut nous faire croire. Retraité de longue date avec une
pension encore largement au-dessus du revenu médian, je pourrais encore
facilement admettre de faire un geste de solidarité nationale si ce geste
n’était pas qu’un transfert d’argent du bas vers le haut des plus riches sans
aucune amélioration du SMIC, des prestations sociales et du service public pour
le reste du peuple. Ce n’est évidemment pas le cas et de toute façon on ne m’a
pas demandé mon avis pour ponctionner ma retraite. D’ailleurs
subrepticement cette retraite est rognée pour ne pas suivre l’inflation. Rien
qu’en 2018 celle-ci m’a dépossédé de 2,1% de pouvoir d’achat. A ce rythme il
devient dangereux de dépasser 25 ans de retraite et il faut pousser les centenaires
jusqu’aux portes du Secours populaire. Le constat est donc que l’Etat a de plus
en plus de mal à payer les pensions de retraite, c’est un fait et il prévoit
que demain ce sera pire. Il ne nous parle pas de la gestion désastreuse des
comptes publics où les dépenses augmentent toujours, même si leur pourcentage
sur le PIB diminue un peu alors que les taux d’emprunt sont au plus bas. De
plus celles qui sont réajustées ne sont pas les dépenses de fonctionnement mais
celles d’investissement. J’en prends pour exemple la dégradation rendue
officielle de nos infrastructures routières publiques où 7% de nos tunnels et
ponts présentent un danger mortel… comme le viaduc de Gênes.
L’Etat va donc
nous proposer une cure d’austérité sur les retraites et après avoir fait une
première action sur les retraités, il va désormais traiter les actifs, futurs
retraités. Les choix concoctés vont se résumer à accepter pour sa mort actée de
désigner la guillotine, la chaise électrique ou la lapidation. En France on ne
parle plus que de rogner ici ou plutôt là, ou de prendre ici pour donner là.
L’Etat se sert des statistiques d’Eurostat pour mettre la France en accusation
d’avoir les indemnités chômage et les retraites les plus élevées de l’UE. L’Etat
met donc en cause les pensions publiques de retraite en omettant de dire que la
politique menée depuis au moins 2007 pousse insensiblement les retraités à se
pourvoir dans le privé pour leur vieillesse dans les assurances-vie. Il s’agit
donc d’un choix politique qui doit être regardé dans une politique socio-économique
globale. L’endettement public et la perte de croissance conduisent les Etats à
ponctionner les inactifs selon une politique de facilité. C’est la même qui
consiste à augmenter les impôts pour combler le déficit budgétaire. Quelle est
la situation réelle des dépenses vieillesse de l’Etat et des sommes allouées
aux retraités ? Autrement dit les affirmations actuelles de l’Etat et les
réclamations des retraités en gilet jaune sont-elles réelles et justifiées ?
Les deux graphiques ci-dessous vont nous permettre de commencer à y répondre.
Le graphique de gauche
montre que la France n’est pas le
pays de l’UE dépensant le plus pour les dépenses vieillesse par rapport à son
PIB selon les données d’Eurostat, il s’agit donc d’une désinformation. Elle est en 3ème
place derrière la Grèce et l’Italie. Il est peu probable que cette position ait
changé en 2018 mais les chiffres ne sont pas encore publiés. La France avec
15,11%/PIB reste au-dessus de la Zone euro (13,34%) et de l’UE (12,62%) et surtout
de l’Allemagne (11,75%) et du Royaume-Uni (10,79%). Il faut bien noter qu’il s’agit
ici des dépenses publiques et non de l’ensemble des dépenses qui comprennent
les dépenses privées. Dans un article précédent j’ai montré qu’en 2013 le
Danemark ajoutait 6% de dépenses privées et la Suisse 5% alors que ceci ne
représente que 0,5% en France et 0,2% en Allemagne. Il en résulte que les
dépenses totales du Danemark et de la Suisse sont nettement plus importantes que
celles de la France, donc les pensions des retraités. Il s’agit d’un choix
politique de chaque pays.
Le graphique de
droite intéresse les retraités puisqu’il représente les dépenses affectées aux
pensions des retraités par an. Les sommes mentionnées ne représentent pas les
pensions versées auxquelles il faut retrancher des frais administratifs variables
par pays et de l’ordre de 1 à 2%. Cette fois la France est en 13ème
place de la valeur des dépenses annuelles pour les pensions par retraité, ce
qui reste pour la France une très bonne approche de la pension moyenne. Cette
fois le montant de la pension française dépasse celui de l’Allemagne, du Royaume-Uni,
de la Zone euro et de l’UE. Toutefois si l’on rajoute les 3,1% de dépenses
privées en 2013 publiées par l’OCDE, le montant britannique est égal au montant
français, ce qui n’est par vrai pour l’Allemagne. Ceci explique sans doute le
poids de l’Allemagne dans la politique européenne concernant le montant des
retraites, car celle-ci se trouve avec un pays de plus en plus vieillissant. Derrière
nous on trouve la Grèce et le Portugal dans une situation comparable à la nôtre
pour les dépenses privées. Donc les
retraités français ne sont pas des privilégiés et n’ont donc aucune raison de supporter
une baisse de leurs retraites, ni de le faire au nom de l’égalité plutôt
avec l’Allemagne (-4%) qu’avec l’Italie (+11%), l’Espagne (+13%) et la Belgique
(+34%) qui ont une retraite supérieure. On notera que les écarts entre les valeurs
les plus faibles et les plus fortes sont très différents selon que l’on regarde
les dépenses/PIB ou les dépenses/retraité pour ce qui concerne les dépenses
publiques. Dans le premier cas on trouve un facteur 3 et de l’autre un
facteur 20. Les dépenses pour la vieillesse apparaissent donc comme une
décision éminemment politique et plus ou moins déconnectée de la réussite
économique.
En France d’ailleurs
elle est liée à l’inflation, autrefois d’ailleurs strictement. Il est
maintenant intéressant de regarder l’évolution des retraites dans notre pays,
et plus particulièrement sous l’angle pouvoir d’achat. On constate que si le pouvoir d’achat avait augmenté de 0,40% entre
2013 et 2016, il aura baissé de 3,47% entre 2016 et 2019 si l’on s’en tient
à l’inflation prévue au budget 2019. Pour être exact il faut noter qu’un ajout
exceptionnel de 40 euros a été perçu en 2014 pour les salaires mensuels
inférieurs à 1200 euros. Ceci indique que pour les autres cela s’est traduit
par une aggravation supplémentaire de leur pouvoir d’achat, la dépense globale étant
la même. Les réclamations des retraités
en gilet jaune et de leurs sympathisants sont donc pleinement justifiées.
Ces taux d’inflation
sont fournis par Eurostat et évalués sur des mesures statistiques contestables dans
chacun des pays. On sait les discussions sans fin sur l’assiette de produits
suivis par l’INSEE, assiette qu’il faudrait faire évoluer sans cesse. Par
ailleurs la réalité prise en compte par les gouvernants c’est la variation annuelle
du PIB en volume, c’est-à-dire corrigé de l’inflation et des effets de calendrier,
c’est-à-dire le PIB officiel pour le calcul de la croissance. Elle peut être
comparée à la variation du PIB brut au prix du marché pour en déduire l’inflation
dans chacun des pays et les variations de la monnaie par rapport à l’euro. Le
tableau ci-contre montre les différences d’inflation, taux de change compris,
sur 3 ans de 2013 à 2016. Les résultats peuvent paraître à priori surprenants mais
les extrêmes observés sur l’Islande et la Norvège rendent simplement compte d’une
manipulation monétaire en plus ou en moins. C’est aussi le cas de la Suisse et
du Royaume-Uni avec une baisse de la Livre de 8% en 2016. L’effet monétaire ne
joue évidemment pas entre les pays de la zone euro. En ce qui concerne la France,
le taux d’inflation de +1,99% paraît plus réaliste que celui issu des calculs
de l’INSEE à + 0,40%. Ceci montre la difficulté rencontrée pour connaître l’impact
sur les niveaux de vie, donc le pouvoir d’achat des français. Le même type de
calcul sur la période 2014-2018 donne 3,74% à comparer avec 3,42% selon les
indices INSEE. Ceci confirme au passage que les montants des pensions des retraités français ont bien baissé, hors
ponction nouvelle de la CSG, de 3,5% entre 2013 et 2018.
Pour se faire une idée
comparative et comprendre que le pouvoir d’achat n’est jamais déconnecté de la vie
économique, alors que le critère a longtemps été seulement lié à l’inflation
pour devenir une simple variable d’ajustement dans un contexte budgétaire, il
est bon de regarder ce que l’on observe sur le pouvoir d’achat réel dans un
ensemble large de pays d’Europe. La France (+0,38%) et l’Allemagne (+0,55%) n’y
brillent pas particulièrement, ce qui montre que leur croissance ne profite que
peu aux retraités. Ce n’est pas le cas de l’Espagne (+2,84%) et du Royaume-Uni (+3,04%)
où la forte dévaluation a été largement compensée par une hausse des pensions.
La Norvège (+13,88%) profite d’une forte évolution de la monnaie et d’une
croissance des pensions. A contrario les pays du sud, de l’est, de la Suède
(-2,39%), du Danemark (-6,41%) et de l’Irlande (-6,92%) font peser sur les
retraités le poids d’une politique d’austérité. Cette représentation des retraites
hors inflation renseigne sur le pouvoir d’achat en monnaie euro, quelle que
soit la monnaie du pays. Elle tient compte de l’ensemble des achats de produits
provenant des autres pays de l’UE.
Il est intéressant de
voir sur les principaux pays européens quelle est la part de la croissance qui revient
aux retraités, et au fond quelle est leur politique sociale sur ce sujet. Le
tableau décrypte bien les politiques sociaux économiques des Etats. Il y a d’ailleurs
fort à parier que l’on obtiendrait des résultats similaires avec les indemnités
chômage. L’Italie est le pays qui a fait souffrir le plus les retraités par sa
politique d’austérité. Non seulement elle a diminué le pouvoir d’achat mais
ceci n’a pas profité à la croissance. L’Allemagne et la France étaient les pays
appliquant une politique d’austérité sur les retraites avec un faible retour
financier sur les retraites. A l’inverse l’Espagne et le Royaume-Uni étaient
beaucoup plus attentifs à la participation des retraités à la croissance, d’ailleurs
beaucoup plus élevée que dans les trois autres pays.
La conclusion de
cette petite étude est que le gouvernement français fait une désinformation
caractérisée sur son leadership en matière de retraite dans l’UE. En réalité il
mène comme ses prédécesseurs une politique prenant les dépenses pour les
pensions comme une variable d’ajustement au service d’une politique d’austérité
dirigée essentiellement sur le peuple et non sur son fonctionnement propre. Les
prestations sociales sont d’ailleurs dans leur ensemble, la vache à lait de l’Etat.
La notion d’équilibre en matière de prestations sociales, donc de retraites, n’a
pas de sens en soi. Il s’agit d’une option politique. Privatiser les retraites serait
donner le pouvoir au privé, chargé non seulement d’équilibrer recettes et dépenses
mais de dégager des bénéfices. Les retraites solidaires sont sous l’option d’égalité
d’une politique. Dans ce domaine préjuger de la meilleure capacité du privé à le
gérer est de suggérer que les administrations publiques sont des gaspilleuses
des deniers publics. Qu’est-ce qui empêche de les faire auditer par des sociétés
privées ? Néanmoins une prestation sociale répond à un objectif politique,
et ne peut être sous l’objectif de rentabilité mais de celui du service. Les
retraités doivent pouvoir vivre décemment à hauteur de ce qu’ils ont cotisé dans
leur vie et l’Etat doit le budgéter dans cet esprit. Tout enrichissement du
pays doit profiter aux prestations sociales et l’austérité s’adresse d’abord au
fonctionnement de l’Etat où une meilleure gestion doit permettre de conserver
la qualité du service en générant des économies. Ce n’est pas la voie suivie
actuellement !
Enfin le problème
des retraites est essentiellement un problème démographique. L’affaiblissement
de la politique familiale conduit nécessairement à une diminution du nombre des
naissances. La politique consistant à laisser plus longtemps au travail le salarié
consiste seulement à jouer sur le coût du chômage et des pensions. Ce sont des
vases communicants qui ne peuvent en rien régler l’augmentation des dépenses
vieillesse à terme dans une période où la croissance ne permet pas de diminuer
le chômage. Je redis ici que la croissance réelle de 2018 se situe, sauf
correction du PIB du quatrième trimestre, à 0,92% et non 1,5%. En faisant
porter cette diminution sur les gilets jaunes l’Etat prépare les esprits à cette
mauvaise nouvelle. Celle-ci va d’ailleurs servir d’alibi et permettre une
nouvelle attaque sur les retraites en 2019
Retraités et automobilistes restent les vaches
à lait du pouvoir.
L’Etat se livre sur ces sujets à des
désinformations iniques
Sous couvert de fausses raisons pour l’un
et l’autre.
Retraites trop élevées et climat obligeraient
L’Etat à nous ponctionner un peu plus.
Des arnaques enrichissant qui ?
Cherchez donc vers le haut
Vous peuple du bas !
Claude Trouvé
01/03/19
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire