« Toutes
les dix minutes, un Français meurt prématurément du fait de la pollution de
l’air, et notamment des particules qui proviennent de la combustion des
énergies fossiles. Cette hécatombe, c’est 48 000 décès par an, c’est plus que
tous les accidents de la route, tous les suicides, tous les meurtres, toutes
les noyades, tous les accidents domestiques réunis ».
Emmanuel
Macron Président de la République Française (Discours du 27 Novembre 2018 en
réponse aux « gilets jaunes »)
Macron
a lancé (illicitement) la campagne européenne masqué derrière le grand Débat
National où il cumule des dizaines d’heures de télés aux frais du contribuable.
Attaqué par les écologistes sur ses reculs en la matière, il fait un show
verbal avec de grandes phrases sur ce thème pour se dédouaner. Encore une fois,
il s’agit d’un enfumage de plus, et le mot est particulièrement approprié dans
ce cas. Il est redoutable car il fait appel à la peur de la population et
justifie ainsi toute une politique de prédation financière du peuple. Qui ne
donnerait pas son écot pour ne pas mourir ou voir mourir ses ascendants ou
descendants. En plus il s’agit de notre responsabilité de ne pas polluer. Comme
pour le nucléaire et le climat, la pratique de la peur est le moteur écologique
essentiel dont les politiques font leurs choux gras quand ils y voient leur
intérêt électoral.
Alors
raisonnons un peu avant de crier au feu et de payer les pompiers. Il y a
désormais deux catégories de pollution de l’air, la pollution carbone d’une
part, et toutes les autres pollutions d’autre part. Elles sont totalement différentes
puisque la première n’est pas toxique pour l’homme aux taux rencontrés en air
libre, alors que la seconde peut avoir un impact sur la santé. De plus l’accent
mis par le Président porte sur les particules fines dégagées par la combustion
de matières fossiles, essentiellement gaz, pétrole et charbon. La peur est donc
fixée sur celles-ci avec un chiffre de 48 000 décès par an monté en épingle.
Signalons déjà, précision importante, qu’il ne s’agit pas de mort instantanée
mais de décès prématurés. L’une des principales causes de décès, comme pour le
tabac, est le cancer avec pour cible l’appareil respiratoire. Or l’OMS, par le
canal de son émanation le CIRC, évalue à 0,4 % la proportion des cancers
survenant en France qui sont imputables à la pollution de l’air extérieur, soit
1 400 cas par an dont tous ne sont pas mortels, et dont rien ne prouve qu’ils
soient liés aux activités humaines (Communiqué du CIRC du 25 juillet 2018). La
différence des chiffres est si énorme qu’un doute peut peser sur les 48 000
décès, objet principal de nos peurs. Mais elle présuppose que notre pollution
en particules fines est nettement au-dessus des normes de santé à respecter. Le
doute plane donc sur la véracité des chiffres et sur le taux de pollution.
Le plus simple est de
regarder les taux de pollution relevés en France et leur évolution mesurée en µg/m3.
Le graphique ci-contre donne cette information en hiver et en région
parisienne, saison et région propice aux plus hautes pollutions de particules
fines. Le constat est plus que rassurant puisque les concentrations de fumées
noires ont été divisées par 20 depuis les années 56-57. Quand je pense avoir
vécu de 58 à 60 à Paris sur un boulevard périphérique, je me demande ce qu’il
me reste à vivre. Cette plaisanterie n’est pas si innocente car elle demande à
connaître la cause de la diminution effective dès 1964, et ce qu’il faut penser
de la pollution actuelle.
La
première réponse est que cette très forte amélioration est due à la baisse
importante des suies issues de la combustion du charbon, puis à l’amélioration
des procédés de combustion et de traitement des échappements automobiles. Les
teneurs de 2009 à 2017 sont ainsi les plus faibles jamais enregistrées… Pour
répondre à la deuxième question il faut se référer à l’étude de la Santé
Publique France sur la période 2007-2008 et publiée en 2016, étude sur laquelle
s’appuie le gouvernement. Elle relève en effet qu’en 2007 – 2008, les
concentrations moyennes en particules « PM 2,5 » étaient les suivantes :
Communes rurales : 9,9 µg/m3
2000 – 20 000 habitants : 10 µg/m3
20 000 – 100 000 habitants : 10,9 µg/m3
Zones urbaines > 100 000 habitants :
13,6 µg/m3
On peut ajouter que la concentration à
Paris en 2017 était de 12µg/m3. Mais l’intérêt de cette étude est le
constat de quasi-égalité de pollution sur tout le territoire, hors des zones
urbaines de plus de 100 000 habitants. La pollution des grandes villes a néanmoins
diminué d’un facteur 13 à 14 depuis les années 1956-1957. Alors interrogeons-nous
sur la norme de 4µg/m3 retenue par la Santé publique censée
motiver un effort supplémentaire de dépollution. Notons tout d’abord que les
chiffres fournis pour les communes rurales et urbaines datent de 2007-2008 et
que, rien que sur l’exemple de l’agglomération parisienne montré plus haut, la concentration
de 2017 est divisée de moitié. Mais plus important encore est que la norme de 4µg/m3
a été fixée en cherchant la pollution des communes les moins polluées en France.
La carte ci-dessus montre qu’il s’agit essentiellement de zones montagneuses,
ce qui va décevoir nos stations balnéaires, en particulier celles de l’Ouest
balayées par le vent d’Ouest. Un coup d’œil sur la carte montre que
toutes les communes concernées sont situées en montagne, à une altitude moyenne
de 2 000 mètres, et pourquoi pas au sommet du Mont Blanc !
Et pourquoi pas me retorquerez-vous ?
Alors je vous réponds qu’un objectif donné à un ensemble humain quel qu’il doit,
doit être ambitieux mais accessible, selon les principes propagés par l’Assurance
Qualité. On n’impose pas d’office le but d’intégrer Polytechnique à une élève
entrant en sixième alors qu’il a encore des difficultés de lecture et de calcul,
ni même aux autres d’ailleurs. La perspective du Brevet puis du Bac est
largement suffisante pour organiser au mieux son rythme d’acquisition de connaissances.
De toute évidence ce but normatif est inaccessible, car sa caractéristique est
qu’il devient de plus en plus difficile à atteindre au fur et à mesure que l’on
s’en approche et les moyens pour y parvenir croissent exponentiellement. D’ailleurs
il existe d’autres normes dans le monde et le tableau ci-contre montre que la
norme choisie par la France est la plus contraignante au nom des 48 000 décès
prématurés évités. Remarquons au passage que ce nombre peut être aussi bien 17 527
ou 74 426, ce qui montre l’imprécision dans laquelle est cette étude, et
le nombre exprimé à l’unité près a alors de quoi faire sourire. Le tableau ci-dessus
montre que la France a choisi la norme la plus basse, derrière celles de l’UE,
du Grenelle de l’environnement, de l’OMS, et l’hypothèse 2 de la Santé Publique
France. Remarquons aussi que la marge d’erreur sur l’hypothèse 1 retenue
englobe le nombre de décès de l’hypothèse 2, et de l’OMS.
La France veut donc encore se montrer plus
royaliste que le roi, l’OMS en l’occurrence, dans le même esprit que sa
croisade pour la décarbonisation quand la part de la France était de 0,74% en
2016 et que 10% en moins de carbone en France ferait baisser le taux mondial
de 9 dix millièmes alors que le même pourcentage de baisse de 10% pour
la Chine fait baisser le taux mondial de 2,8% soit plus de 3100 fois plus ! Ceci n’est pas hors sujet car la
pollution dont il s’agit émet des particules fines que les Pékinois connaissent
bien. Il faut savoir que les « fumées noires » sont le constituant majeur des
particules fines « PM 2,5 », et que la concentration dans l’air de ces
dernières est donc toujours supérieure à celle des fumées noires. Le résultat
laisse sans voix. A la fin des années 1950, le taux des « PM 2,5 » dans l’air
que respiraient les Parisiens avoisinait au moins 200, contre 12 aujourd’hui.
Mais la comparaison dans le temps ne s’arrête pas là, les résultats dans l’espace
sont tout aussi éclairants et même surprenants. Ce n’est pas aux Etats-Unis ni
en Europe de l’Ouest que vous aurez affaire aux plus hautes concentrations de
particules fines mais dans le désert du Sahel par exemple avec leurs fameux
vents de sable. Alors je déconseille aux écologistes les voyages à Marrakech et
au Sénégal même sous les cocotiers.
Enfin
par expérience j’ai toujours exprimé ma méfiance sur les bidouillages de
chiffres, or le nombre de 48 000 décès est issu d’un calcul complexe
faisant intervenir le nombre de décès constatés en 2007-2008, un coefficient de
risque estimé dû à la pollution, la concentration observée et la concentration
cible. Je vous fais grâce de la formule mathématique qui est du niveau d’entrée
en faculté. De toute évidence ce nombre sert d’épouvantail mais n’a rien de scientifiquement
sûr et, pour se faire, est généré par un objectif d’une ambition démesurée dont
les conséquences sont très contraignantes pour le fonctionnement de notre
économie, invalidantes pour nos déplacements et dispendieuses pour notre portefeuille.
Je vais terminer cet article par un coup
d’œil sur l’une des conséquences de ce choix déraisonnable de la norme de 4,9µg/m3
en regardant ce qui a amené à une diminution sensible des concentrations depuis
les années 56-57. Le transport automobile est pointé du doigt et le diesel est
devenu honni. Ceci entraîne des achats de voiture à essence et électriques
grâce à des subventions données tant aux acheteurs qu’aux producteurs. Le graphique ci-dessus donne l’évolution des normes pour
les véhicules diesel depuis 1992. On voit que dès 2009 la pollution admise était
28 fois moindre dès 2009 et n’a pas évolué depuis. A ce stade on peut considérer
que l’émission de particules fines par les voitures diesel est résolue et qu’aller plus loin serait
économiquement déraisonnable pour un gain infime. L’âge moyen du parc autmobile
actuel est entre 9 et 10 ans. Il en résulte qu’en gros la moitié du parc diesel
est constitué de véhicules respectant la dernière norme et que l’autre moitié a
déjà diminué la pollution d’un facteur de 5 à 6 par rapport à 1992.
Mais le plus étonnant est ce tableau donnant la norme pour
les véhicules à essence. Si les véhicules diesel polluaient 5 fois plus en 2005,
ce n’est plus le cas depuis 2009. On peut même dire que ceux construits depuis cette
date polluent moins que les véhicules à essence parce qu’ils sont plus économes
en carburant. La guerre au diesel n’est plus justifiée sauf pour des raisons de
renflouement des caisses de l’Etat et la surtaxation du gas-oil est tout
simplement une arnaque de plus. Début janvier les immatriculations des véhicules
diesel et essence représentaient 92,75% laissant peu de place aux véhicules
électriques essentiellement hybrides et avec une inversion de la proportion essence/diesel
en faveur de l’essence depuis 2015 due à l’impact de la politique
gouvernementale. S’il n’y a plus de raison écologique de supprimer le diesel, la
politique actuelle vise donc un autre objectif en se cachant derrière une raison
écologique désormais illusoire mais très vendeuse dans l’opinion.
La voiture
électrique se fraie très lentement un chemin en prenant principalement sur les anciens
propriétaires de véhicules diesel, et pour cause, mais elle n’amène pas un
progrès sensible sur les particules fines à cause de son freinage qui émet plus
que les autres véhicules et au-delà des émissions des pots d’échappement. Par
ailleurs la course à la diminution de la pollution amène à des contraintes sur
la circulation en particulier dans les grandes villes pour dépassement d’une
norme plus contraignante que partout dans le monde avec l’illusion de devoir
respirer un air d’altitude à 2000m pour ne pas mourir prématurément alors que l’altitude
moyenne des communes françaises est de 300m. La promotion de Saint-Véran, le
plus haut village de France, est assurée. Quittez vite vos résidences du bord
de mer. Je pense à mes voyages en train dans les années 50 où la fumée des trains
vous couvrait d’escarbilles. Ma tante morte centenaire a eu une chance inouïe d’échapper
à une mort prématurée.
Il s’abat sur la France un climat de déraison
Qu’alimente un pouvoir vendu aux riches
Surfant de plus sur des dogmatismes
Enlevant le peu de sens critique
Qui pourrait encore éviter
Une politique mortifère
Désormais délirante !
Claude Trouvé
08/03/19
PS : Cet article a fait de nombreux emprunts à
celui de Christian Gérondeau : « Pollution aux particules fines « PM
2,5 » : 48 000 décès imaginaires ». Je salue le travail remarquable de ce Haut-fonctionnaire
sur ce domaine de l’écologie, et auteur de nombreux livres.
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