mercredi 4 décembre 2019

Démographie alarmante ou maîtrisable ? (4ème partie)


Les trois premières parties de cet article ont montré qu’il n’y avait pas d’urgence démographique, pas plus que d’urgence climatique d’ailleurs, car il faut bien parler de cette dernière puisque les deux font partie du fonds de commerce d’un écologisme alarmiste. Néanmoins les poids respectifs des grandes zones géographiques vont évoluer différemment dans les 40 ans qui viennent et des disparités problématiques dans celles-ci et dans les nations qui les composent vont se faire jour. On a déjà vu deux cas extrêmes, celui du Nigéria où la croissance démographique est explosive, et celui de la France qui, toutes choses égales par ailleurs, entrera en décroissance démographique à partir de 2025. Si la croissance démographique mondiale est dans une phase de décélération et reste donc maîtrisable dans les 40 ans qui viennent, certains Etats et l’ONU devront favoriser des mesures ciblées où les problèmes migratoires ne manqueront pas de peser de leur poids, et ce en dehors de l’immigration climatique prophétisée. Si l’urgence ne pèse pas sur la démographique mondiale, elle peut s’avérer nécessaire dans certaines nations compte-tenu du temps long nécessaire pour corriger les effets indésirables.
 
Reprenons donc l’examen des grandes zones géographiques après celles de l’Asie du Sud-Est et Pacifique, et des 6 pays fondateurs de l’UE. Proches de nous et avec des liens particuliers nous concernant, il y a l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Cette zone géographique comptait 448,9 millions d’habitants en 2018,,soit 5,94% de la population mondiale, avec une croissance annuelle 2017-2018 de 1,7354% en diminution depuis 2000 de -0,05023%/an. La croissance démographique de cette zone est en très nette décélération passant d’une croissance moyenne de 2,53%/an entre 1960 et 2018, à 0,83% entre 2018 et 2053, soit en 40 ans jusqu’à l’apogée probable de la population de cette zone en  2053 et 599,5 millions d’habitants. La croissance moyenne annuelle entre ces deux périodes serait divisée par 3,05. Cette zone qui représentait une population 1,7 fois plus importante que celle des 6 pays fondateurs de l’UE en 2018, représenterait 2,4 fois celle de ces pays en 2053 soit dans 35 ans. Ceci relativise la croissance démographique de ces 6 pays européens. Ce résultat peut paraître surprenant mais il faut bien acter que la croissance de cette zone de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient est en décélération et restera probablement maîtrisable.

Proche de nous par l’histoire, il nous faut traverser l’Atlantique pour regarder l’Amérique du Nord. Ce continent comptait 364,3 millions d’habitants en 2018, avec une croissance démographique annuelle 2017-2018 de 0,70186% en diminution de -0,02366%/an. Ce continent à un poids relativement faible dans la population mondiale, soit 4,8%, mais a un poids économique de 19,4% qui en fait une zone géographique très importante. Toutefois cette zone est en forte décélération de sa croissance démographique. L’apogée de population de l’Amérique du Nord serait relativement proche en 2047, soit dans 18 ans, à 402,8 millions d’habitants soit une augmentation de 10,6% de la population depuis 2018. La croissance annuelle moyenne était de 1,05% sur la période 1960 à 2018, elle tomberait à 0,35% entre 2018 et 2047, soit 3 fois moins rapide. On retrouve ce même facteur que pour l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Cette augmentation est non seulement maîtrisable mais elle demande de prévoir les conséquences d’une décroissance annoncée proche.

Puisque nous sommes arrivés de l’autre côté de l’Atlantique, il est normal de s’intéresser à une zone historiquement liée à l’Europe et particulièrement à la France, à savoir l’Amérique latine et les Caraïbes. Cet ensemble géographique comptait 641,4 millions d’habitants en 2018, soit 5,94% de la population mondiale, avec une croissance 2017-2018 de 0,94197% en diminution de -0,03419%/an sur la période 1960-2018. Cette zone géographique est plus peuplée que l’Union Européenne et souvent considéré à tort comme une zone à forte croissance démographique. En réalité cette zone de l’Amérique latine et Caraïbes est en forte décélération démographique et son apogée de population est proche en 2045 avec une population de 728,5 millions d’habitants. La croissance démographique de cette zone était de 1,86%/an entre 1960 et 2018, et serait de 0,46% de 2018 à 2043 soit 4 fois moins rapide. C’est la plus forte décélération des zones géographiques examinées jusqu’ici.

Le pendant de l’autre côté de l’Atlantique c’est l’Afrique subsaharienne dont on peut penser que c’est dans cette zone géographique que le danger de surpopulation est le plus probable. Le premier examen des chiffres de population depuis 1960 communiqués par la Banque mondiale donne des croissances annuelles très évolutives dans le temps contrairement à l’Amérique latine, et cela même dans la période récente de l’après 2000. De 2001 à 2011 le pourcentage de variation annuelle de population est en phase d’accélération. De 2011 à 2018 il est phase de décélération. Si l’on veut tenir compte de la dernière évolution, il faut donc se contenter de la période 2011-2018 pour faire des prévisions. Mais en même temps on touche une fois encore à la difficulté de faire des prévisions à long terme puisqu’en moins de 20 ans l’orientation de la croissance a changé de signe. On peut même douter dans ce cas que des prévisions pour quelques dizaine d’années ne soient pas validées par la réalité. On pourrait peut-être mieux assurer les prévisions par une étude des causes de ces fluctuations du pourcentage de variation annuelle de cette population. De plus on constate sur le deuxième graphique entre 2011 et 2018 que ce pourcentage de variation ne varie pas linéairement et à tendance à aggraver la décélération de la croissance démographique selon l’équation portée sur le graphique donnant le pourcentage en fonction de l’année.

Ces précautions prises, et avec la mention toutes choses égales par ailleurs, on peut tenter une prévision d’évolution de la population de cette zone. Elle comptait 1,0783 milliards d’habitants en 2018, soit 14,2% de la population mondiale, et avait eu une croissance annuelle 2017-2018 de 2,6808% en diminution croissante depuis 2011. La diminution de plus en plus rapide du pourcentage de la croissance annuelle de  la population de l’Afrique subsaharienne conduit à une apogée de 1,866 milliards en 2052. Le pourcentage moyen de croissance annuelle était de 2,72%/an entre 1960 et 2018, il pourrait être de 1,63%/an entre 2018 et 2052., soit une diminution d’un facteur 1,7. Ces chiffres sont très révélateurs d’une zone de population qui est en train de réaliser une décélération de sa croissance. Se poursuivra-t-elle jusqu’en 2052, ceci reste une interrogation. Néanmoins il n’est pas permis aujourd’hui de répandre le catastrophisme démographique sur cette zone de population dont on peut espérer qu’elle atteindra une apogée dans moins de 40 ans à l’image de la plupart des zones étudiées. Il est probable que l’évolution après 2052 ne sera pas celle représentée ici, vu les fluctuations subies par cette population dans le pourcentage de variation annuelle avec des accélérations et des décélérations continuelles. Toutefois il apparaît que globalement l’Afrique subsaharienne présente actuellement une croissance démographique maîtrisable mais que ce n’est vraisemblablement pas le cas de toutes les nations représentées puisque que l’on sait que ce n’est pas le cas déjà du Nigéria.

Je termine ce tour d’horizon des grandes zones géographiques par l’analyse de la croissance démographique de l’Europe et de l’Asie Centrale. Comme l’Afrique subsaharienne, cette zone présente des fluctuations importantes du pourcentage de variation annuelle de la croissance qui laisse présager les mêmes causes de disparités décalées dans le temps des évolutions démographiques des nations qui la composent. Après une évolution croissante agrémentée d’accélérations et de décélérations de 1960 à 2011, le pourcentage de variation annuelle est en décroissance depuis 2012. C’est cette orientation que je préfère choisir parce que c’est la plus récente. La zone Europe et Asie centrale comptait 918,8 millions d’habitants en 2018, soit 9,2% de la population mondiale, avec un pourcentage de variation 2017-2018 de 0,36851%/an en diminution moyenne de -0,02367%/an sur la période 2013-2018. L’Europe et l’Asie Centrale atteignent leur apogée en 2042 à 943,7 millions d’habitants, soit une augmentation de 2,71% par rapport à 2018. Le pourcentage moyen de sa croissance démographique est divisé par un facteur 3,7 entre la période 1960-2018 à 0,62%/an à 0,17%/an entre 2018 et 2042. Il s’agit d’un ralentissement deux fois plus rapide que celui de l’Afrique subsaharienne.

Nous avons fait le tour des grandes zones géographiques et l’on peut d’ores et déjà en tirer plusieurs réflexions géopolitiques. L’affolement démographique n’est pas globalement de mise dans les 40 ans devant nous et encore moins dans les 20 prochaines années. Les grandes zones géographiques voient toutes leur pourcentage annuel de la croissance de la population en phase de décélération de celui-ci. Certaines d’entre elles verront même leur population décroître entre 2042 et 2062, soit dans 23 à 43 ans par rapport à aujourd’hui. Si la croissance démographique mondiale peut globalement être maîtrisable, on peut se douter que certains pays comme le Nigéria sont dans une phase d’accélération de leur croissance qui peut mener à des situations humanitaires catastrophiques demandant une prise en compte internationale. En résumé toute mesure politique globale de ralentissement n’est pas souhaitable et peut être pire que de rien faire, mais des actions ciblées sur les pays en accélération de leur croissance démographique doivent être mises en œuvre dans les 50 ans qui viennent et permettront d’adapter grâce au progrès la population mondiale aux ressources nécessaires, et d’en limiter régulièrement la croissance. Le prochain article fera un bilan de l’évolution démographique des différentes grandes zones démographiques et mettra en lumière quelque cas extrêmes de croissance ou de décroissance de la population parmi les nations du monde. Il imagera les prévisions démographiques à 10, 20 et 40 ans pour en tirer des pistes de réflexions géopolitiques.

La démographie est un moteur essentiel de l’humanité. 

La décroissance de population est un constat mortel,

Les croissances en accélération mènent au pire. 

C’est l’adaptation aux ressources nécessaires

Qui est le pari de l’humanité pour survivre. 

L’affolement est inutilement anxiogène

En toutes choses il faut raison garder 

L’équilibre population-ressources

N’est pas un but inatteignable 

Comme l’histoire nous le dit.
 
Claude Trouvé
04/12/19

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